Burundi : Le pouvoir à l'oeuvre pour empêcher l'isolement et redorer son image
Diplomatie

PANA, 28 septembre 2015

Offensive diplomatique à l'ONU contre l'isolement du Burundi sur la scène internationale

Bujumbura, Burundi - La délégation burundaise, conduite par le vice-président de la République, Joseph Butore (photo), accompagné du ministre des Affaires étrangères, Alain Nyamitwe, a profité de sa présence à la 70ème session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies en cours à New York, aux Etats-Unis d’Amérique, pour mener des contacts utiles en vue d'empêcher l'isolement et redorer l'image du Burundi, qui a été considérablement ternie, depuis le mois d’avril dernier, par une crise électorale sans précédent, sur la scène internationale, a-t-on appris, lundi, de source officielle à Bujumbura.

Les Nations-Unies étaient jusque récemment parmi les principales organisations internationales les plus critiques de la candidature du président, Pierre Nkurunziza, pour un troisième mandat à la tête de l’Etat, qui a été le principal détonateur d’un conflit électoral aujourd’hui encore ouverte entre le pouvoir et l’opposition et qui fait craindre la rechute du pays dans une nouvelle guerre civile semblable à celle de 1993 à 2006, qui était également née d’un conflit post-électoral mal résolu.

La diplomatie burundaise redoute un isolement sur la scène internationale et les données commencent à changer en sa faveur, à en croire à un communiqué de presse de la mission permanente du Burundi auprès des Nations-unies, publié, lundi, sur le portail officiel du gouvernement burundais.

Le communiqué fait savoir que le numéro un des Nations-unies, Ban Ki-moon a reçu et "félicité", vendredi dernier, le deuxième vice-président burundais pour sa nomination à ce poste "important».

Par le biais du même haut responsable burundais, M. Ki-moon a encore présenté ses «salutations fraternelles» au président Nkurunziza «au nom de tout le personnel de l’ONU et en son nom propre ».

Au cours de la même discussion de «20 minutes», le Secrétaire général a offert à la partie burundaise, le «plein appui» de l’organisation pour trouver une solution pacifique aux différents problèmes auxquels est confronté aujourd’hui encore le Burundi, précise le texte du communiqué.

M. Ban Ki-moon a, pour sa part, exprimé à son interlocuteur des préoccupations en rapport avec la violence politique au Burundi, la question des droits de l’Homme et de la liberté d’expression.

Le Secrétaire général des Nations-unies avait préalablement pris connaissance de la part de son interlocuteur de la situation politique réelle qui règne au Burundi après des élections qui se sont finalement «bien déroulées».

"Toutes les énergies du Burundi et des partenaires devraient aujourd’hui être concentrées sur l’avenir économique de notre pays", a souligné en substance le vice-président Butore.

Pour lui encore, "l’esprit d’ouverture et de flexibilité" du président Nkurunziza a été traduit dans les faits par la formation d’un "gouvernement d’union nationale respectueux de la Constitution du Burundi et de l’Accord d’Arusha", comme cela avait été suggéré par le Sommet des chefs d’Etat de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) du 31 mai 2015, à Dar Es-Salaam, en Tanzanie.

L’interlocuteur de Ban Ki-moon a encore précisé que le nouveau gouvernement du président Nkurunziza comprend 12 ministres issus du parti vainqueur, le Conseil national pour la défense de la démocratie/Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD, parti présidentiel), 5 autres (soit 25%) provenant d’une coalition dirigée par Agathon Rwasa, un ancien chef de file de l’opposition qui a accepté de coopérer avec le pouvoir, moyennant le poste de vice-président de la nouvelle Assemblée nationale du Burundi.

Le vice-président burundais a sollicité les Nations-unies pour aider au retour des milliers de réfugiés qui ont fui le pays d’origine, "à cause des rumeurs" qui ont entouré le processus électoral.

Par ailleurs, le "dialogue et la concertation" doivent rester parmi les «priorités des priorités" du nouveau gouvernement d’union nationale, « à l’exception de ceux qui sont impliqués dans la tentative de coup d’Etat et l’organisation du "mouvement insurrectionnel préélectoral" des mois derniers.

Le deuxième vice-président a encore balisé ce dialogue dont doivent s’approprier les Burundais, "sans interférence étrangère", ce que ne cautionne pas la principale coalition de l’opposition interne et en exil réunie au sein du "Conseil national pour la défense de l’Accord d’Arusha et la restauration de l’Etat de droit (CNARED)" qui ne reconnaît pas les résultats des élections passées pour n’y avoir pas participé.

Cette coalition revendique plutôt une médiation internationale neutre en bonne et due forme, ainsi que des soutiens diplomatiques qu’elle dit avoir déjà engrangés auprès des Etats-Unis d’Amérique, de la France, de la Belgique, des Pays-Bas, du Canada et sur le continent africain, à en croire Léonard Nyangoma, un leader historique de l’ancienne rébellion armée du CNDD-FDD et actuel président du CNARED.

Face à l’insécurité persistante dans le pays et que le pouvoir met sur le compte du CNARED, «le Burundi poursuivra son programme de désarmement en conciliant la remise volontaire des armes, la répression pour les récalcitrants et la prévention pour le long terme», a dit le vice-président burundais à Ban Ki-moon.

L’urgence de ramener la paix et la sécurité dans le pays par un dialogue inclusif a été encore mise en exergue, lundi, dans un communiqué du Haut commissariat des Nations-unies aux droits de l’Homme, qui s’alarme de l’augmentation du nombre de «meurtres, d’arrestations et de détentions» au Burundi depuis début septembre.

"Presque chaque jour, des corps sans vie sont retrouvés dans les rues de certains quartiers contestataires de Bujumbura", la capitale du pays.

"Dans de nombreux cas, les victimes semblent avoir été tuées par des balles tirées à bout portant".

"Les corps des victimes portent parfois des traces de torture et sont souvent retrouvés les mains liées au dos », indique le communiqué qui fustige encore des «meurtres inexpliqués et à l’origine d’une peur profonde au sein de la population, en particulier au sein des quartiers connus pour leur soutien à l’opposition".

Le Haut commissariat aux droits de l’Homme dit avoir enregistré 134 meurtres depuis avril dernier, ainsi que des centaines d’arrestations et de détentions arbitraires, dont 704 arrestations depuis début septembre 2015.

Le mois d’avril dernier correspond au début des manifestations de rues des "anti-troisième mandat" qui ont été durement réprimées par la Police aujourd’hui encore aux prises avec une résistance résiduelle aux allures d’une guérilla urbaine dans certains quartiers de Bujumbura.