Burundi : Election d’un nouveau chef de file de l’opposition en exil
Politique

PANA, 30 novembre 2017

Bujumbura, Burundi - L’opposant en exil Jean Minani (photo) a été porté mercredi, à la tête du «Conseil national pour la défense de l’Accord d’août 2000, à Arusha, en Tanzanie, sur la paix, la réconciliation et l’Etat de droit » (CNARED), en remplacement de Charles Nditije, également en cavale depuis les dernières élections controversées et émaillées de violences de 2015, a-t-on appris jeudi, de source proche de cette principale plate-forme politique burundaise.

Des frondeurs du parti au pouvoir garnissent également les rangs du Cnared, notamment l'ancien président de l'Assemblée nationale, Pie Ntavyohanyuma, l'ex-deuxième vice-président de la République, Gervais Rufykiri, un ancien porte-parole de la présidence de la république, Léonidas Hatungimana ou encore l'ancien porte-parole du parti au pouvoir, Onésime Nduwimana, tous vivant en exil à l'étranger.

Le nouveau leader du CNARED est un vieux routier de la politique nationale qui avait échappé miraculeusement à la tentative de putsch militaire de 1993, ayant décapité les institutions démocratiquement élues de l’époque.

La nouvelle crise burundaise l’a encore politiquement déstabilisé, de même que la plupart des ténors de l’opposition qui vivent en exil à l’étranger, principalement en Belgique, l’ancienne puissance tutrice du Burundi.

Au terme de la même élection, d’anciennes et de nouvelles figures politiques ont également été confirmées ou remises en selle dans les hautes sphères du CNARED.

La première vice-présidence est revenue à une nouvelle figure, Mme Aline Ndenzako, la deuxième vice-présidence à un frondeur du parti au pouvoir, Pamphile Muderega, le secrétariat exécutif à un opposant notoire au régime, Anicet Niyonkuru.

Un autre opposant en exil, réputé radical, Pancrace Cimpaye, quant à lui, a été reconduit au poste de Porte-parole d’une coalition hétéroclite qui dit militer en faveur du rétablissement d’un environnement propice à de nouvelles élections plus «justes, libres, paisibles, équitables, inclusives et démocratiques» que celles controversées de 2015.

Le CNARED n’a toutefois pas saisi l’occasion qui lui a été offerte par la reprise, lundi dernier, à Arusha, des pourparlers inter-burundais destinés à vider le contentieux électoral de 2015.

Depuis son exil en Belgique, le nouveau patron du CNARED a égrené mercredi soir, une série de griefs sur les antennes de la «Voix de l’Amérique», à l’origine du mot d’ordre de boycott de la quatrième et «dernière session» des laborieux pourparlers inter-burundais, sous l’égide de la Communauté d’Afrique de l’Est, depuis juillet 2016.

Le CNARED n’a pas été invité «en tant qu’entité unique», la sécurité n’est pas garantie et les «vrais protagonistes» de la crise burundaise sont absents d’Arusha, à en croire le Dr Minani.

La partie gouvernementale s’est fait représenter par un cadre assistant au ministère de l’Intérieur et de la Sécurité publique, Térence Ntahiraja, «sans pouvoir de décision», aux yeux du CNARED qui veut rencontrer physiquement, le président burundais.

L’agenda de la dernière session à l’extérieur du pays comporte plusieurs points, notamment la situation sécuritaire et l’engagement à mettre fin à toutes les formes de violences, l’engagement pour l’Etat de droit et la fin de l’impunité, le statut et le respect de l’accord d’Arusha ayant mis fin à la dernière grande guerre civile de 1993 à 2003.

Les participants auront également à discuter du renforcement de la culture démocratique et de l’ouverture de l’espace politique, des problèmes socio-économiques et humanitaires, de l’état actuel des relations internationales qui ont été également affectées par la crise burundaise.

Les protagonistes de la crise sont surtout attendus sur leurs capacités à transcender leurs divergences pour s’entendre sur un gouvernement de transition censé apaiser les esprits et recoudre le tissu social mis à mal par l’une des récentes et longues crises politiques burundaises.

Les échos d’Arusha laissent entendre que la mouvance présidentielle menace de claquer la porte des pourparlers, au cas où la médiation venait à maintenir à l’ordre du jour, le point relatif à un gouvernement transitoire dans un pays où le verdict des urnes a tranché et qui prépare à une nouvelle législature et des élections en 2020. 

Le pouvoir n’est pas non plus favorable à la remise en cause de son projet de révision de la Constitution dans l’objectif de permettre à l’actuel chef de l’Etat de se représenter en 2020, présume l’opposition.

On attribue généralement l’origine de la crise persistante au troisième quinquennat de l’actuel chef de l’Etat, jugé contraire à la Constitution et à l’accord d’Arusha, y compris dans le camp présidentiel.

La médiation travaille néanmoins à arracher un accord global de paix pour le Burundi qui devrait être signé, en présence des chefs d’Etat de la Communauté d’Afrique de l’Est, le 8 décembre prochain, date annoncée de clôture de la «session de la dernière chance», aux yeux de nombre d’analystes à Bujumbura.