Grenade et coups de feu sur des policiers à Bujumbura
Sécurité

France 24, 20/07/2015

À quelques heures de la présidentielle au Burundi, tirs et explosions frappent la capitale

Au Burundi, une grenade a explosé dans la capitale quelques heures avant le début de l'élection présidentielle de mardi. Un scrutin sans enjeu qui s'annonce tout de même tendu.

Comme un symbole de l’odeur de souffre qui règne au Burundi à la veille d’une élection présidentielle très contestée, au moins trois explosions et des tirs parfois nourris ont retenti lundi 20 juillet, à Bujumbura.

Selon des témoins, des inconnus ont ouvert le feu sur des policiers qui ont répliqué dans le quartier de Ngagara, au nord du centre-ville, où des explosions ont également été entendues. Deux explosions et des tirs ont aussi retenti dans celui de Nyakabiga, au nord-est du centre-ville, et des tirs ont été entendus à Kanyosha, dans le sud de la capitale, selon des habitants.

Quelque 3,8 millions de Burundais éliront mardi 21 juillet leur président lors d'un scrutin dénoncé par l'opposition et la société civile, qui jugent contraire à la Constitution un troisième mandat du président Pierre Nkurunziza, dont la candidature a plongé le pays dans sa pire crise politique depuis 10 ans.

Ambiance délétère

Manifestations interdites et réprimées, parfois à balles réelles, médias privés réduits au silence, journalistes et opposants cachés ou en exil, déjà plus de 80 morts : le climat actuel rend impossible un scrutin crédible, estime la communauté internationale.

Mais malgré cette ambiance délétère, un isolement croissant et des menaces de nombreux bailleurs - dont l'Union européenne, principal partenaire du pays - de geler leur coopération, les autorités burundaises refusent de reporter à nouveau le scrutin, déjà repoussé à deux reprises, arguant d'un risque de vide institutionnel à l'expiration du mandat de Pierre Nkurunziza le 26 août.

Sa candidature a plongé depuis fin avril le Burundi dans une grave crise politique allant jusqu’à une tentative de coup d'État militaire déjouée à la mi-mai. Le gouvernement a mis fin à la mi-juin à un mois et demi de manifestations quasi-quotidiennes à Bujumbura par une brutale répression. Mais il a essuyé depuis une série d'attaques à la grenade et est confronté, depuis 10 jours, à des combats et escarmouches entre armée et rebelles au nord du pays, dans la zone frontalière avec le Rwanda.

Le mince espoir d'apaisement ouvert mercredi 15 juillet par la médiation du président ougandais Yoweri Museveni, mandaté par ses pairs de la Communauté est-africaine (EAC) et qui avait réussi à faire s'asseoir les deux camps autour d'une table, a volé en éclats dimanche : les discussions ont été de fait interrompues, en l'absence du camp présidentiel, au lendemain d'une session particulièrement houleuse.

Le gouvernement avait accusé samedi ses adversaires d'être "tous des putschistes" tandis que l'opposition et la société civile dénonçaient une tentative de gagner du temps pour ne pas aborder le sujet du report de la présidentielle.

Un scrutin sans enjeu

Après la très large victoire du parti du président sortant, le CNDD-FDD, aux législatives et communales du 29 juin, boycottées par l'opposition, la présidentielle est vidée de tout enjeu : la victoire de Pierre Nkurunziza ne fait aucun doute car il n'est opposé qu'à quatre candidats issues de formations réputées alliées au pouvoir.

Son principal opposant, Agathon Rwasa, n'a certes pas retiré officiellement sa candidature, mais dit n'avoir pas fait campagne et conteste à l'avance la légitimité du scrutin, demandant son report et déniant à Pierre Nkurunziza le droit de se représenter. Léonce Ngendakumana, président de la principale coalition d'opposition, a qualifié dimanche cette élection de "coup d'État constitutionnel".