Burundi : mise en garde contre la "mauvaise" utilisation des pesticides
Santé

@rib News, 14/10/2016 – Source Xinhua

La "mauvaise" utilisation des pesticides constitue un danger pouvant entraîner des "problèmes sanitaires couronnés de décès" au Burundi, a mis en garde vendredi soir à Bujumbura Noël Nkurunziza, président de l'Association Burundaise des Consommateurs (ABUCO, organisation burundaise de la société civile).

M. Nkurunziza, qui s'entretenait avec Xinhua en marge d'une cérémonie de lancement d'une campagne de sensibilisation sur le danger que représente la mauvaise utilisation du PAN (Pesticide Action Network), un des principaux pesticides dangereux figurant sur la liste des pesticides consommés par la population burundaise.

"L'utilisation généralisée des pesticides entraine des problèmes de santé et des décès souvent en raison d'une exposition sur le lieu de travail ou d'une intoxication accidentelle ou intentionnelle", a-t-il averti.

Citant une étude commanditée par l'ABUCO, M. Nkurunziza a laissé entendre que des pesticides se retrouvant sur le PAN, à l'instar du bromure de méthyle, sont importés au Burundi et enregistrés dans les importations par les services de l' Office Burundais des recettes (OBR).

De même, a-t-il déploré, les composés du mercure, du mirex et de l'endrine figurent sur le PAN ; mais ne sont pas interdits d'importation au Burundi.

M. Jean Niyongabo, expert sur la problématique de gestion des pesticides au Burundi, a révélé que ses investigations ont permis de se rendre compte que certains pesticides interdits d'importation par le comité d'homologation des pesticides au Burundi, restent en revanche toujours accessibles au marché burundais.

Il a cité notamment les pesticides Durban, Endosulfan, Benomyl et Thuram.

L'expert Niyongabo a dénoncé la poursuite de la "vente en cachette" et l'utilisation du pesticide DDT, malgré l'interdiction d'utilisation au Burundi qui le frappe depuis quelques années.

Pour lui, même si les fonctionnaires du département de protection des végétaux relevant du ministère burundais de l'Agriculture justifient la présence du DDT sur le marché local par le fait que certaines sociétés agricoles en disposeraient encore dans leurs stocks avant que ce pesticide ne soit déclaré dangereux pour la santé humaine, force est de constater qu'actuellement, "elles ne savent pas comment se débarrasser de ces stocks de poison qu'elles ont enfermé dans leurs hangars".

Les sociétés en question, a-t-il illustré, sont la Compagnie de Gérance Cotonnière (COGERCO), l'Office du Thé du Burundi (OTB) et l'Office des Cafés du Burundi (OCIBU).

Les autorités burundaises, a-t-il plaidé, devraient "étudier les voies et moyens d'en finir avec ces stocks encombrants et dangereux qu'on ne peut ni brûler, ni enfuir dans le sol pour des raisons de contamination".

Les pesticides, même pour certains d'entre eux qui sont agrées, doivent être utilisés conformément aux normes environnementales, a-t-il recommandé en soulignant que c'est pour éviter l'acidification du sol, la destruction de la faune et de la flore ainsi que la pollution de l'air).

Par exemple, a-t-il illustré, le pesticide Ridomil, malgré son agrément, est "souvent mal utilisé par des agriculteurs qui le pulvérisent sur la tomate prête à être vendu" ; une pratique à décourager pour les consommateurs.

En effet, a-t-il expliqué, la poudre blanche du Ridomil une fois pulvérisée sur des tomates étalées au marché, "commence à tuer lentement parce qu'étant restée active et indissoluble dans l'eau.

Il a mis en garde également contre l'utilisation des objets ayant servi d'emballage des pesticides ou d'autres produits chimiques notamment des bouteilles, des bidons et des sacs collectés par ici par là pour être revendus et réutilisés comme des emballages.

Pour en finir avec cette problématique, l'expert Niyongabo a recommandé la mise en place d'un comité national pour homologuer la commercialisation et l'importation des pesticides au Burundi.

"De la sorte, il serait possible de mettre fin à l'actuelle anarchie en la matière à cause des défaillances récurrentes observées dans le contrôle ad hoc", a-t-il renchéri.

Car, a-t-il fait remarquer, les fraudes se faufilent dans ces défaillances observées au niveau du fonctionnement de la filière pesticide à tous les paliers du processus (importation, commercialisation, vente et consommation).

Pour lui, les autorités burundaises devraient revoir les moyens efficaces pour la récupération des pesticides déjà enterrés et les détruire d'une façon efficace et non dangereuse pour l'environnement, en s'appuyant sur une brigade de suivi de vente et de commercialisation des produits phytopharmaceutiques.

Face à la dangerosité des pesticides, il a recommandé également l'institutionnalisation d'une campagne d'inspection "minutieuse" des infrastructures de stockage des pesticides, tout en renforçant le dispositif législatif au plan répressif, en vue d'une application effective du principe du pollueur-payeur.