Ban Ki-moon a terminé sa visite à Bujumbura sur une note de satisfaction
Diplomatie

PANA, 23 février 2016

● Ban Ki-moon satisfait des échanges «sincères et constructifs» avec le président burundais

 Bujumbura, Burundi - Le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon a terminé, mardi, une visite de 48 heures à Bujumbura sur une note de satisfaction à la suite des échanges «sincères et productifs» qu’il a eu avec le président burundais, Pierre Nkurunziza, essentiellement sur la façon de régler une tenace crise politique de bientôt une année dans ce pays des Grands Lacs africains.

Un optimiste qui tranche toutefois d’avec la frustration qu’avaient affiché les 15 ambassadeurs du Conseil de sécurité des Nations Unies lors de leur visite du mois de janvier dernier au Burundi. [Photo : Ban Ki-moona a quitté Bujumbura mardi en fin de matinée.]

Aucun compromis ne s’était dégagé avec les autorités burundaises sur la question d’un dialogue inclusif et celle d’une force militaire étrangère de stabilisation de la situation de crise au Burundi qui focalisent l’attention de la communauté internationale.

Cette fois, M. Ban Ki-Moon a affirmé avoir obtenu des garanties de la part de son interlocuteur d’un dialogue ouvert à tous les protagonistes de la crise et qui bénéficiera d’un «appui total» des Nations Unies.

La crise était partie, en avril dernier, du troisième mandat controversé de l’actuel chef de l’Etat burundais à la tête du pays et dont la remise en cause ne semble plus être la préoccupation majeure de la communauté internationale.

Les rares opposants encore présents dans le pays ont redit à M. Ki-Moon que, si dialogue il y avait un jour, il devra porter sur toutes les questions à l’origine de la crise, y compris le troisième mandat déjà consommé et dont la remise en cause reste la «ligne rouge» à ne pas franchir, pour le pouvoir burundais.

La lecture que l’opposition fait de la constitution du moment et l’accord d’août 2000, à Arusha, en Tanzanie, sur la paix et la réconciliation nationale est qu’aucun chef d’Etat en exercice ne doit aller au-delà de deux mandats à la tête du pays.

Au nombre des opposants qui se sont entretenus avec le Secrétaire général des Nations Unies figurent Charles Nditige, président de l’Unité pour le progrès national (UPRONA, ancien parti unique) et Léonce Ngendakumana, du Front pour la démocratie au Burundi (FRODEBU, principal parti d’opposition).

Les deux partis sont encore membres du «Conseil national pour la défense de l’accord d’Arusha et la restauration de l’Etat de droit » (CNARED, principale plate forme de l’opposition) qui revendique un gouvernement de transition chargé de préparer de nouvelles élections, sur une base plus consensuelle que l’année dernière.

Quelle que soit la source de la crise persistante dans le pays, le Secrétaire général des Nations Unies a toutefois mis les différents acteurs politiques burundais devant leurs responsabilités, en engageant un dialogue sincère et inclusif.

Un fois le dialogue inclusif engagé, les Nations Unies ne ménageront « aucun effort » pour le soutenir, a promis M. Ki-Moon.

De son côté, le président Nkurunziza s’est dit « très heureux » de recevoir le Secrétaire général des Nations Unies et de discuter ensemble de ce qu’il faut faire dans le contexte post-électoral du moment au Burundi.

Le président Nkurunziza s’est démarqué des préoccupations de ses opposants en demandant plutôt une collaboration d’avec les Nations Unies sur le terrorisme, le développement socio-économique et le dialogue déjà en cours à l’intérieur du pays.

Ceux qui perturbent la sécurité ne doivent pas prétendre au dialogue inter burundais, d’après toujours le président Nkurunziza qui a gracié 15 opposants politiques en exil à la veille de la visite de Ban Ki-Moon.

Les attaques répétitives non revendiquées à la grenade sur la voie publique, comme les marchés et les débits de boissons, sont généralement assimilées à des « actes terroristes » à l’actif d’opposants au régime burundais.

Une dizaine de grenades ont encore explosé à travers les quartiers contestataires de Bujumbura au cours de ces dernières 48 heures de la visite de Ban Ki-Moon, faisant au moins deux morts et un grand nombre de blessés.

Le Secrétaire général des Nations Unies a encore été sollicité par son interlocuteur pour ramener le Rwanda voisin à la raison.

Le Rwanda est accusé d’ingérence dans les affaires intérieures de son voisin du Sud, en entretenant une opposition civile et militaire aux fins de renverser le régime en place au Burundi, ce que ne cessent toutefois de s’innocenter les autorités rwandaises.

