"Le malheur du Burundi, c’est Pierre Nkurunziza", selon la presse du Burkina
Analyses

Le Pays, 13 avril 2017

La Communauté internationale face à la crise burundaise :

Un silence qui sert le dictateur

Depuis que le médiateur tanzanien dans la crise burundaise, Benjamin Mkapa, a jeté l’éponge en mars dernier, la situation va de mal en pis. Plus aucun espoir de trouver un compromis de sortie de crise ne pointe à l’horizon, le dialogue étant de fait totalement rompu entre les protagonistes. Pire, le pays semble complètement abandonné à lui-même, par une communauté internationale devenue aphone, qui s’est montrée jusque-là incapable de trouver une solution pour faire plier le satrape.

Une situation qui a pour conséquence de maintenir davantage les populations dans la précarité. Mais là où le bat blesse davantage, c’est que ce silence prolongé de la communauté internationale sert le dictateur qui fait désormais ce qu’il veut, et ne se fixe aucune limite dans la répression des opposants.

Le Burundi est à la croisée des chemins, avec un peuple qui est devenu l’otage de son propre président

Le dernier acte en date est la suspension d’un parti de l’opposition pour une durée de six mois, parce que soupçonné, selon le pouvoir, de vouloir entretenir une milice. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le Burundi est à la croisée des chemins, avec un peuple qui est devenu aujourd’hui l’otage de son propre président. Et c’est peu de dire que le malheur du Burundi, c’est Pierre Nkurunziza.

Car, depuis que le pasteur-président a eu la mauvaise idée de briguer un troisième mandat et de se faire réélire sur les cadavres de ses compatriotes qui contestaient sa candidature, son pays est entré dans une zone de turbulences et a rompu avec la paix. Depuis lors, le décompte macabre des victimes du pouvoir qui se comptent par centaines, n’est pas prêt de s’arrêter et beaucoup de Burundais ont été contraints à l’exil pour sauver leur peau.

A l’intérieur, avec la répression sanglante de la contestation, l’opposition a été réduite à sa plus simple expression. Pendant ce temps, celle en exil est aussi en train de s’effriter, avec des querelles picrocholines notamment au sein du CNARED, qui sont en passe d’avoir raison de la cohésion du groupe. C’est dire si le boucher de Bujumbura n’a plus véritablement d’adversaire en face, dans le bras de fer qu’il a engagé depuis maintenant deux ans avec son peuple.

Nkurunziza a donc fait place nette en faisant le ménage et règne aujourd’hui en maître incontesté et incontestable dans son pays. Qui donc pour sauver le Burundi, a-t-on envie de s’exclamer ? D’autant plus que le sort de ce pays ne semble préoccuper personne, notamment les grands de ce monde qui ont le pouvoir de changer les choses et le cours de l’histoire, mais qui se sont tous détournés du Burundi au point d’en faire une crise oubliée, un pays oublié.

Même les sanctions économiques infligées par l’Union européenne (UE) n’ont pas réussi à faire reculer le satrape qui croit avoir trouvé la parade en contraignant ses compatriotes à mettre la main à la poche, par des cotisations forcées. C’est donc peu de dire que ces sanctions européennes n’ont pas pour le moment atteint les objectifs escomptés, puisque ce sont les populations qui semblent payer un lourd tribut, contraintes qu’elles sont de participer à ce qui a toutes les allures d’un « effort de guerre ».

Avec la démission de la communauté internationale, l’on est poussé au pessimisme

C’est pourquoi il n’est point besoin de dire que s’il n’y avait pas ce climat de terreur, ils sont nombreux les Burundais qui n’auraient pas accepté ce sacrifice qui n’est pas le leur, mais qu’on leur impose pour une cause qui est loin d’être celle de leurs intérêts. Sur le plan économique, la situation est des plus critiques et sur le plan politique, elle n’est guère meilleure, avec la rupture du dialogue entre les protagonistes, qui laisse le champ libre au dictateur.

Mais jusqu’à quand le maître de Bujumbura pourra-t-il tenir sur cette position ? Bien malin qui saurait répondre à cette question. En tout cas, en attendant, c’est le peuple burundais qui souffre le martyre. Et avec la démission de la communauté internationale, l’on est poussé au pessimisme quant à une issue heureuse.

Car, à vrai dire, l’on ne voit pas vraiment d’où pourrait venir le salut du peuple burundais, à moins que par l’une de ces extraordinaires surprises dont elle seule a le secret, la nature ne se charge elle-même de rendre justice au peuple meurtri du Burundi, en le débarrassant d’un dictateur sanguinaire et de la pire espèce, qui a fini de convaincre qu’il s’est installé à la tête de ce pays pour ses propres intérêts et non pour ceux de son peuple

Autrement, il ne reste plus qu’à espérer qu’une révolution de palais se charge de réécrire l’histoire de ce petit pays d’Afrique, qui traîne toute la misère du monde, avec un président sans cœur et sans état d’âme.