Mobilisation sans précédent des femmes à la veille des élections au Burundi
Société

PANA, 11/01/2010

Bujumbura, Burundi - Des organisations féminines se tiennent déjà prêtes avec une "stratégie nationale" pour une meilleure participation des Burundaises aux secondes élections générales post-conflit qui débuteront, dès le mois de mai prochain, par les municipales, apprend-on des activistes des droits de la femme à Bujumbura.

Le document de la stratégie a été élaboré par la "synergie des partenaires pour la promotion des droits de la femme" (SPPDF, une ONG féministe locale), avec comme principale ambition d'augmenter le nombre de femmes aux "électrices et candidates" à tous les niveaux.

Les Burundaises n'en sont toutefois pas à leur premier coup d'essai et le document rappelle, à ce propos, qu'un plaidoyer "musclé", mené au cours des négociations inter-burundaises de paix de 2000, à Arusha, en Tanzanie, avait permis d'arracher aux hommes un quota minimum de 30% de représentation aux gouvernement et parlement.

Ainsi, au lendemain des premières élections post-conflit de 2005, il y avait une femme vice-présidente de la République (Mme Alice Nzomukunda), une présidente de l'Assemblée nationale (Mme Immaculée Nahayo), 35% de femmes au gGuvernement, 31% à l'Assemblée nationale, 35% au Sénat, 13% au niveau de l'administration communale, 21% au niveau des conseillers communaux et 14% au niveau des élus collinaires, se souvient-on à la SPPDF.

Malgré l'avancée en matière de participation politique de la femme, le taux des élues reste faible aussi bien à la base qu'au niveau du Parlement où, sur 37 femmes députées, 13 ont été cooptées, et au niveau du Sénat, où sur 17 sénatrices, 9 ont été également cooptées, relève-t-elle.

Ce système de cooptation n'est pas du goût de la synergie qui trouve qu'il doit perdre de sa raison d'être et le meilleur moyen d'y arriver est de parvenir, "par tous les moyens possibles", à ce que le pourcentage des femmes élues soit supérieur à 30% à tous les niveaux lors des consultations populaires des mois prochains.

Par ailleurs, le risque de recul reste grand et s'est déjà manifesté aux cours des différents changements qui ont fait qu'il n'y a plus une seule femme dans les cinq plus hautes fonctions de la République (présidence, Assemblée nationale, Sénat) alors qu'au départ il y avait 3 hommes et 2 femmes, déplore- t-on encore du côté de la SPPDF.

En somme, la femme a été comme une proie facile dans les luttes politiques pour des postes stratégiques, d'où l'idée d'un travail "énorme" de sensibilisation et de plaidoyer à faire dans le sens de susciter, d'une part, l'engagement des partis politiques à accorder suffisamment de places aux femmes dans leurs structures et surtout les mettre dans les positions utiles sur les listes électorales.

Le document de la SPPDF revient à la fin sur les causes profondes de la discrimination des femmes dans la vie politique nationale et met en exergue celle en rapport avec la culture qui fait que, depuis longtemps, la politique a été considérée comme une « fonction masculine ».

D'autres causes à l'origine de la faible participation de cette catégorie sociale, qui représente pourtant plus de 51% de la population burundaise, sont les textes électoraux qui ne favorisent pas suffisamment, et de façon explicite, la représentation des femmes, le faible accès des femmes à l'information ou encore le faible engagement des partis politiques à tenir en compte les priorités des femmes dans leurs programmes.

A titre illustratif, dans le marigot politique national de 43 partis nage une seule femme à la tête de l'Alliance démocratique pour le renouveau(ADR).

Mme Alice Nzomukunda a été, dans un passé récent, la deuxième vice-présidente de la République en charge des questions économiques et sociales avant de démissionner de manière fracassante, officiellement pour se désolidariser de la mauvaise gestion des affaires de l'Etat, disait-elle en 2006, à la remise du tablier.

Dans ses nouveaux habits d'opposante politique avisée, Mme Nzomukunda promet à qui veut la croire une parité parfaite de 50% entre les hommes et les femmes et au moins 30% de postes de responsabilité à tous les niveaux aux jeunes si son parti venait à prendre le pouvoir par les urnes dans quelques mois.

Un calendrier détaillé de la commission électorale nationale indépendante (CENI) prévoit la présidentielle au 28 juin, le choix des députés le 23 juillet, celui des sénateurs le 28 du même mois et les élections locales début septembre 2010.