Des ilôts de ségrégation à base ethnique encore au Burundi
Politique

PANA, 05 février 2015

 Bujumbura, Burundi - Le chef de l’Etat burundais, Pierre Nkurunziza (photo), a fustigé, jeudi, la persistance de la ségrégation dans certains secteurs d’activités, 24 ans après l’entrée en vigueur de la Charte de l’unité nationale qui a été scellée pour mettre fin aux antagonismes séculaires pour le leadership entre les deux principales composantes ethniques des Hutu, majoritaires et des Tutsi, minoritaires du pays.

Les citoyens de l’autre ethnie ultra-minoritaire des Batwa (Pygmées) qui existe au Burundi sont aujourd’hui encore considérés comme des citoyens de seconde zone, alors que les historiens les donnent pour les premiers occupants autochtones du pays.

Le président Nkurunziza a tenu ces propos lors des cérémonies commémoratives de la Charte de l’unité nationale qui a été adoptée le 5 février 1991, au terme d’un référendum populaire.

Le nom de l’ancien président tutsi du Burundi, Pierre Buyoya, reste associé à la Charte de l’unité pour l’avoir âprement négociée avec la majorité ethnique des Hutu, non sans résistance dans son camp qui était resté longtemps aux commandes des affaires de l’Etat au prix de nombreuses années de guerres civiles cycliques à caractère ethnique.

C’est à partir de l’année 1993, à la faveur du passage au multipartisme, que le pouvoir est revenu à la majorité Hutu par les urnes.

La passation du pouvoir n’a cependant pas été facile étant donné que le premier président hutu démocratiquement élu de l’époque, Melchior Ndadaye, a été assassiné dans une insurrection d’une partie de l’armée à l’époque dominée par la minorité tutsi.

Une tragédie nationale s’est ensuite abattue sur le pays avec des massacres interethniques sans précédent qui ont fait au moins 300.000 morts, essentiellement des civils et poussé à l’exil intérieur et extérieur plus d’un million d’autres citoyens.

La guerre civile s’est poursuivie jusqu’à la signature de l’Accord d’août 2000, à Arusha, en Tanzanie, sur la paix et la réconciliation nationales, qui est allée encore plus loin en mettant en place des mécanismes d’apaisement par un partage du pouvoir plus équitable à tous les niveaux des responsabilités dans des proportions de 60% pour les Hutu majoritaires et 40% pour la minorité Tutsi.

L’équitable Accord d’Arusha protège également les femmes en leur accordant 30% des responsabilités à tous les niveaux du pouvoir pendant que l’autre minorité politico-ethnique des Batwa accède difficilement aux instances de prise de décision par cooptation.

Le fait ethnique a encore reculé à la faveur de la signature de l’accord global de cessez-le-feu de 2003 qui a mis fin à une décennie de guerre civile et sonné l’avènement au pouvoir par les urnes de l’ancienne principale rébellion hutu du Conseil national pour la défense de la démocratie/Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD) dont est issu l’actuel chef de l’Etat burundais.

Le président Nkurunziza a également tablé sur la récente mise en place de la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation (CVR) et son travail pour enterrer définitivement la hache de guerre à caractère ethnique dans son pays.

La CVR est appelée à mettre à nu et punir les auteurs et commanditaires des différentes tragédies qui ont endeuillé le pays depuis l’indépendance du Burundi, de 1962 à nos jours.

Nombreux sont cependant les observateurs attentifs de la scène politique nationale qui estiment que la pauvreté qui touche près de 70% de la population burundaise reste l’obstacle majeur à la paix et la cohésion sociales dans un pays sans ressources naturelles et économiques solides autre que la culture du café et de subsistance, de manière générale.