@rib News, 24/06/2010 L’atmosphère de l’élection présidentielle 2010 au Burundi. ABUS ET TRICHERIES. Transmission de Mémoire. Point de vue Rose Ntwenga, Montpellier (France), le 23 juin 2010. Les six candidats à l’élection présidentielle 2010 se sont retirés de la compétition dès la publication des résultats des élections communales du 24 mai dernier. Le choix de la chaise vide a été dicté par le constat d’une tricherie préméditée et d’irrégularités flagrantes. Ils ont été dupés par des maitres en la matière en présence de nombreux témoins et des observateurs avisés. Face à l’arnaque réussie, les partis de l’opposition en compétition et leurs militants sont dans la position du refus de la poursuite du processus électoral.
La communauté internationale qui porte à bout de bras le processus de paix a un droit de regard sur la marche et les résultats obtenus grâce à son intervention. Le critère du manque de violence notoire au cours de la journée des élections communales a fait conclure au bon déroulement de celles-ci. Pour nombre d’étrangers, peu de morts au Burundi dans ce contexte est le signe d’une normalité apparente satisfaisante. Cependant, les observateurs internationaux ont sous-estimé l’importance des consignes de toute nature et des ordres dictés dans un cadre informel par les cercles d’influence. L’air de rien, ces consignes ont toujours été en mesure de modifier en profondeur toute activité dont le contrôle n’est pas en faveur de certains acteurs politiques. Aujourd’hui, chacun est face à ses responsabilités. Admettre l’existence d’une duperie ou prouver son contraire, par les parties concernées n’est pas un déshonneur. Cet état d’esprit est valable pour les observateurs dont le jugement de poids s’est forgé sur une normalité apparente. La confusion en cours mérite beaucoup d’attention. Des explications sont nécessaires pour lever les malentendus graves sur les problèmes de la situation présente. Dans ce contexte où le vote de l’électeur est sollicité, chaque citoyen a le droit d’exprimer son sentiment. Son avenir en dépend. Tricherie de plus de 40 ans d’expérience ! L’énumération des faits et des détails au cours de la journée de vote du 24 mai 2010 renvoie à de nombreuses situations connues, dans les différents compartiments de la vie au Burundi. L’exemple, ou le parallèle le plus simple, est l’organisation du Concours national de fin d’école primaire. Ce système bien rôdé a permis, pendant plusieurs décennies, l’exclusion des écoliers Hutu en toute légalité de l’accès à l’école secondaire. Cette discrimination pas facile à détecter s’est faite « au nez et à la barbe » des coopérations bilatérales et multilatérales (UNESCO, Banque Mondiale, etc.) qui ont financé « l’éducation pour le développement de tous ». Faute de preuves palpables, en apparence, à l’exception de la présence clairsemée des élèves Hutu dans les différentes écoles secondaires, aucune dénonciation n’a été possible. Dans ces conditions, les réclamations n’ont pas été formulées. Surtout, aucun corrigé officiel de l’examen n’a été fourni. C’est la stratégie du non - recours. A l’occasion de ces élections en 2010, l’exclusion s’est faite, une nouvelle fois, à l’insu des intéressés avec une efficacité incroyable. Qui est responsable de cette situation en 2010 ? Pierre Nkurunziza, Gabriel Mpozagara, Artémon Simbananye et leurs associés occultes ? Sources photos dans l’ordre : www.digitaljournal, arib info, cprgla.chez.com Deux « Experts » et leurs « associés » aux commandes du pays réel. De mon point de vue, la responsabilité revient à deux personnes qui comptent de l’entourage du Président Pierre Nkurunziza, l’actuel unique candidat au scrutin annoncé du 28 juin 2010. Le pays se heurte de plein fouet au passif de la fondation de la première République le 28 novembre 1966. En effet, d’un côté, Gabriel Mpozagara, le conseiller diplomatique, politique, juridique et de l’autre le conseiller spirituel, Artémon Simbananiye encadrent très bien Pierre Nkurunziza. A travers lui, ces deux personnes (avec leurs alliés très discrets) tiennent le pays et sa population en otages. La Révolution du 28 novembre 1966 s’est construite dans le sang et l’esprit de privation des droits élémentaires individuels autant que collectifs. Depuis, violences, spoliations, disparitions et un déni systématique sur les nombreux délits ont caractérisé la gestion du pays. L’enfermement dans l’arbitraire où s’achemine le Burundi s’annonce terrifiant. La logique à l’œuvre, aujourd’hui, entérine le projet d’installation « légale » d’une dictature sous un parapluie démocratique. Qui est aux commandes du pays apparent ? Pierre Nkurunziza, Chef de l’Etat en exercice, et son entourage direct, portent aujourd’hui une responsabilité écrasante devant le pays et l’Histoire. A quelle époque le candidat Pierre Nkurunziza a-t-il rencontré Gabriel Mpozagara et Artémon Simbananiye ? Dans quelle circonstance a-t-il pu se faire une opinion sur la crédibilité et l’expertise, de l’un et l’autre, en différents domaines ? En toute âme et conscience, peut-il