Burundi : Opposition et pouvoir se regardent désormais en chiens de faïence
Sécurité

Jeune Afrique, 06/01/2015

Burundi : climat sécuritaire tendu à six mois de la présidentielle

Alors que les zones d'ombre persistent autour de la récente attaque de Cibitoke, qui a fait plus de 100 morts parmi des rebelles non identifiés dans le nord-ouest du Burundi, trois militants du parti au pouvoir ont été assassinés à l'Est. Les autorités soupçonnent des membres l'opposition…

À six mois de la présidentielle prévue le 26 juin au Burundi, le climat sécuritaire se dégrade dans le pays. Les cinq jours d'affrontements de Cibitoke, dans le nord-ouest du pays, n'ont pas aidé à calmer les esprits. Au contraire. Opposition et pouvoir se regardent désormais en chiens de faïence, se soupçonnant mutuellement de préparer des coups bas.

Pacifique Nininahazwe, l'un des principaux leaders de la société civile, a tiré lundi la sonnette d'alarme sur Facebook, dénonçant "des arrestations de responsables locaux de l'opposition, des fouilles chez des leaders de l'opposition à Bujumbura, des publications de la présidence de la République comportant des insinuations malveillantes sur certains leaders de la société civile".

« Un mystère plane toujours sur l'attaque de Cibitoke, même après la sortie médiatique de l'armée ce matin.

D'un côté, un groupe de 200 combattants bien armés et bien entraînés mais qui ne se déclare pas et ne fait aucune revendication.

De l'autre, une armée qui affirme connaître tous les plans de cette rébellion mais qui n'a aucune idée de son identité et de ses leaders. L'exécution sommaire et immédiate des combattant arrêtés ou qui se sont rendus semble dire que l'armée n'avait pas besoin de leurs informations. Une volonté de tout effacer.

Enfin, des arrestations de responsables locaux de l'opposition, des fouilles chez des leaders de l'opposition à Bujumbura, des publications de la présidence de la république comportant des insinuations malveillantes sur certains leaders de la société civile.

C'est quoi cette guerre? Que nous cache-t-on à Cibitoke? »

Trois militants du CNDD-FDD tués

En outre, le meurtre de trois militants du parti au pouvoir est venu exacerber les tensions. "C'est un crime très grave (…) à caractère politique à l'approche des échéances électorales majeures prévues à la mi-2015", tance déjà Onésime Nduwiwana, porte-parole du Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD, parti au pouvoir).

L'attaque est survenue dans la nuit de dimanche à lundi dans un bar de Gisuru, commune de la province de Ruyigi située à quelque 250 km à l'est de la capitale Bujumbura. Selon un responsable local, cinq personnes en tenue militaire et armés de fusils (...) ont ciblé trois militants du parti Cndd-FDD.

"Elles ont ligoté leurs victimes et les ont couchées par terre avant de les tuer à l'arme automatique puis ont brûlé un peu plus loin une maison [de leur] parti qui sert de lieu de rencontre et de réunion", a-t-il poursuivi, interrogé par l'AFP.

"Nous pensons que ceux qui ont commis ce crime lâche appartiennent à la frange extrémiste de l'opposition burundaise, et dont l'objectif est de saboter les élections de 2015", a de son côté accusé le porte-parole du Cndd-FDD, refusant de donner des noms.

Pas sûr que ces propos rassurent dans les rangs des opposants au pouvoir de Pierre Nkurunziza. "Qui dans l'opposition peut affirmer aujourd'hui, avec certitude, qu'il ne se trouve pas dans le collimateur du régime en place ?" s'interroge un membre de la société civile burundaise.

Par Trésor Kibangula