La tension est vive à Bujumbura
Sécurité

@rib News, 19/05/2015 - Source ATS

 Des petits groupes de manifestants sont redescendus lundi dans les rues de Bujumbura, au Burundi, pour dénoncer la candidature à un troisième mandat du président Pierre Nkurunziza. Il a remplacé trois ministres : ceux de la Défense, des Affaires étrangères et du Commerce.

L'atmosphère était tendue dans la capitale burundaise, où des habitants ont fait état de tirs nourris durant la nuit. En milieu de matinée, des dizaines de manifestants essayaient de se rassembler sur les avenues des quartiers excentrés de Musaga, Nyakabyga et Cibitoke, mais ils étaient chassés par les tirs de sommation des militaire.

Pour la première fois depuis le début du mouvement, l'armée - et non la police - a été déployée pour assurer l'ordre. Elle était jusqu'ici perçue par les manifestants comme plus neutre que la police, jugée aux ordres du pouvoir.

L'armée face à elle-même

A Musaga, un face-à-face a même opposé deux unités de l'armée. Selon des témoins et des journalistes, la brigade spéciale de protection des institutions (unité d'élite de l'armée assurant la garde présidentielle) est arrivée en matinée dans ce quartier du sud de la capitale, où l'armée était déjà déployée.

Les membres de la brigade, coeur des forces restées loyales à Pierre Nkurunziza, ont tiré en l'air, dispersant temporairement quelque 200 manifestants opposés au troisième mandat du président. Des soldats de l'autre unité sont alors intervenus pour demander à leurs collègues d'arrêter de tirer.

Les deux groupes se sont fait face, levant leurs armes en l'air ou se pointant même directement, selon des témoins. Le chef d'état-major adjoint de l'armée Fabien Nzisabira a dû se déplacer pour calmer le jeu.

Plus de 100'000 réfugiés

Le pays a basculé dans une grave crise politique à la suite de la décision de M. Nkurunziza de briguer un troisième mandat présidentiel, violant selon l'opposition la Constitution et les accords de paix d'Arusha qui ont mis à la fin la guerre civile de 1993-2005.

L'intéressé prétend que son premier mandat (2005-2010) ne doit pas être pris en compte puisqu'il n'avait pas été élu au suffrage universel direct mais désigné par le Parlement.

Plus de 100'000 Burundais se sont réfugiés ces dernières semaines dans les pays voisins, notamment le Rwanda, la Tanzanie et la République démocratique du Congo (RDC).

Les pays des Grands Lacs, réunis en sommet extraordinaire lundi en Angola, ont de leur côté condamné la tentative de coup d'Etat contre le président burundais Pierre Nkurunziza et défendu sa «légitimité» par la voix du président José Eduardo dos Santos. Il a aussi appelé à l'organisation des élections législatives et présidentielles au Burundi malgré la crise actuelle.

Les pays des Grands Lacs ont aussi annoncé l'envoi d'une délégation au Burundi et appelé à une sortie de crise afin de permettre le retour des réfugiés qui ont fui dans les pays voisins.

Premières évacuations

Dimanche, les Etats-Unis ont aidé à évacuer du Burundi des citoyens américains, canadiens et d'autres ressortissants, a annoncé le département d'Etat. Les Etats-Unis ont reçu des demandes d'aide de la part de «plusieurs missions diplomatiques».

De son côté, Berne a fermé mercredi dernier à titre provisoire le Bureau de la Coopération Suisse et Agence consulaire de Bujumbura. «Les employés ont été priés de rester chez eux. Ils sont tous en sécurité», a fait savoir à l'ats le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Sur son site internet, le département déconseille tout voyage au Burundi qui ne serait pas urgent.