affirmer que cette proximité s’est faite pour son bien, en premier, et celui du pays dont il vient de présider la destinée durant cinq ans. La nomination de Gabriel Mpozagara le 6 septembre 2005 par le président Pierre Nkurunziza génère beaucoup de perplexité. A mon avis, leur collaboration se déroule dans un climat malsain. De quelle manière, les confiances réciproques se sont-elles gagnées ? Gabriel Mpozagara et Artémon Simbananiye sont parmi les acteurs politiques les plus en vue au moment du génocide de mai et juin 1972. Ont-ils évoqué l’action du gouverneur de la province de Ngozi en 1972 ? Selon les télégrammes, quant à la nature de la répression, l’ambassadeur américain évoque dès le 2 mai (1972) la tournure anti - Hutu qu’elle est en train de prendre. Le même jour, un télégramme précise que le gouverneur de Ngozi vient de faire appel aux Jeunesses Révolutionnaires Rwagasore (J.R.R.) pour « aider au maintien de l’ordre ». Deux jours plus tard, un télégramme décrit le rôle actif joué par les JRR aux côtés de l’armée dans les arrestations massives de Hutu à Bujumbura. ( …) Le rôle du président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Le comportement, ces dernières semaines, de Pierre-Claver Ndayicariye, le président de la CENI, sème le doute pour plusieurs raisons. Les contestations pour fraude ne semblent pas l’avoir ému outre-mesure. Pour faire mentir les accusations et rendre caduque toute réclamation, il aurait suffit d’apporter les preuves de probité du travail de dépouillement, du décompte des voix et les procès-verbaux contresignés par les véritables ayant-droit tel que prévu par le fonctionnement initial. Sinon, son refus d’un accès aux différents procès - verbaux, relève, pour le moins, de l’abus d’autorité. A son tour, il se place au-dessus de la Loi. Pour l’avoir côtoyé un peu, il y a vingt ans, ses airs de félin dissimulent un côté mollasson de sa personne. A son mariage avec l’une des filles du Bâtisseur Boniface Simvura, nous avions été étonnés de l’absence de son père à la cérémonie officielle. Son père avait deux femmes, l’une Hutu et l’autre Tutsi. Pierre-Claver (ou son père) ne savait pas laquelle choisir pour être présente à la cérémonie. Cette remarque n’est pas du persiflage ou des propos à considérer comme « des paroles inintéressantes de femmes ». C’est un coup de griffe nécessaire et assumé, autant qu’un éclairage. En définitive, quel était le profil recherché pour présider la Commission électorale, en toute objectivité, dans le contexte d’un pays sortant d’une longue guerre, du meurtre du président Cyprien Ntaryamira, du meurtre du président Melchior Ndadaye et du génocide de mai et juin 1972 toujours pas reconnu par les acteurs politiques burundais ? Si réellement, les indications que sa conscience a été achetée pour organiser des élections au fonctionnement défectueux et en cautionner la validité, il se met dans une situation très acrobatique. Il faut avertir sa famille, que Pierre-Claver Ndayicariye ne sera payé qu’en monnaie de singe. Pour information, ceux qui l’auraient convaincu de truquer, lui rappelleront constamment le reste de sa vie, qu’il demeure un minable faussaire. Quelle sera la nature du prochain régime ? L’élection de Pierre Nkurunziza dans les conditions dénuées de toute concurrence serait le triomphe d’un cynisme absolu. La réussite du génocide de 1972 au Burundi serait accomplie par des survivants Hutu, eux-mêmes. C’est un tour de force à noter ! Comment envisager la vie à nouveau dans les privations élémentaires, à commencer par celle du respect? Quels sont le poids et le sens de la Vérité dans cette atmosphère ? Qui est victime ? Qui est coupable ? Qui est acteur ? Qui est l’ennemi de qui ? Faut-il accepter que la nouvelle conduite de vie se fasse dans une atmosphère où la seule voie libre est accordée à la malfaisance ? Souvenirs. D’Artémon Simbananiye (avec un groupe de personnes satellites), je me souviens que mon père, Venant Ntwenga et les membres du Club des Bâtisseurs les désignaient dans les années soixante par « Désormais, la Loi, c’est nous ! ». Souvent, les Bâtisseurs se plaignaient des arnaques et des moqueries de vive voix dont ils étaient l’objet. Par moment, les altercations prenaient vite une tournure électrique. Artémon Simbananiye (ou une personne satellite) ponctuait les conversations avec « Le summum de la Loi, c’est l’Absence de Loi ! ». Chaque occasion de rencontre était l’étalage des notions de droit face à un public au parcours scolaire très limité mais autodidacte. Nos aînés, parents, nos amis et d’innombrables autres Hutu du Burundi, cibles de cette « Loi des piliers de la 1ère république », ont payé de leur vie. Ne l’oublions jamais. Evitons de vivre n’importe quoi en l’absence de tout repère. Rose Ntwenga Montpellier (France), le 23/06 /2010
Parmi les abus notables de la seconde république du Burundi, cette discrimination a été rendue publique lors des rencontres avec la population à la prise du pouvoir par le Major Pierre Buyoya le 3 septembre 1987 (avènement de la troisième république). |