Burundi : énième déception après énième mission de médiation internationale
Diplomatie

PANA, 28 février 2016

Le ballet diplomatique sans précédent laisse un goût d’inachevé au Burundi (Analyse)

Bujumbura, Burundi - La semaine du 22 au 27 février 2016 a donné lieu à un ballet diplomatique sans précédent, à l’initiative des Nations unies et de l’Union africaine (Ua), sans toutefois laisser entrevoir une fin proche des hostilités entre les principaux protagonistes burundais d'une crise politique dont l'enlisement, depuis bientôt une année, fait craindre une nouvelle guerre civile, après celle de 1993 à 2006 et ses milliers de morts et d'exilés forcés.

1. Un dialogue, qui inclut l’opposition « pacifique »

Du 22 au 23 février, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, a effectué sa première visite depuis l’éclatement de la crise centrée sur le refus d’un troisième mandat présidentiel jugé "de trop" dans les milieux de l’opposition et des organisations de la société civile.

Un dialogue, qui inclut l’opposition "pacifique", lui a été promis par le président burundais, Pierre Nkurunziza, ainsi que l’élargissement d’autour de 2.000 détenus pour des besoins de paix et de réconciliation nationale.

Du 24 au 27 février encore, un panel de cinq chefs d’Etat et de gouvernement africains a pris le relai au chevet du Burundi. La délégation de haut niveau était constituée par les Présidents Jacob Zuma d’Afrique du sud, Mohamed Ould Abel Aziz de la Mauritanie, Macky Sall du Sénégal, Ali Bongo Ondimba du Gabon ainsi que par le Premier ministre d’Ethiopie, Haile Mariam Desalegn.

2. Jacob Zuma joue les prolongations

Le chef de l’Etat sud-africain, Jacob Zuma, est resté une journée de plus à Bujumbura (jusqu’à samedi) et son homologue gabonais est reparti dans la soirée du même jour de son arrivée à Bujumbura, sans que l’on n’en sache les raisons exactes.

C’est encore en l’absence de ses co-équipiers que le président sud-africain, en même temps chef de la délégation, a sorti, samedi, un communiqué final annonçant que l’Ua allait déployer 100 observateurs des droits de l’Homme et autant d’experts militaires chargés de suivre de près l’évolution de la situation au Burundi.

Deux mois plus tôt, l’Ua prévoyait d’envoyer au moins 5.000 hommes d’une "Mission africaine de prévention et de protection au Burundi" (Maprobu), avant que pouvoir burundais ne s’y oppose farouchement, parce que, selon Bujumbura, ce projet est de nature à violer la souveraineté nationale et en l’absence de parties belligérantes connues dans le pays.

3. La médiation du président ougandais Yoweri Museveni reconduite

Le même communiqué final reconduit la médiation sous-régionale du président ougandais, Yoweri Museveni, pour organiser un dialogue inclusif, "le plus tôt possible", auquel participeront "tous les acteurs importants" de la crise. Le communiqué appelle encore la Communauté internationale à  "reprendre son aide au Burundi, comme le demande le peuple burundais".

L’Union européenne (Ue, principal bailleurs de fonds du Burundi) ainsi que les Etats-unis d’Amérique ont été les premiers à geler leurs aides financières destinées au développement socio-économique national, tant que durera la situation de crise politique et des droits humains.

Aussitôt les différentes délégations onusienne et africaine reparties, la guerre de communiqués a repris entre les acteurs politiques du pays.

Celui du Conseil national pour la défense de l’accord d’août 2000, à Arusha, en Tanzanie, sur la paix et la réconciliation nationale et pour la restauration de l’Etat de droit (Cnared, principale plate-forme de l’opposition en exil) ne croit pas en la volonté du pouvoir burundais d’aller dans le sens d’un dialogue réellement inclusif et présage plutôt de sa mauvaise intention de le torpiller.

"Le refus d’une solution négociée ainsi que le rejet de la Mission africaine pour la Prévention et la Protection au Burundi (Maprobu) imposent au Cnared, en particulier, et à toutes les forces citoyennes, en général, de conjuguer leurs efforts pour déjouer les stratégies du pouvoir portées par une volonté de destruction de la paix, de la sécurité et de la concorde nationale, non seulement au Burundi, mais aussi dans l’ensemble de la Région des Grands Lacs", dit le texte du communiqué.