La médiation tanzanienne attaque le "mal burundais" à la racine
Politique

PANA, 23 mai 2016

Bujumbura, Burundi - Les différentes parties prenantes à la crise burundaise continuaient à se relayer, lundi, pour la troisième journée consécutive, auprès du médiateur et ancien président de la Tanzanie, Benjamin William M’Kapa, pour répondre, tour à tour, à la question première de la réelle "nature du conflit burundais" qui a fait que leur pays en arrive à nouveau au bord d’une guerre civile, selon des sources proches des consultations préliminaires dans la ville tanzanienne d’Arusha.

Les délégués présents à Arusha sont ceux du pouvoir burundais, de l’opposition, les représentants des confessions religieuses, ceux des organisations de la société civile, des jeunes et des femmes qui ont jusqu’à ce mardi pour avoir fait le tour complet de la cruciale question avant de quitter momentanément Arusha.

"Ce qui doit être fait pour limiter les dégâts et remédier durablement à la situation de crise récurrente" au Burundi, est la question corollaire à traiter, cette fois, à domicile, pour rendre les copies au prochain round des discussions à préciser ultérieurement, a rapporté la radio burundaise indépendante, "Isanganiro", citant son envoyé spécial sur place.

Sous la médiation de Julius Nyerere, un autre ancien président tanzanien et Père de l’indépendance nationale, les protagonistes de la précédente guerre civile de 1993 à 2000 avaient été soumis, d’entrée de jeu, à la même question de la nature du conflit burundais qui s’est avérée être "avant tout d’essence politique, avec une dimension ethnique non négligeable", s’étaient-ils accordés.

Le vieux sage tanzanien est décédé au milieu des laborieux pourparlers inter burundais de paix, laissant la place vacante à l’ancien président sud-africain et icône mondiale de la lutte anti-apartheid, Nelson Mandela, à qui les Burundais doivent la conclusion de l’accord global de paix et la réconciliation qui a mis fin à plus d’une décennie de guerre civile.

Les négociateurs de deux ans (1998-2000) avaient reconnu des luttes intestines pour accéder ou se maintenir au pouvoir, en tirant sur la sensible corde ethnique depuis l’indépendance nationale, en 1962, à ce jour au Burundi.

Depuis fin avril 2015, l’opposition et la société civile se sont rebellées dans la rue contre le troisième quinquennat de l’actuel chef de l’Etat burundais, Pierre Nkurunziza, en l’accusant d’avoir outrepassé la limite de seulement deux mandats à la tête du pays, tels que prévus par l’Accord d’Arusha qui leur est cher.

L’équilibre socio-politique a depuis lâché et les efforts en cours de la Communauté internationale au chevet du Burundi visent à ramener les protagonistes de la nouvelle crise dans l’Accord d’Arusha fondé sur des quotas ethniques de 60% des responsabilités étatiques pour les Hutu, majoritaires, et 40% pour la minorité Tutsi, quel que soit le vainqueur en cas d’élections.

C’est tout le contraire de la Constitution, émanant pourtant de l’Accord d’Arusha, qui met plutôt en avant le suffrage universel direct comme mode d’accès au pouvoir.

Les deux textes sont entrés en conflit quand il s’agissait de trancher sur la validité du troisième mandat présidentiel, selon le bord politique des uns et des autres.

La Cour constitutionnelle s’en était tenue à la seule loi fondamentale du pays pour valider la candidature du chef de l’Etat sortant à un troisième quinquennat d’affilée depuis 2005.