Le Burundi a besoin de juridictions électorales pour crédibiliser les scrutins
Politique

@rib News, 03/09/2015 - Source Xinhua

Les autorités burundaises doivent initier la mise en place des juridictions électorales afin de crédibiliser les scrutins de 2020 et au-delà, a plaidé Augustin Nkengurutse, expert en matière électorale.

"Au Burundi, nous manquons jusqu'ici cette culture. Par exemple, dans la Tanzanie voisine, un membre d'un parti politique lésé pour ne pas s'être retrouvé sur la liste électorale de sa formation politique alors qu'il en avait le droit, peut porter plainte auprès d'une juridiction électorale locale d'une circonscription donnée et avoir gain de cause", a expliqué Nkengurutse dans une interview accordée en marge d'un atelier pour relever les leçons apprises au cours du processus électoral de 2015.

Selon cet ancien haut cadre de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) lors des élections de 2005 et de 2010, cette lacune juridique sur fonds d'impunité peut avoir ouvert, dans le passé, à des abus et autres injustices électoraux sous forme de "favoritismes en plaçant sur les listes électorales, des parentés de famille ou des amis au détriment des personnes plus méritantes".

Au Burundi, a-t-il ajouté, si quelqu'un est écarté injustement d'une liste électorale d'un parti politique, il n'existe pas de tribunaux spécialisés en matière de contentieux électoral pour porter plainte.

Pour le juriste Nkengurutse, aujourd'hui, le contentieux électoral est le maillon le plus faible du système électoral burundais.

Le Burundi gagnerait à s'aligner à ces bonnes pratiques en vogue sous d'autres cieux en s'alignant par exemple sur le modèle tanzanien, en mettant en place "une police électorale et des juridictions électorales permanentes", a-t-il affirmé.

"Là où le bât blesse, c'est qu'au Burundi, on déplore que depuis le processus électoral de 2005, en passant par celui de 2010 et jusqu'à celui récent de 2015, beaucoup d'infractions électorales restent impunies", a souligné l'expert.

Cette situation prévaut au Burundi au moment où les juridictions "ordinaires" ne sont pas légalement autorisées à statuer sur des contentieux électoraux dans la mesure où ceux-ci exigent une certaine célérité au niveau de leur traitement, a-t-il signalé.

A ses yeux, le Burundi, à défaut de pouvoir mettre en place des juridictions spécialisés en matière électorale, pourrait se contenter de la création des "chambres spécialisées" au sein des juridictions existantes.

Mais en attendant leur mise en place et si les autorités le veulent ainsi, a-t-il ajouté, les tribunaux ordinaires pourraient statuer, à titre exceptionnel, sur des contentieux électoraux, pour autant qu'ils jouissent des prérogatives de prendre leurs décisions rapidement selon "la procédure de flagrance".

Selon l'expert Nkengurutse, l'inexistence de juridictions électorales au Burundi a des implications négatives sur toutes les facettes des processus électoraux au Burundi.

"En effet, pour participer dans un processus électoral avec un esprit apaisé, crédible, libre et transparent, il faut d'emblée, être rassuré que s'il y a quelque chose qui cloche, qu'on peut s'en remettre à une juridiction qui tranche rapidement", a-t-il expliqué.

Pour lui, la mise en place des juridictions électorales au Burundi, agissant dans un environnement d'un organe "indépendant" en charge de la régulation des élections, pourrait servir d'outils importants pour prévenir l'éclatement de conflits postélectoraux et garantir l'équité des processus électoraux à l'avenir.