Durcissement par la police du siège des quartiers contestataires à Bujumbura
Sécurité

PANA, 03 septembre 2015

Bujumbura, Burundi  - Des éléments de la police nationale maintenaient le siège de certains quartiers contestataires du pouvoir en place au Burundi, jeudi, pour la troisième journée consécutive encore marquée par des tirs nourris et des détonations de grenades nocturnes, ainsi que arrestations de suspects, a-t-on constaté sur place dans la capitale burundaise.

Le quartier le plus surveillé est pour le moment celui de Jabe, proche du centre-ville de Bujumbura où les entrées et les sorties pour n’importe quel motif professionnel ou social restaient interdites aux visiteurs et résidents qui doivent d’abord dénoncer les fauteurs de troubles s'ils veulent retrouver une vie normale, a avisé le Porte-parole adjoint de la police nationale, Pierre Nkurikiye.

C’est dans ce même vaste quartier résidentiel de Jabe qu’a été trouvé, sur la voie publique, un cadavre d’un individu présumé avoir participé aux attaques armées contre la police dans la nuit de mardi à mercredi, selon toujours le Porte-parole Nkurikiye.

Des tirs nourris, ainsi que des détonations de grenades ont également été entendus dans la nuit de mercredi à jeudi au niveau de plusieurs autres quartiers contestataires du sud et du nord de la capitale burundaise suite à des accrochages entre des éléments armés non encore clairement identifiés et les forces de l’ordre.

Au moins une personne a été tuée et trois policiers blessés dans ces tirs et explosions de grenades durant la même nuit de mercredi à jeudi.

Le premier vice-président de la république du Burundi, en charge des questions sécuritaires et politiques, Gaston Sindimwo a aussi donné de la voix, jeudi, en déclarant que les opérations policières visant à assécher les quartiers contestataires des armes détenues illégalement par des civils allaient continuer pour qu’endéans un mois, la sécurité soit revenue partout où elle est encore perturbée.

«Nous n’allons pas attendre les deux mois » que le chef de l’Etat avait dernièrement donné aux forces de l’ordre pour ramener la sécurité dans la capitale, a-t-il insisté, estimant que les citadins innocents avaient besoin de retrouver une vie normale après bientôt quatre mois de troubles à l’ordre public qui sont nés de l’officialisation de la candidature du président Pierre Nkurunziza pour un troisième mandat controversé dans les milieux de l’opposition et de la société civile à la tête du pays.

Le vice-président de la république a profité d’une audience qu’il venait d’accorder au représentant de l’Union africaine (UA), Ibrahim Fall pour revenir sur la préoccupante question sécuritaire de son pays qui appelle le concours de l’organisation continentale.

A ce propos, M. Hakiza a demandé à son interlocuteur de plaider auprès de l’UA pour qu’il y ait une assistance matérielle et technique plus accrue de nature à faciliter le désarmement rapide des populations civiles.

Pour le vice-président burundais, "l’UA peut, par exemple, apprêter ou aider à trouver des équipements techniques capables de détecter plus facilement à distance des armes cachées en lieu et place de la fouille manuelle à laquelle recourt actuellement la police».

L’UA dispose déjà depuis un mois sur place au Burundi de quelques unités d’experts militaires et d’observateurs des droits de l’homme.

L’envoi de ces différents experts répond à une recommandation du Sommet des chefs d’Etat de l’UA qui a eu lieu à la mi-juin dernier à Johannesburg, en Afrique du Sud, sur la crise au Burundi.

Leur présence sur terrain reste cependant discrète aux yeux de nombreux observateurs à Bujumbura pendant que la crise, elle, ne cesse de prendre des dimensions inquiétantes au niveau de la sécurité et du respect des droits de l’homme.

Le diplomate de l’UA, de son côté, a fait savoir que les experts militaires et ceux des droits humains en question travaillaient pour le moment en étroite collaboration avec ceux de la Commission nationale en charge du désarmement des civils et la Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH).

Dans ses prises de position passées ou récentes, l’UA compte cependant beaucoup plus sur les vertus du dialogue inter-burundais que sur tout autre moyen pour ramener la paix et normaliser la situation sociopolitique et économique avant qu’elle ne vire vers une nouvelle guerre civile de nature à contaminer le reste de la sous-région des Grands Lacs qui accueille autour de 200.000 réfugiés burundais.

La peur de l’UA et du reste de la communauté internationale est d’autant plus fondée que depuis le début du mois d’août dernier, des assassinats ciblés à caractère politique sont venues allongés la liste des victimes du mouvement de contestation du troisième mandat présidentiel qui avoisinaient déjà la centaine de tués.

Des arrestations massives s’opèrent également parmi les contestataires qui ne désarment pas et dont certains se plaignent de mauvais traitements dans les cachots.

Une sorte de guérilla urbaine est aussi en train de se développer en ville de Bujumbura où il se passe rarement une nuit sans jeu de cache-cache entre des groupes armés non encore connus et des éléments de la police nationale à coup de kalachnikovs et de grenades.