L’ONU saura-t-elle mettre fin à l’impunité « endémique » au Burundi ?
Droits de l'Homme

Le Pays, 21 septembre 2016

Nouvelles révélations sur la situation au Burundi :

Quelle suite donnera-t-on à ce rapport ?

On ne peut cacher le soleil avec son doigt. Cet adage, le pouvoir de Pierre Nkurunziza au Burundi, l’apprend parfaitement à ses dépens aujourd’hui. Malgré ses efforts pour cacher les horreurs commises de son régime à l’encontre du peuple burundais et les menaces les plus sordides contre tous ceux qui sont susceptibles d’apporter la lumière sur sa barbarie, le boucher de Bujumbura  a été épinglé. Une fois de plus, doit-on dire.

En effet, selon le dernier rapport d’experts de l’ONU sur la crise burundaise, de nombreux crimes ont été commis dans le pays, essentiellement « par le gouvernement et des personnes dont l’action peut être attribuée au gouvernement ». Exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées, tortures et autres traitements cruels et inhumains, voilà tout craché le portrait hideux de Nkurunziza, lequel rappelle l’ère totalitaire nazie. Pour preuve, depuis le début de la crise, le pouvoir burundais ne compte pas moins de 564 exécutions extrajudiciaires.

Ça, c’est ce que, pour le moment, l’on sait. Et l’on ne peut que s’en indigner. Tout comme on peut s’indigner des tergiversations et du silence, plus que complice et coupable, de ceux  qui ont le pouvoir de mettre fin au drame en cours, en l’occurrence la Communauté internationale. En fait, l’urgence n’est plus de condamner, de rappeler à l’ordre, ni de justifier quoi que ce soit, mais plutôt de prendre des dispositions fermes pour mettre un terme à la boucherie du pouvoir en place, en sanctionnant les responsables de ces actes barbares. Il ne faut pas continuer à regarder la situation burundaise se dégrader davantage jusqu’à ce que l’irréparable, déjà consommé, atteigne le plus haut degré d’inhumanité.

Pour une fois, la conscience internationale ne peut pas nier qu’elle dispose d’informations suffisantes pour agir au Burundi. Après avoir maintes fois renvoyé dos à dos pouvoir et opposition,  la Communauté internationale, à travers l’ONU, semble enfin avoir vu plus clair : les graves violations des droits de l’homme portent beaucoup plus la signature d’agents de l’Etat et de ceux qui sont liés à eux.

Maintenant que l’on sait à qui imputer les plus grandes exactions commises au Burundi, on attend de voir quelle suite sera donnée à ce rapport qui n’est pas le premier du genre à avoir indexé le régime burundais, sans que personne ne daigne lever le petit doigt. Peut-on s’attendre à ce qu’une suite diligente soit donnée à ces nouvelles révélations? En tout cas, vivement une réaction forte !

Il n’y a plus de raison que le Burundi continue de siéger au Conseil des droits de l’Homme de l’ONU

Car, au regard des faits de crimes, on ne peut que souscrire à l’idée des experts onusiens sur l’urgence à mettre fin à l’impunité « endémique ». Cela passe nécessairement par la traduction des auteurs des « crimes contre l’humanité »devant les juridictions appropriées. De gré ou de force, la paix doit être imposée au Burundi en soumettant les forces répressives du régime de Nkurunziza.

Dans ce sens, l’hypothèse de l’utilisation du chapitre 7 de la Charte de l’ONU  dans ce pays, est une voie à ne pas négliger quand on a en mémoire le précédent dramatique du Rwanda, en avril 1994. Dans cette disposition, il est indiqué que le Conseil de sécurité peut décider d'entreprendre « au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales. Cette action peut comprendre des démonstrations, des mesures de blocus et d'autres opérations exécutées par des forces aériennes, navales ou terrestres de membres des Nations unies. »

Et dans ce cas-là, « tous les membres des Nations unies » sont invités à mettre à la disposition du Conseil de sécurité, « les forces armées, l'assistance et les facilités, y compris le droit de passage, nécessaires au maintien de la paix et de la sécurité internationales ». Dans tous les cas, personne ne devrait dire après, qu’il n’a pas été prévenu de ce que fera encore le satrape de Bujumbura. En attendant, il n’y a plus de raison que le Burundi continue de siéger au Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, au risque que les sbires du régime ne souillent cette structure de leurs taches sanguinaires.

Michel NANA