Panama Papers : Zuma et Nkurunziza accusés d'enrichissement illicite
Politique

Deutsche Welle, 17.10.2017

Les dernières révélations des Panama Papers incriminent également les présidents sud-africain et burundais. Selon les enquêteurs, ils seraient impliqués dans de vastes scandales économico-politiques.

[Photo : Jacob Zuma et Pierre Nkurunziza, les présidents sud-africain et burundais cités dans le pillage des ressources de leurs pays.]

Pour le cas de l'Afrique du Sud, le rapport "The Plunder route to Panama" est revenu sur le vaste scandale économico-politique dans lequel est engluée depuis plusieurs années la famille Gupta. Cette richissime fratrie d’origine indienne, déjà incriminée dans plusieurs affaires de malversations financières, est réputée proche de Jacob Zuma.  A la tête d'un véritable empire industriel, la fratrie Gupta est soupçonnée d'avoir orchestré de nombreuses nominations de membres du gouvernement. 

"Il y avait un ancien Vice-ministre des Finances (Mcebisi Jonas, NDLR) qui disait clairement qu'il était convoqué chez les Guptas dans leur luxueuse villa ici à Johannesburg. Et on lui a proposé des centaines de millions de rand, pour accepter d'être ministre des Finances. Jacob Zuma était apparemment dans une autre pièce dans la même maison. Ce sont les contribuables sud-africains qui donc payent pour certains scandales", a expliqué à la Deutsche Welle, Liesl Louw-Vaudran, experte à l'Institut d'études sur la sécurité à Pretoria, en Afrique du sud.

Selon nos diverses informations, le business de cette famille s’est étendu à plusieurs secteurs clés de l’économie sud-africaine : l’industrie minière, l’immobilier, l’aviation, le  tourisme et, même dans le secteur des médias, puisqu’en 2010, ils ont lancé leur propre quotidien, The New Age, la chaîne d’information ANN7.

Selon Liesl Louw-Vaudran, "la famille Gupta est arrivée en Afrique du sud en 1993 et petit à petit, elle s'est accaparée le contrôle de beaucoup de sociétés, de médias. Ils se sont rapprochés du président Jacob Zuma, son fils, son neveu. Il y a de plus en plus de preuves qui prouvent que sont des contribuables sud-africains qui payent pour certains scandales. Par exemple, dernièrement, il est apparu que les trois responsables de la compagnie publique d'électricité Eskom étaient liés aux Guptas et qu'ils ont créé une société de toutes pièces, sans contrat. Et Eskom leur a donné un contrat de 45 millions de dollars."

Le document de Panama Papers estime à 5 milliards de rands, soit 289 millions d’euros par an, les retombées financières du business de cette famille, dont le quartier général se situerait au 7 Saxonwold Drive, un des quartiers les plus huppés de la capitale économique sud-africaine, Johannesburg.

Pierre Nkurunziza lui aussi épinglé

Les enquêteurs ont aussi cité le président burundais, Pierre Nkurunziza, qui aurait profité de la crise politique dans son pays pour  s'enrichir de manière illicite.

Selon Jean-Claude Mputu, chercheur congolais en matière de gouvernance et démocratie, "le groupe de journalistes africains a découvert à propos du Burundi que Pierre Nkurunziza détient une part de l'argent détourné. On parle notamment de collusion avec une société d'hydrocarbure, dont lui-même est actionnaire et qui est détenteur de plusieurs centaines de millions de dollars sur des comptes à l'étranger. Nos dirigeants nous ont habitués à des discours. Dès qu'ils sont attaqués, ils disent qu'il s'agit de néo-colonialisme et de néo-impérialisme. Panama Papers montre que dans plusieurs pays, ce sont les dirigeants africains qui pillent le continent. Même s'ils le font en complicité avec les multinationales."

Ces révélations des Panama Papers concernant le Burundi font froid dans le dos quand on sait l'état de paupérisation que subissent les Burundais. Surtout depuis que l'Union européenne a suspendu, en 2015, son aide directe aux autorités burundaises.

Joint à Bujumbura par la Deutsche Welle, le porte-parole de Pierre Nkurunziza a déclaré que la présidence burundaise n’a jamais pris connaissance de ce document.

"Nous réagirons au dit rapport ce mercredi après avoir consulté le principal incriminé, le président Pierre Nkurunziza", a conclu Jean-Claude Karerwa Ndenzako.