RSF dénonce "la guerre de manipulation" menée par le pouvoir burundais
Droits de l'Homme

Reporters sans frontières, 07/03/2017

BURUNDI

Fake News : arme de destruction de la presse indépendante pour le pouvoir burundais

Depuis quelques jours, une polémique a éclaté sur le Net après la publication d’un article erroné du Guardian sur les “fake news”. Le papier voulait illustrer le combat des journalistes burundais en exil et dénoncer la stratégie d'instrumentalisation de l’information par le gouvernement burundais. Il est en réalité devenu un instrument dans la guerre de manipulation que le gouvernement burundais livre à ses opposants.

Dans un article paru le 1er mars 2017, sur le site Afrique du Guardian, la journaliste Rossalyn Warren interviewe trois journalistes burundaises en exil au Rwanda et décrit leur travail au sein du réseau SOS Média Burundi.

Problème : SOS Média Burundi n’a aucun journaliste en exil au Rwanda et les journalistes interrogées travaillent pour un autre média en ligne, Humura. Ce média est une émanation en exil de la très populaire Radio publique africaine (RPA) fermée définitivement depuis avril 2015 par le régime de Pierre Nkurunziza. SOS Média Burundi en revanche est un réseau constitué au lendemain du putsch de mai 2015, de journalistes qui sont toujours dans le pays et fonctionnent, comme décrit dans l’article, en silo, et dans le secret afin de protéger la sécurité de leurs correspondants.

La journaliste a expliqué qu’il s’agissait d’une erreur et qu’elle a confondu les deux médias en rédigeant son papier. Le nom du média pour lequel travaillent les journalistes a été modifié le 4 mars mais l’article est toujours inexact puisqu’il continue d’attribuer le fonctionnement de SOS Média Burund à la radio en ligne HumuraSOS Médias Burundi a publié dans la foulée, le 5 mars un communiqué désavouant l’article du Guardian.

L'affaire aurait pu s'arrêter là, si le pouvoir burundais n'avait pas cherché à l'exploiter en sa faveur, le contrôle de l'information dans le pays étant devenu un enjeu crucial depuis 2015.

Tempête dans la twittosphère

L’article a beaucoup circulé sur les réseaux sociaux et de fait, mis en danger les journalistes de SOS Média Burundi, qui se retrouvent aujourd’hui attaqués de toute part.

Les journalistes au Burundi se sont sentis menacés car cet article les associait au Rwanda. Une carte de visite dangereuse quand on connaît les relations actuelles plus que tendues entre les deux voisins.

Mais surtout l’article erroné du Guardian et le démenti de SOS Média Burundi font les choux gras des propagandistes du gouvernement. Le conseiller en communication de la présidence, Willy Nyamitwe, n’a pas manqué de transformer l’erreur de la journaliste en “mensonges”, alimentant ainsi la théorie gouvernementale d’une presse internationale partisane et du “complot international” contre le Burundi.