Le Burundi annule des mandats d'arrêt contre des personnalités en exil
Justice

@rib News, 19/02/2016 – Source AFP

 La justice burundaise a annulé des mandats d'arrêts internationaux contre quinze personnalités dont plusieurs leaders de l'opposition en exil, selon un document officiel parvenu publié vendredi.

Cette décision pourrait permettre de relancer les pourparlers - actuellement au point mort - entre le régime du président Pierre Nkurunziza et son opposition et tenter de sortir le pays d'une crise politique qui dure depuis plus de neuf mois. [Photo : Pie Ntavyohanyuma et Gervais Rufyikiri ont parmi les bénéficiaires de cette mesure]

Parmi ces personnalités figurent le président du Cnared - une plate-forme qui regroupe les leaders de partis d'opposition en exil - Léonard Nyangoma, son porte-parole Pancrace Cimpaye, ainsi que deux anciens membres éminents du parti au pouvoir devenu des frondeurs, l'ancien président de l'Assemblée nationale Pie Ntavyohanyuma et l'ancien 2e vice-président, Gervais Rufyikiri.

"J'ai l'honneur de porter à votre connaissance que les mandats d'arrêt internationaux qui avaient été émis contre les personnes ci-après ont été annulés", a écrit le procureur général burundais, Valentin Bagorukunda, dans une correspondance adressée à la police judiciaire.

"Les raisons à la base de l'émission de ces mandats ne subsistent plus", a-t-il justifié sans plus de précisions, demandant à la police judiciaire de demander à Interpol "de les désactiver".

La quasi-totalité de ces responsables se trouvaient sur une liste de 34 personnalités politiques, de la société civile et des responsables des médias indépendants, accusés d'être les instigateurs de l'insurrection - terme qui désigne les manifestations contre le 3e mandat du président Pierre Nkurunziza - et de la tentative de putsch des 13 et 14 mai 2015 au Burundi.

Jusqu'ici, Bujumbura a refusé d'engager un dialogue inclusif avec son opposition, en invoquant notamment ces mandats d'arrêt, malgré les pressions de la communauté internationale.

Le document du procureur général, daté du 3 février, a fuité dans la presse à trois jours d'une visite du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon au Burundi. Une "délégation de haut niveau" de l'Union africaine est également attendue à Bujumbura plus tard dans la semaine.

- 'Gestes de bonne volonté' -

"Le pouvoir est en train de faire indéniablement des gestes de bonne volonté avant ces rendez-vous diplomatiques et politiques importants, mais c'est à dose homéopathique", a estimé sous couvert d'anonymat un diplomate occidental en poste à Bujumbura.

"Espérons que ces visites vont le pousser à faire plus", a-t-il ajouté.

Outre la levée des mandats d'arrêt, le diplomate a cité "l'autorisation accordée aujourd'hui (vendredi) à deux radios privées de réémettre de nouveau, le renforcement des observateurs des droits de l'homme de l'UA par l'adjonction d'une vingtaine d'hommes, l'acceptation d'une mission de trois experts mandatés par le Haut commissariat de l'ONU aux droits de l'homme sur les violences au Burundi".

Le Burundi est plongé dans une profonde crise politique depuis la candidature fin avril 2015 du président Nkurunziza à un troisième mandat, qu'il a obtenu en juillet. Plus de 400 personnes ont été tuées depuis le début de la crise, qui a poussé plus de 240.000 personnes à l'exil.

Lundi, l'Union européenne (UE) à menacer de suspendre son aide directe à Bujumbura devant la poursuite des violences dans le pays et l'absence de dialogue politique.

Avec une aide globale de quelque 430 millions d'euros pour la période 2015-2020, l'UE est le premier donateur du Burundi.

Une "suspension de l'aide a été proposée" mais cette décision sera prise en considération "dans les prochaines semaines", avait alors expliqué la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.