Du côté des analystes indépendants à Bujumbura, on estime que la visite du Secrétaire général des Nations Unies n’a réellement pas fait bouger les lignes de fractures actuelles entre le pouvoir et l’opposition au Burundi.

Un « statuquo » qui ne les incite pas non plus à un optimisme débordant à la veille encore d’une autre visite de cinq chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine (UA) pour essayer, à leur tour, de faire bouger les choses dans le bon sens au Burundi où au moins trois rébellions naissantes fourbissent déjà les armes pour en découdre avec le pouvoir.

Un « plan B » pourrait cependant être actionné par la communauté internationale en cas d’échec consommé du dialogue inclusif, comme le renforcement des sanctions de divers ordres ou encore le recours à la force pour empêcher que les protagonistes de la crise au Burundi ne provoquent une nouvelle guerre civile après celle toujours hallucinante de 1993 à 2006, prédisent les mêmes analystes.

Au niveau des sanctions, l’Union européenne (UE, principal bailleur) est déjà en plein processus de rupture des aides financières au Burundi, tandis que sur le plan de la sécurité, l’UA n’a toujours pas complètement renoncé à son projet d’une « Mission africaine de prévention et de protection au Burundi » (MAPROBU).

● Burundi : Ban Ki-moon salue la promesse de «dialogue inclusif» et la libération des détenus

Bujumbura, Burundi - Le Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a salué la décision mardi du Président Pierre Nkurunziza du Burundi de retirer certaines interdictions de médias, d'annuler les mandats d'arrêt et de libérer des détenus comme des gestes de bonne volonté pour tenter de mettre fin à des mois de violence dans le pays déchiré par la crise.

Lors d’une conférence de presse à Bujumbura, M. Ban a déclaré que le Président Nkurunziza lui a déclaré mardi matin, parmi d’autres mesures, qu’il libérera une liste de 1200 détenus.

« Cela est une étape encourageante », a déclaré le chef de l’Onu, tout en soulignant qu’il s’attendra à ce que des mesures supplémentaires sont prises.

M. Ban a déclaré qu’à son invitation lundi soir, les représentants des acteurs politiques, tant du parti au pouvoir et que du parti de l’opposition, se sont assis ensemble pour discuter de l’avenir du Burundi et ont promis d’engager un dialogue inclusif.

« Rien ne les empêche de continuer dans cette voie», a souligné le secrétaire général, ajoutant que le Président Nkurunziza a également confirmé qu’il s’engagera dans un dialogue inclusif.

Notant qu’il était la dernière fois au Burundi en juin 2010, quelques semaines seulement avant les élections générales, M. Ban a déclaré qu’à l’époque, il a parlé des dividendes de la paix de l’Accord de paix et de réconciliation d’Arusha et de l’Accord de cessez-le-feu global, qui a mis le pays sur la voie de la reprise économique et de la réconciliation nationale.

« L’effort qui a mis fin à la guerre civile est articulé sur la volonté des anciens ennemis de champ de bataille de s’asseoir à la même table et de devenir des partenaires dans l’avenir commun du Burundi », a déclaré le chef de l’Onu.

M. Ban a également souligné qu’il est nécessaire de passer d’une focalisation sur la réponse aux crises à une culture de l’action de première heure – ce qu’il a appelé une « diplomatie préventive ».

« Voilà l’une des principales raisons pour lesquelles je suis au Burundi aujourd’hui, et c’est l’un des principaux appels à l’action quand je convoque les dirigeants du monde au sommet humanitaire mondial à Istanbul en mai 2016», a-t-il déclaré.

M. Ban a ajouté que son conseiller spécial sur le Yémen, Jamal Benomar, a déployé son équipe au Burundi et travaille avec le gouvernement pour soutenir un «dialogue politique crédible et inclusif » et conseiller les autorités sur le traitement des problèmes de sécurité.

« Je fais pleinement confiance à M. Benomar et je souhaite que le Gouvernement du Burundi travaillera en étroite collaboration avec lui », a déclaré M. Ban.

« Les dirigeants politiques burundais doivent être prêts à faire preuve de courage et de confiance qui feront la possibilité d’un processus politique crédible et veiller à ce que les populations de cette belle nation puissent à nouveau vivre en paix et jouir des droits humains», a conclu le chef de l’Onu.

Le Burundi a été jeté dans la crise en avril 2015, lorsque le Président Nkurunziza a décidé de briguer un troisième mandat controversé qu’il a remporté en juillet.

A ce jour, il a été rapporté que plus de 400 personnes ont été tuées, plus de 240 mille ont fui le pays, et des milliers d’autres ont été arrêtés et éventuellement soumis à des violations des droits de l’homme.