Burundi : La CNIDH dénonce "des dérives et des violences verbales et physiques"
Droits de l'Homme

PANA, 20 mars 2015

Une commission des droits de l’homme tire la sonnette d’alarme sur le contexte préélectoral à risque au Burundi

Bujumbura, Burundi - La Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH) a attiré l’attention, vendredi, des parties prenantes aux élections générales des mois prochains pour que les choses changent en vue d’élections plutôt apaisées, inclusives et festives au regard des dérives et des violences verbales et physiques.

Il s'agit au cours de ce contexte préélectoral tendu des nervosités conduisant aux violences verbales, des tentatives d’éliminations physiques, des emprisonnements arbitraires de militants des partis politiques, des destructions d’insignes et permanences des partis politiques, des refus de tenue de réunions pour certains partis et acteurs politiques, la détention illégale et l’usage d’armes à feu créant de la panique dans la population, des cas de fuite de populations vers l'extérieur du pays.

Dans une déclaration rendue publique par le président de la CNIDH, le frère Emmanuel Ntakarutimana, une autorité morale respectée dans le pays, la Commission constate, en outre, que l’opinion nationale est marquée par des sujets de demande de justice pour des défenseurs des droits humains et des trois sœurs religieuses italiennes qui ont été assassinées, l’année dernière à Bujumbura, dans des circonstances non encore élucidées à ce jour.

La société civile reste mobilisée pour des enquêtes de nature à mettre la main sur les commanditaires, les exécutants et le mobile de l’assassinat des trois missionnaires dans un couvent du nord de la capitale burundaise, en décembre 2014.

Par ailleurs, les médias ont fait état, ces derniers jours, d’une liste en circulation de défenseurs gênants des droits de l’homme à éliminer.

Le contexte préélectoral est encore marqué par des revendications sociales des syndicalistes, ainsi qu’un débat controversé sur une éventuelle troisième candidature du président sortant, Pierre Nkurunziza, à sa propre succession.

La vie économique nationale a été dernièrement paralysée par une grève générale à laquelle avait appelé la Confédération des syndicats du Burundi (COSYBU), ainsi que d’autres organisations de la société civile engagées dans une "campagne contre la vie chère".

Pour la CNIDH, «toute détérioration de la sécurité est à prévenir, car elle est susceptible de conduire à des violations des droits de l’homme».

La CNIDH avise qu’en cas de violation massive des droits de l’homme, de crimes de guerre, ou de crimes contre l’humanité, les leaders des partis politiques ne pourront pas échapper à leurs responsabilités.

Dans ses différentes recommandations, la CNIDH a appelé les partis et autres acteurs politiques d’axer plutôt leur communication sur les projets de société et les programmes afin d’éclairer la population dans son intention de vote.

Les différents acteurs engagés dans diverses revendications, quant à eux, sont appelés à privilégier la voie du dialogue, de la tolérance et de la concertation dans la gestion de toutes les questions sensibles, notamment celles liées au processus électoral et aux dossiers en justice.

La CNIDH invite également la justice à prendre au sérieux l’ampleur de la question de l’impunité et des mesures pour éviter le désespoir et le recours à la justice populaire.

La Commission invite, par ailleurs, la justice et l’autorité électorale nationale indépendante à mieux se préparer à la gestion des cas de contentieux électoraux.

La CNIDH recommande, enfin, aux corps de défense et de sécurité de protéger toute la population vivant sur le territoire burundais sur un pied d’égalité et à faire preuve de neutralité politique.

Les Burundais se rendent aux urnes, à partir du mois de mai prochain, pour élire de nouveaux maires et députés, ensuite, en juin, pour se choisir un nouveau président de la république, en août, pour le choix de nouveaux Sénateurs, chefs de quartiers et de collines qui sont les plus petites entités administratives à la base dans le pays.

Quelque six candidats de l’opposition, dont un indépendant, ont déjà déclaré des candidatures, contrairement à la mouvance présidentielle qui entretient toujours le suspens dans l’opinion.