Attentat contre Habyarimana : la justice française a clos son enquête
Afrique

@rib News, 21/12/2017 – Source AFP

Les juges antiterroristes français ont clos mercredi l'enquête sur l'attentat de 1994 contre le président rwandais Habyarimana qui empoisonne depuis dix-neuf ans les relations entre Paris et Kigali, a appris jeudi l'AFP de sources judiciaire et proche du dossier.

Il revient désormais au parquet de Paris de réclamer aux juges la tenue d'un procès ou l'abandon des poursuites contre les sept personnes mises en examen, issues du clan de l'actuel président rwandais, Paul Kagame. [Photo : Des soldats du FPR devant l'épave du Falcon 50 de Habyarimana, abattu le 6 avril 1994.]

Le soir du 6 avril 1994, l'avion de Juvénal Habyarimana, un Hutu, avait été abattu en phase d'atterrissage à Kigali par au moins un missile. Cet attentat est considéré comme le déclencheur du génocide qui fit 800.000 morts selon l'ONU, essentiellement parmi la minorité tutsi.

Alors qu'au Rwanda, une commission d'enquête a imputé la responsabilité de l'attentat aux extrémistes hutu qui voulaient se débarrasser d'un président jugé trop modéré, une information judiciaire avait été ouverte en 1998 à Paris après la plainte des familles de l'équipage, composé de Français.

Sous l'égide du premier juge saisi, Jean-Louis Bruguière, l'enquête avait privilégié l'hypothèse opposée d'un attentat commis par l'ex-rébellion tutsi du Front patriotique rwandais (FPR), dirigée par Paul Kagame.

Les relations diplomatiques entre les deux pays avaient été rompues après l'émission en 2006 de neuf mandats d'arrêts contre des proches du président rwandais. Puis rétablies après la mise en examen de sept d'entre eux en 2008 et 2010.

Closes une première fois, les investigations avaient été relancées en 2016 car les juges souhaitaient entendre un dissident rwandais, Faustin Kayumba Nyamwasa. Lui-même visé par un des mandats d'arrêts, il avait fait une déposition devant notaire niant son rôle dans l'attentat mais accusant le FPR.

Selon une source proche du dossier, l'Afrique du Sud, où cet ancien général est réfugié, vient de refuser l'exécution de la commission rogatoire des juges qui voulaient l'auditionner par visioconférence.

Par ailleurs, deux des mis en examen, dont l'actuel ministre rwandais de la Défense, le général James Kabarebe, ne se sont pas rendus la semaine dernière à Paris à leur convocation. Les juges voulaient les confronter à un nouveau témoin, qui affirme avoir eu la garde des missiles au QG du FPR et charge ses anciens compagnons d'armes.

"Cet énième témoin n'a pas dû être aussi convaincant que certains avocats l'ont dit", a commenté auprès de l'AFP Me Bernard Maingain, conseil des sept personnes mises en examen avec Me Léon-Lef Forster. Les deux avocats "se réjouissent que le juge ait fait droit à leurs demandes" répétées de clore l'enquête et "regrettent toutes les manoeuvres de diversions menées pour empêcher le non-lieu".

La décision des juges "est logique et inéluctable, compte tenu des obstructions diplomatiques et politiques" de l'Afrique du Sud et du Rwanda, a réagi Me Philippe Meilhac, avocat de la veuve Habyarimana. "Les parties civiles attendent avec confiance la décision qui sera prise par le juge".