Benjamin Mkapa appelé à la rescousse dans la médiation qui s’enlise au Burundi
Diplomatie

PANA, 03 mars 2016

Un ancien président tanzanien désigné pour booster la médiation dans la crise burundaise

 Bujumbura, Burundi - L’ancien président tanzanien, Benjamin Mkapa (photo, à g), a été désigné par le 17ème sommet extraordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté de l’Afrique de Est/East african community (Cae/Eac) pour épauler le président ougandais, Yoweri Museveni (photo, à d), dont la médiation ne faisait que s’enliser depuis bientôt une année de grave crise de légitimité politique au Burundi, apprend-on du communiqué final de la rencontre de mercredi à Arusha, en Tanzanie.

Benjamin William Mkapa, né en 1938, a été le président de la République unie de Tanzanie, voisine du Burundi, de 1995 à 2005.

C’est sous son mandat à la tête de la Tanzanie qu’a été négocié, puis signé l’accord inter burundais d’août 2000, à Arusha, sur la paix et la réconciliation nationale ayant mis fin à une guerre civile lourde de plus de 300.000 tués.

Les anciens présidents sud-africain, Nelson Mandela, et tanzanien, Mwalimu Julius Nyerere, avaient pesé de tous leurs poids et prestiges pour arracher l’Accord d’Arusha aux acteurs politiques burundais d’alors.

Le gros du million de réfugiés burundais de cette même guerre a échoué sur le sol de la Tanzanie qui héberge à nouveau plus de 120.000 réfugiés de la nouvelle crise au Burundi.

Un crash militaire annoncé entre le Rwanda et l’Ouganda voisins a été encore évité de justesse, en 2000, grâce aux bons offices de l’homme d’Etat tanzanien.

La nouvelle crise politique au Burundi était partie, fin avril dernier, d’un conflit électoral centré sur un troisième mandat du Président Nkurunziza à la tête du pays, jugé contraire à la constitution et l’Accord d’Arusha, dans les milieux de l’opposition, des organisations de la société civile et jusque dans le camp du pouvoir.

Les Nations unies estiment à au moins 400 tués et autour de 250.000 autres réfugiés burundais depuis le début de la crise.

Un premier round des pourparlers inter burundais de paix devait avoir lieu le 5 janvier dernier, à nouveau à Arusha, avant d’échouer sur les pré-conditions du pouvoir burundais de s’accorder d’abord avec la médiation sur la liste des participants.

Le pouvoir campe toujours sur sa position de ne pas s’asseoir à la même table des négociations avec l’opposition « radicale », accusée d’avoir soulevé la population jusque dans la rue contre le troisième mandat controversé de l’actuel chef de l’Etat burundais, Pierre Nkurunziza, et de s’être encore rendue complice de la tentative de putsch manqué de mai dernier.

Au-delà des initiatives sous-régionales, on assiste aussi à celles encore plus actives et résolues de l’Union africaine (Ua) et des Nations unies.

L’Ua a dépêché récemment encore une mission de très haut niveau des chefs d’Etat et de gouvernement sud-africain, sénégalais, mauritanien, gabonais et éthiopien pour tenter de convaincre les protagonistes de la crise au Burundi à passer par un dialogue inclusif pour mettre fin à leur différend qui fait craindre, à la longue, une contagion à toute la région fragile des Grands Lacs.

Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, avait précédé de peu à Bujumbura, la mission africaine de haut niveau.

Les deux initiatives ont débouché sur l’engagement de principe du pouvoir burundais à négocier avec l’opposition « pacifique ».

Cet engagement de principe sème néanmoins le doute dans les esprits des analystes, convaincus que le prix à payer pour ramener une paix durable et sincère dans le pays passe par l’acceptation, à la même table, de tous ceux qui ont des revendications politiques à faire valoir.

L’Ua ne compte pas s’en arrêter là et, dans le cadre du suivi de sa mission à Bujumbura, elle va encore rencontrer les parties prenantes de la crise burundaise qui sont hors du pays pour les inviter à engager un dialogue, « sans pré-conditions, et dans le strict respect de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation».

En août 2015, de nombreux acteurs politiques en exil à l’étranger se sont ralliés à Addis-Abeba, la capitale éthiopienne, pour mettre sur pied un « Conseil national pour la défense de l’accord d’Arusha et la restauration d’un Etat de droit » (Cnared, principale plate-forme de l’opposition intérieure et extérieure).

Leur principale revendication porte toujours sur un gouvernement transitoire négocié, chargé de préparer de nouvelles élections, sur des bases plus consensuelles que l’année dernière.

Une revendication jugée « anachronique » et « irrecevable » à aucun prix par le pouvoir burundais qui ne trouve pas à redire sur la « transparence et l’inclusion » qui ont caractérisé les élections générales de 2015.