Burundi : La CNIDH essuie les critiques de la part des parlementaires
Droits de l'Homme

PANA, 06 juillet 2017

Face-à-face inédit entre les députés et le président de la Commission des droits de l’Homme au Burundi

Bujumbura, Burundi - Le président de la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme (Cnidh), Jean-Baptiste Baribonekeza (photo), a essuyé, mercredi, des critiques inhabituelles de la part des députés de l’Assemblée nationale au moment de la présentation du rapport couvrant l’année 2016 et le premier semestre de 2017, période à laquelle plus de 400 personnes ont été victimes d’atteintes au droit à la vie, a-t-il indiqué.

Depuis sa création, en 2010, la Cnidh rendait jusque-là compte, sans anicroche, de ses activités à l’Assemblée nationale qui, par ailleurs, nomme tous ses membres sur concours de sélection.

Comparée, toutefois à l’année électorale de 2015, émaillée de violences de masse dans lesquelles près de 700 personnes ont perdu la vie, il s’agit-là d’une « nette amélioration de la situation », a tempéré le président de la Commission.

La Fédération internationale des droits de l’Homme (Fidh) venait de sortir, la veille, un rapport encore plus accablant et mal digéré à Bujumbura d’« au moins 1.200 personnes tuées, entre 400 et 900 disparitions forcées, plusieurs centaines, voire des milliers de personnes torturées, plus de 10.000 encore détenues arbitrairement et près de 400.000 réfugiés» depuis le début de la crise, en avril 2015, au Burundi.

L’un des députés influents et ancien porte-parole du Conseil national pour la défense de la démocratie/Forces de défense de la démocratie (Cndd-Fdd, parti au pouvoir), Daniel Gélase Ndabirabe, s’est demandé si les chiffres inhabituellement élevés de la Cnidh n’étaient pas destinés à la consommation extérieure, au moment où la Cnidh est dans la ligne de mire des organisations internationales marraines de défense des droits humains.

La Cnidh est sous examen, jusqu’en 2018, de la part de l’Alliance globale des institutions nationales membres de défense des droits humains/Global alliance of national human rights insitution (Indho/Ganhri), sur fond de menace de rétrogradation du statut A au statut B.

Le chef de file de l’opposition parlementaire, Agathon Rwasa, de son côté, a trouvé que le rapport de la Cnidh était conforme à la réalité d’un pays où s’observent encore des atteintes aux droits humains.

Le discours officiel accrédite un retour à la paix et la sécurité sur l’ensemble du territoire national après l’écrasement de l’insurrection populaire des « anti-troisième mandat présidentiel » auquel on attribue généralement le genèse de la crise, aujourd’hui sous-tendue par des tensions politiques entre le pouvoir et l’opposition.

D’autres aspects du rapport de la Cnidh, qui ont titillé les oreilles de la plupart des députés de la mouvance présidentielle, portent, notamment sur le problème de la surpopulation carcérale au Burundi où les tribunaux traînent les pieds dans le traitement des dossiers des prévenus.

A titre indicatif, les prisons du Burundi regorgent actuellement de près de 10.000 détenus, pour une capacité d’accueil de 3.750, soit un dépassement de 250%, selon toujours le rapport de la Cnidh.

Au niveau des droits économiques, le rapport de la Cnidh met surtout en exergue les conséquences directes et particulièrement néfastes pour la population à cause du désengagement des partenaires techniques et financiers du Burundi, toujours du fait de la crise politique et des droits humains dans le pays.

Du fait des sanctions de la Communauté internationales, le rapport de la Fidh note des coupes budgétaires publiques de la part du gouvernement burundais, ayant notamment affecté les secteurs de l’eau et l’environnement (72 %), la santé (54 %), l’éducation (30 %) et l’agriculture (14 %).

Actuellement, 65 % de la population du Burundi vivent au-dessous du seuil de pauvreté et plus de 2,1 million de personnes sont en insécurité alimentaire, dont 806.000 en insécurité alimentaire sévère, s’inquiète la même source.