Burundi : commémoration du 24è anniversaire de la mort du président Ndadaye
Politique

@rib News, 21/10/2017 – Source Xinhua

Le gouvernement burundais a organisé samedi dans toutes les 18 provinces du pays les cérémonies marquant le 24ème anniversaire de la mort du premier président burundais démocratiquement élu, Melchior Ndadaye, assassiné le 21 octobre 1993 dans un camp militaire de Bujumbura au cours d'une tentative de coup d'Etat d'un groupe de militaires "insurgés". [Photo : Dépôt d'une gerbe de fleur sur la tombe du Président Melchior Ndadaye par le couple présidentiel burundais, Pierre et Denise Nkurunziza.]

Décrété "Héros de la démocratie" quelques années après sa mort, le président Ndadaye, né en mars 1953, est mort à l'âge de 40 ans seulement après 120 jours d'exercice du pouvoir (10 juillet 21 octobre 1993).

La mort du président Ndadaye a été accompagnée par l'assassinat de ses proches collaborateurs d'alors, à savoir le président de l'Assemblée nationale, Pontien Karibwami, le 1er vice-président de l'Assemblée nationale, Gilles Bimazubute, le ministre de l'Intérieur, Juvénal Ndayikeza, l'administrateur-directeur général de la Documentation, Richard Ndikumwami, ainsi que Eusébie Nshimirimana, épouse de l'ancien chef d'Etat burundais Sylvestre Ntibantunganya.

Dans la province urbaine de Bujumbura-Mairie abritant la capitale burundaise, les cérémonies marquant la commémoration de cet anniversaire, organisées en deux temps (messe d'hommage et dépôts de gerbes de fleurs), ont été rehaussées par la présence des plus hautes personnalités burundaises, dont le président Pierre Nkurunziza et son épouse, les membres du corps diplomatique ainsi que les responsables des formations politiques agréées dont le Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces pour la défense de la démocratie (CNDD-FDD, parti au pouvoir) et le Front pour la démocratie au Burundi (FRODEBU), formation politique du président Ndadaye.

L'archevêque du Diocèse de Bujumbura, Mgr Evariste Ngoyagoye, qui a dirigé la messe organisée en mémoire du président Ndadaye, des autres "martyrs" de la démocratie dont ses proches collaborateurs assassinés ainsi que des milliers de Burundais victimes des massacres postérieurs, a appelé ses compatriotes à "briser les murs de la haine" en s'engageant résolument vers une "vraie repentance" sur les crimes commis.

De la sorte, a ajouté le prélat burundais, l'unité nationale tant longtemps recherchée, pourrait être assise sur un socle solide.

L'un des moments forts de la cérémonie aura été celui de réécouter le discours prononcé par feu président Ndadaye le 2 juin 1993 au lendemain de sa victoire dans une élection présidentielle qui l'avait opposé au chef d'Etat sortant d'alors, Pierre Buyoya, qui s'était fait représenter comme candidat de l'Union pour le progrès national (UPRONA, ex-parti unique).

"La victoire électorale obtenue n'est ni celle d'un homme, ni celle d'un parti politique, mais c'est plutôt celle de tous les Burundais, vainqueurs et vaincus dans le scrutin appelés à s'embarquer dans un Burundi nouveau engagé pour une paix pour tous, une dignité pour tous et une véritable unité axée sur l'assise d'une justice sociale dans le pays", a martelé l'ancien président Ndadaye.

Le secrétaire général du FRODEBU, Pierre-Claver Nahimana, s'est dit satisfait de constater que 24 ans après la mort du président Ndadaye, "des grains démocratiques ont germé dans les esprits des enfants nés à cette époque" dans la mesure où les principes sur la promotion des valeurs démocratiques, des droits de l'homme et de bonne gouvernance au cœur de "l'héritage politique" du président Ndadaye, sont aujourd'hui déjà ancrés dans leurs cœurs.

Toutefois, a-t-il déploré, une épine subsiste sur les traces de l'assassinat du président Ndadaye dans la mesure où le dossier judiciaire n'est pas encore totalement vidé.

"Ndadaye n'était pas n'importe qui au Burundi, c'était un président de la république. Pour éviter de mauvais précédents dans l'histoire de la justice burundaise, il est hors de question que son dossier soit traité dans le cadre de la justice transitionnelle axée uniquement sur la recherche de la vérité vis-à-vis des crimes passés, mais doit être revisitée profondément au cours d'un procès juste et équitable qui établirait notamment des responsabilités individuelles sur les commanditaires de ce crime d'Etat", a souligné M. Nahimana.

Pour lui, le précédent verdict judiciaire rendu par la cour suprême burundaise sur l'assassinat du président Ndadaye il y a quelques années, aura été en réalité "une parodie judiciaire qui a sacrifié des exécutants, tout en mettant à l'abri les véritables commanditaires, qui continueraient de se cacher jusqu'à ce jour.