Burundi : Le pouvoir, désormais fêlé, entame son compte à rebours
Opinion

Financial Afrik, 17 mai 2015

Burundi : la nuit des grands couteaux

Une déflagration qui illumine le ciel. Un vieil Ak47 qui élève sa complainte dans la nuit de Bujumbura. Et puis c’est le silence. Toute résistance est désormais vaine. Un à un les putschistes se rendent quand ils ne se dénoncent pas. Dernier des Mohicans, le Général Godefroid Niyombaré siffle lui même sa défaite.

Pas même une armistice à la Pétain. Non, une capitulation totale. Sans condition. «J’espère seulement qu’ils ne vont pas nous tuer» marmonne le Général qui a fait pourtant son Dien Ben Phu avec son ennemi d’aujourd’hui. Lui et le président Pierre Nkurunziza deux frères d’armes, pilier du CNDD-FDD, cette matrice du nationalisme Hutu, partie prenante de la guerre des 100 000 morts (1993-2005) et des accords d’Arusha.

Le coup d’Etat avorté du 13 mai marque la cassure définitive entre l’assoiffé du pouvoir et le chef des renseignements, l’homme d’action et l’intellectuel, le tacticien et le stratège. L’un a reculé sans couvrir sa fuite laissant ses officiers à la merci de la main vengeresse d’un pouvoir qui a mesuré son extrême impopularité à la faveur de ce putsch raté.

L’autre sait que son pouvoir, désormais fêlé, entame son compte à rebours. Dans son village natal de Ngozi qui l’a accueilli après son retour mouvementé de Dar Es Salam, le président Nkurunziza le sait désormais, la malédiction du troisième mandat est réel.
Même avec l’armée et la cour constitutionnelle en poche, le président aura du mal à dormir en fermant les deux yeux. Ses ennemis courent toujours. Il pourra compter encore sur l’aide des USA qui ont diplomatiquement contribué à l’échec du putsch. Mais pour combien de temps ?

Pour les malheureux mutins, le silence de la communauté internationale rassemble à une chape de plomb. Un lourd couvercle qui risque de se refermer sur ces officiers qui ont cru écrire l’histoire. Pas plus qu’à Moscou quand Lénine, toutes voiles dehors, fuyait en 1905 suite à sa première tentative de renverser le tsar, à Bujumbura le peuple n’est venu qu’au secours de la petite lueur de victoire entrevue dans l’après midi du 13 mai.

Passé l’instant d’euphorie, le mur humain que décrivaient de romantiques agences de presses internationales s’est effondré. Face aux putschistes devenus mutins, il n’y avait plus que des portes et des volets qui se refermaient. Des foules qui fondaient comme des fantômes. Plus rien, que la kalachnikov et, dans les réseaux sociaux, le tweet rageur du président Nkurunziza qui a fait le tour du monde. Le rideau est tombé cédant la place à un vaste procès martial de 5 généraux désormais face à leur destin lequel, espérons-le, dans ces Grands Lacs de tous les excès, ne rassemblera pas à une potence.

Par André G…