Burundi : pour les autorités, tout est maîtrisé, mais les disparitions continuent
Sécurité

RFI, 17-12-2016

Le gouvernement burundais continue de démentir toutes les accusations de violations des droits de l'homme et assure qu'aujourd'hui « tout va très bien » car la paix est revenue. Mais cette paix toute relative semble être imposée au prix d'une politique du tout sécuritaire, qui fait régner la peur à travers le pays, selon les organisations de défense des droits de l'homme.

Des perquisitions inopinées avec interdiction de sortir de sa maison ou d'aller au travail, des dizaines d'arrestations d'opposants chaque semaine, des cas de disparitions... La population, surtout celle des zones acquises à l'opposition, dit payer au plus fort ce qu'elle qualifie de « semblant de paix » au Burundi.

Mais le premier vice-président burundais dément, et justifie ces arrestations.

« Il y a des perturbateurs de l'ordre et ces gens ne désarment pas. Nous avons été avertis qu'il y a eu des incursions, en provenance des pays limitrophes. Donc si vous voyez des gens arrêtés à gauche et à droite, c'est sur bases d'informations que nous détenons sur ces malfaiteurs », dit Gaston Sindimwo.

Certains habitants décrivent aujourd'hui le Burundi comme une prison à ciel ouvert. Chaque chef de ménage sur l'étendue du territoire burundais est obligé d'avoir un cahier où sont inscrits les noms de tous ceux qui habitent sa maison. Et malheur à celui qui oublie de noter et de signaler la présence d'un visiteur, même d'un soir.

Le premier vice-président lui assure que c'est ce contrôle absolu des mouvements de la population qui a permis de ramener la paix.

« La situation sécuritaire est maîtrisée, de la petite colline jusqu'au niveau national. Nous contrerons tous les mouvements, c'est pourquoi ces gens qui s'infiltrent sont arrêtés massivement parce que justement ils sont décelés par la population. »

Et Gaston Sindimwo de prévenir, la vigilance et le contrôle vont être accrus, surtout en cette période de fêtes.

Des centaines d'arrestations

La plus ancienne organisation de défense des droits de l'homme du Burundi, la ligue Iteka, continue, elle, de collecter clandestinement des données sur ce pays et de les publier chaque semaine. Elle dénonce une répression policière accrue depuis un trimestre, qui instaure un véritable climat de peur dans tout le pays.

Son président, Anshaire Nikobamye, parle de centaines d'arrestations parmi les rangs de l'opposition en moins de trois mois, de gens qui sont poursuivis pour apparténance à des groupes armés, alors que le gouvernement assure que la crise que traverse ce pays depuis que le président Pierre Nkurunziza a décidé de briguer un troisième mandat, il y a plus d'une année et demie, est finie.

« Au moment où le gouvernement ne cesse de dire que tout est calme, que la situation est maîtrisée, nous observons des harcèlements accentués des membres d'opposition, et cela se manifeste à travers des arrestations et des disparitions forcées qui augmentent de semaines en semaines », explique Anschaire Nikobamye. L'homme vit aujourd'hui en exil. Il poursuit : « A titre d'exemple, au mois d'octobre, nous avons enregistré 272 arrêtés, 16 portés disparus. Au mois de novembre, 295 arrêtés, 39 portés disparus, et sur les deux semaines de décembre, nous avons enregistré 246 arrêtés et 22 portés disparus. Et le seul motif essentiellement évoqué est la participation aux bandes armées. Ca étend une panique généralisée dans tout le pays parce que ces arrestations sont observées dans presque toutes les provinces du pays. »