Deutsche Welle, 18/03/2024 L'opposant historique au Burundi, Agathon Rwasa, a été remplacé à la tête du CNL. Au Burundi, le ministère de l'Intérieur vient de valider la prise de contrôle du Congrès national pour la liberté, le CNL, principale formation d'opposition. Celui-ci est en crise depuis plus d'une année et le 10 mars dernier, les dissidents du parti ont profité de l'absence de son président, l'opposant historique Agathon Rwasa, pour organiser un congrès extraordinaire et le remplacer par Nestor Girukwishaka.
Les fidèles et députés proches d'Agathon Rwasa n'avaient pas pu accéder au congrès et certains d'entre eux avaient été arrêtés. C'est la seconde fois qu'Agathon Rwasa est ainsi dépossédé de son parti et à chaque fois, cela s'est fait avec l'assentiment du pouvoir. Les précisions d'Antéditeste Niragira, notre correspondant à Bujumbura. Evincé une deuxième fois Agathon Rwasa avait déjà été débarqué, en 2010, de la tête de son ancien parti, le Front national de libération, issu de l'ancien mouvement armé des Forces nationales de libération. A la suite de cette éviction orchestrée par le pouvoir en place, il avait créé, en 2019, le Congrès national pour la liberté, le CNL. L'opposant s'est donc fait une nouvelle fois démettre de la présidence de son parti, le CNL, à l'issue d'un congrès extraordinaire organisé dans la hâte. Pour le juriste Thacien Sibomana, l'organisation du congrès viole la loi : "C'est plutôt de l'illégalité qui a été formalisée. Pourquoi ? Plus de policiers que de congressistes, les députés ont été sommés de s'asseoir par terre sous le soleil, les membres statutaires du parti n'ont pas été autorisés à accéder à la salle de réunion [… ] en violation de l'article 70 de la loi régissant les partis politiques, je le cite : en cas de divergence d'interprétation des statuts d'un parti politique, de litige ou de dissension quelconque, le membre lésé saisit la chambre administrative de la Cour suprême. C'est ça la voie légale." Doutes sur la valeur légale Par conséquent, le congrès d'éviction d'Agathon Rwasa n'aurait aucune valeur. C'est du moins l'avis du député Pamphile Malayika, conseiller au cabinet d'Agathon Rwasa, chargé des questions politiques et diplomatiques et membre du bureau politique du CNL. "Le congrès est un non-lieu, estime Pamphile Malayika, c'est hors-la-loi, pour dire que c'est fantaisiste et même les résultats qui en découlent sont fantaisistes." Néanmoins, le ministère burundais de l'Intérieur vient de valider les résultats de ce congrès. Face à cela, le camp du président reste mobilisé. Selon le député Pamphile Malayika, soutien d'Agathon Rwasa, la seule solution à la crise que traverse le Congrès national pour la liberté sera l'organisation d'un autre congrès auquel prendraient part tous les militants du parti : "On doit impérativement passer par un congrès extraordinaire et inclusif auquel participera tout le monde, même les dissidents, comme l'avait informé le président du parti CNL quand il a introduit une requête au ministre de l'Intérieur, disant qu'il allait organiser un congrès extraordinaire en date de 2 mars 2024. Mais le ministre n'a pas accepté alors que ça remplissait les normes." Depuis sa création il y a cinq ans, le Congrès national pour la liberté était jusqu'ici la principale formation d'opposition et la deuxième force politique burundaise capable de rivaliser avec le parti présidentiel. Antéditeste Niragira |