Le Prince Louis Rwagasore avait une femme. Elle s’appelait Rose Ntamikevyo. Par Perpétue Nshimirimana - @rib News, 13/10/07 Ce samedi 13 octobre 2007, le Burundi commémore le 46ème anniversaire de l’assassinat du Prince Louis Rwagasore, héros de l’indépendance du Burundi. Un peu partout à travers la diaspora, des invitations ont été lancées aux Barundi pour se retrouver nombreux afin de marquer cette journée par leur présence. Un fait étonnant, qui semble se répéter cette année encore, mérite d’être relevé. Le souvenir de l’existence du Prince est toujours évoqué de façon très isolé comme s’il avait vécu dans une bulle, sans aucune attache familiale ou affective.
Jamais au cours de ces quarante six dernières années et au cours des différentes commémorations, tous ceux qui disent se reconnaître en lui, n’ont fait allusion à sa famille. C’est comme si, la mort du prince avait été érigée en symbole désincarné, vidé du sens de son engagement et de sa vie. En réalité, à côté de son action politique, le prince Louis était marié et père de deux enfants même si ces derniers ne sont plus de ce monde. Il avait épousé Rose Ntamikevyo en 1959. Ce mariage avait suscité beaucoup d’émotion. Certains croyaient même y voir une portée symbolique. Les acteurs du Burundi officiel n’ont jamais formulé une seule pensée pour l’épouse du Prince. Alors qu’elle fait partie du paysage politique burundais des années 60, Marie-Rose Ntamikevyo est tombée au fil des années dans les oubliettes de l’Histoire. Comment expliquer ce silence autour d’elle ? Pourtant, elle semblait ne laisser personne indifférent. Certains, parmi ceux qui l’ont connue de près, parlent d’elle de façon très affectueuse. “ C’était une perle ” affirme un témoin. D’autres au contraire, étaient beaucoup moins élogieux. Tenter de l’effacer de la mémoire collective, s’agit-t-il d’une volonté politique ? Est-ce un oubli involontaire qui s’est répété d’année en année ? Qu’est-elle devenue après la mort du Prince ? Les héritiers politiques de Rwagasore tout comme ses proches devraient, après toutes ces années, expliquer la façon dont ils l’ont aidée à contenir et à surmonter sa douleur. Apparemment, elle semble avoir été abandonnée de tous et livrée à elle-même. Malgré plusieurs tentatives auprès de personnes sensées lui être proches, il m’a été, par exemple, impossible de connaître la date exacte de son décès. Personne dans son entourage immédiat et connu ne savait ! Cette attitude laisse songeur ! Ceux qui se réclament de l’héritage du Prince Louis Rwagasore devraient réparer ce manquement. Le cas de Marie-Rose Ntamikevyo n’est pas un cas isolé. Tenez, par exemple, la reine Baramparaye, épouse du Roi Mwambutsa IV et mère de Ndizeye Charles, dernier roi du Burundi, est décédée au mois de février 2007 à l’âge approximatif de plus de 80 ans. Depuis l’assassinat de son fils Ntare V en 1972, elle a vécu dans l’indifférence totale du Burundi officiel, abandonnée de tous. Plus d’un burundais a été surpris d’apprendre qu’elle était vivante toutes ces années, quelque part dans la province de Gitega. Combien de temps encore les Barundi vont accepter que “ des acteurs du Burundi officiel ” effacent de leur mémoire tout lien avec la royauté ? Cela dure depuis 40 ans. Pourquoi les proches de cette royauté prolongent-ils cet incompréhensible manque de respect envers leurs aînés ? Cette situation nous rappelle celle que ces mêmes acteurs politiques ont tenté d’imposer aux enfants des “ hutus des années 60 ” pour qu’ils effacent de leur mémoire leurs parents “ disparus ”. Il n’est pas trop tard pour rendre à nos aînés leur dignité, victimes du “ Burundi officiel ”. |