Deux radios autorisées à réémettre après 9 mois de suspension au Burundi
Société

PANA, 19 février 2016

 Bujumbura, Burundi - Le Conseil national de la communication (Cnc, organe étatique de régulation des médias) a autorisé, vendredi, la reprise immédiate des activités de deux radios qui ont été innocentées par la Justice du pays, faute de preuves suffisantes et accablantes de leur rôle présumé dans l’amplification de la crise politique de bientôt une année au Burundi.

Les "Repêchées" sont la radio privée indépendante réputée modérée, "Isanganiro" (Carrefour, en langue nationale, le Kirundi) et sa consœur, "Rema FM" (la réconfortante), connue plutôt pour sa proximité avec le Conseil national pour la défense de la démocratie/forces de défense de la démocratie (Cndd-Fdd, parti au pouvoir).

Les deux radios ont été toutefois soumises à un acte d’engagement écrit à travailler plus "professionnellement" dans l’avenir, et au service de a "consolidation de la paix" au Burundi.

Les "Recalées", pour leur dossiers judiciaires encore pendants, sont la "Radio publique africaine" (RPA), Radio sans frontières, "Bonesha FM" (l’éclaireur) et la "Radiotélévision Renaissance" dont les sièges offrent aujourd’hui le spectacle désolant de ruines anciennes calcinées, au milieu d’herbes envahissantes.

Différentes radios privées indépendantes avaient été détruites, la plupart par le feu, quand elles n’ont pas été empêchées d’émettre, dans la foulée de la tentative de putsch manqué du mois de mai dernier.

Les organisations des professionnelles des médias estiment, en outre, à plus de 80% des journalistes indépendants qui n’exercent plus au pays après avoir été obligés de partir à l’étranger par peur pour leur sécurité.

Le "petit" geste du Cnc va dans le bon sens voulu par la Communauté internationale et les défenseurs de la liberté de la presse et d’expression qui s’intéressent au Burundi, de l’avis général des analystes à Bujumbura.

Le geste intervient, en effet, à la veille d’importants rendez-vous diplomatiques de l’Union africaine (Ua) sur la crise persistante au Burundi et dont le moindre signe d’apaisement se faisait jusque-là rare.

Le secrétaire général des Nations unies arrive officiellement à Bujumbura, d’abord lundi prochain, pour tenter d’obtenir des protagonistes de la crise un dialogue sincère et inclusif.

Cela n’a jamais été le cas au cours de ces dix derniers mois marqués plutôt par une radicalisation des positions dans le différend électoral qui oppose le pouvoir et l’opposition.

Ensuite, une délégation de "très haut niveau" des chefs d’Etat et de gouvernement sud-africain, sénégalais, mauritanien, gabonais ainsi que du Premier ministre éthiopien est attendue à Bujumbura à partir du 25 février.

Les journalistes burundais en exil tentent de maintenir la forme professionnelle via des radios improvisées en ligne, dont les plus connues et suivies par les internautes sont "Inzamba" (l’avertisseur) et "Humura" (Soufflez, en langue nationale, le Kirundi).

Les réseaux sociaux sont encore l’un des moyens de communication qui ont explosé par ces temps de crise au Burundi pour filmer et compter les morts dans la rue, les disparus et les prisonniers d’une guerre civile larvée, pour certains.

Les élites intellectuelles, quant à elles, peuvent encore écouter, en langues étrangères de leur choix, plusieurs radios internationales pour suivre la vie du pays, comme RFI, BBC et VOA qui émettent en modulation de fréquence (FM) en direction du Burundi.

De nombreuses chaînes de télévision étrangères émettent également par satellite en direction du Burundi et y trouvent une assez grande audience chez les plus aisées et branchées du pays.

L’unique chaîne de radiotélévision nationale du Burundi (RTNB, publique), quant à elle, occupe le "petit peuple", le gros du temps en langues locales, par une information jugée "officielle".

L’équilibre et la neutralité de l’information distillée par la RTNB font douter nombre d’auditeurs et téléspectateurs qui avaient pris goût au pluralisme médiatique d’un temps aujourd’hui révolu.

Les mêmes auditeurs doutaient encore sérieusement, vendredi, de la façon "la plus professionnelle" à laquelle le Cnc a assujetti les deux radios qui vont devoir travailler sous étroite surveillance de l’organe de régulation et des pouvoirs publics devenus susceptibles par la force des choses.