Les vidéos amateurs qui dérangent...
Société

Deutsche Welle, 06.04.2017

C'est une vidéo qui continue de faire parler d'elle à Bujumbura et au-delà des frontières burundaises. Elle montre des jeunes Imbonerakure en train de chanter qu’ils vont enceinter les femmes des opposants du régime.

Les autorités de Bujumbura ont bien essayé de se démarquer de cette vidéo menaçante, mais trop tardivement selon l'opposition et les organisations indépendantes de la société civile qui dénoncent une réaction "lâche".

Dans un communiqué largement diffusé sur les réseaux sociaux, le CNND-FDD a en effet condamné l'utilisation de la chanson qui : "ne concorde pas avec son idéologie". Mais dans le même temps, des tweets et publications faisant la promotion des Imbonerakure ont inondé les réseaux sociaux. 

La lenteur de la réaction des autorités burundaises n'est pas un cas isolé en Afrique...

En République démocratique du Congo, 13 fosses communes ont été récemment découvertes dans le centre du pays, grâce notamment à des videos amateurs filmées par de simples citoyens. Kinshasa avait d'abord catégoriquement démenti ces informations avant de se raviser et accepter l'ouverture d'une enquête sous la pression de l'ONU.

Un autre exemple

Au Tchad, la vidéo du viol collectif d'une jeune fille par des fils de dignitaires du régime avait provoqué l'émoi à NDjamena. Le gouvernement d'Idriss Déby avait été obligé d'intervenir pour éviter un embrasement généralisé. Ce genre d'événement relance le débat sur l'importance du cyber-citoyen en Afrique, où des internautes improvisés ou professionnels ne laissent aucune chance à la retention de l'information. Boureima SALOUKA est blogueur et consultant en communication au Burkina Faso:  "C'est vrai qu'en matière de droit, il va falloir expertiser pour voir dans quelles conditions ces images ont été captées. Si elles sont elles recevables - il y a beaucoup de conditions mais aussi du conditionnel. Mais elles peuvent constituer des preuves pour demander des comptes à des dirigeants dans un proche avenir".   

Des lois supranationales pour exiger la publication de ce type d'informations

C'est ce que pense Julie Owono, directrice exécutive d'Internet sans Frontières. Pour elle, les dirigeants du continent, dont la totalité utilisent les réseaux sociaux pour communiquer avec la jeunesse africaine, doivent respecter les conventions internationales relatives à l'accès à l'information. Elle rappelle que les pays qui ont adopté des lois dans ce sens "se comptent sur les doigts d'une main". Et puis, il ne suffit pas d'adopter une loi, encore faut-il l'appliquer. Et cela, selon Julie Owono, "c'est une autre paire de manches".