Huit députés "absentéistes" déchus de leurs mandats au Burundi
Politique

PANA, 29 mars 2016

 Bujumbura, Burundi - La Cour constitutionnelle s’est prononcée en faveur de la déchéance des mandats et du remplacement automatique de huit députés de l’opposition qui totalisaient 29 absences "injustifiées" depuis l’élection controversée de la nouvelle Assemblée nationale, en août 2015, a annoncé, mardi, la Chambre basse du Parlement burundais.

Parmi les députés déchus figurent des vétérans de la politique nationale, comme les anciens vice-présidents de la République et hommes d’affaires Yves Sahinguvu et Bernard Busokoza, tous deux issus de l’unité pour le progrès national (Uprona, ex-parti unique).

Le règlement intérieur de l’Assemblée nationale prévoit qu’en cas d’absences injustifiées à plus d’un quart des séances d’une session ordinaire, le bureau instruit et clôture le dossier qu’il transmet ensuite pour compétence à la cour constitutionnelle.

Le remplacement d’un député défaillant intervient d’office dès le prononcé de l’arrêt de la cour constitutionnelle constatant la déchéance.

Dans le cas d’espèce, les députés déchus faisaient partie de la coalition « Espoir du Burundi » qui s’était retrouvée avec 30 élus, malgré son appel au boycott des législatives de l’année dernière pour protester contre un scrutin organisé « sans le consensus suffisant » de toutes les parties prenantes.

La coalition était principalement composée d’une aile majoritaire de l’Uprona dirigée par Charles Nditije et des forces nationales de libération (Fnl) de l’ancien chef rebelle Agathon Rwasa.

Des divisions sont apparues entre les deux blocs d’opposants sur la suite à réserver aux députés élus par des militants et sympathisants qui avaient passé outre la consigne de boycott.

Le camp de Charles Nditije a opté pour le "jusqu’au-boutisme" et les huit députés qui lui sont restés fidèles n’ont jamais mis les pieds dans l’hémicycle de Kigobe, le siège central de l’Assemblée nationale du Burundi.

Par contre, les 22 députés du camp de M. Rwasa n’ont pas boudé leur plaisir et se sont empressés de siéger, officiellement pour répondre à la "volonté du peuple" électeur.

La traversée du désert pour le leader historique des Fnl, resté longtemps dans le maquis, puis dans l’opposition politique, Agathon Rwasa, a pris fin sur son élection au poste de premier vice-président de la nouvelle Assemblée nationale pour un mandat de cinq ans.

L’article 138 du code électoral en vigueur dans le pays prévoit qu’en cas de désistement d’un parti ou d’une liste de candidats indépendants après les élections, les sièges sont répartis aux partis et aux listes de candidats indépendants siégeant au prorata des suffrages obtenus.

Le conseil national pour la défense de la démocratie/forces de défense de la démocratie (Cndd-Fdd, parti au pouvoir) reste largement majoritaire au sein de l’Assemblée nationale avec 81 députés sur les 111 députés de l’Assemblée nationale.

Le sénat est également aux couleurs du Cndd-Fdd, avec plus de 30 des 43 sénateurs de la chambre haute du parlement burundais.

L’ancienne principale rébellion armée du pays dispose encore d’une majorité plus que confortable de 15 des 20 ministres du gouvernement issu des élections générales de 2015.

L’actuel président de la République, Pierre Nkurunziza, avait été également réélu, en juillet dernier, pour le compte du Cndd-Fdd.

L’officialisation de sa candidature pour un troisième quinquennat, en avril 2015, avait déclenché des manifestations de rue à l’initiative de l’opposition, des organisations de la société civile et des frondeurs au sein du parti présidentiel.

Une crise politique s’en est suivie et perdure aujourd’hui encore dans le pays, avec son cortège de morts et de réfugiés.

Un conseil national pour la défense de l’accord d’août 2000, à Arusha, en Tanzanie, sur la paix et la réconciliation nationale et la restauration d’un Etat de droit (Cnared, principale plate- forme de l’opposition), est né de la crise et maintient la pression en vue des négociations avec le pouvoir.

L’objectif avoué étant d’obtenir un gouvernement de transition qui préparerait de nouvelles élections plus consensuelles, en dépit de l’hostilité maintes fois affichée par le pouvoir à une telle éventualité contraire à la volonté du peuple "souverain" qui s’est exprimé l’année dernière.