La Cour des comptes du Burundi dénonce des fraudes budgétaires
Economie

PANA, 07/08/2008

Bujumbura, Burundi - Une dizaine de "fonds et comptes extra-budgétaires" de plusieurs milliards de francs burundais auraient été gérés "de manière opaque" pour l’exercice 2006-2007, dénonce une source proche de la Cour des comptes du Burundi.

Il s’agit des fonds et comptes portant "gestion des catastrophes", "appui aux bonnes initiatives", "fonds non encore affectés", "droits d’administration et de dossiers", "redevance informatique", "fonds de lutte contre la fraude", "taxe rémunératoire sur attestation d’impôts", "fonds stock stratégique", "fonds spécial carburant" et "fonds spécial sucre", d’après un récent rapport de la Cour au Parlement burundais, dont la PANA a obtenu une copie.

Pour les deux exercices 2006 et 2007, les mouvements de recettes enregistrées s’élèvent à un peu plus de 20 milliards de francs burundais (un peu plus de 20 millions de dollars US), tandis que les sorties de fonds enregistrées sur ces comptes ont totalisé quelque 18,7 milliards de FBU (environ 18,7 millions de dollars), précise la Cour des comptes.

"Le point commun à ces comptes est que tous ont été alimentés par des fonds publics dont la gestion n’a pas respecté les règles normalement applicables en matière de gestion des fonds publics", peut-on encore lire dans le rapport de l'institution.

En effet, poursuit le rapport, "ces comptes et fonds sont gérés en dehors de la loi des finances et leur gestion déroge aux principes et règlements de gestion budgétaire rigoureuse".

"Ces comptes et fonds constituent des cadres privilégiés de gestion occulte des deniers publics", poursuit la Cour, en relevant au passage que les gestionnaires cumulent, par ailleurs, les fonctions d’ordonnateur et celle de comptable, "ce qui viole gravement le principe élémentaire du droit de la comptabilité publique, à savoir celui de la séparation des fonctions de comptable et ceux d’ordonnateur".

"Pire encore, aucune reddition n’a été constatée, ce qui complique davantage tout contrôle envisagé sur ces comptes", déplore la même source.

A titre illustratif, la Cour fait savoir que le compte "gestion des catastrophes" a été créé "irrégulièrement" par le ministère des Finances, le 10 juillet 2006, et ses ressources émargent sur le prix de la bière PRIMUS et le montant prélevé est compris dans la structure du prix de ce produit.

Le compte a été fermé par le ministère des Finances une année plus tard, mais, aujourd’hui encore, les prélèvements naguère effectués en faveur de ce compte alimentent l’autre compte extra-budgétaire "fonds d’appui aux bonnes initiatives", alors que la motivation avancée lors de sa clôture était le respect, tant des recommandations contenues dans le programme signé entre le gouvernement burundais et le Fonds international mondial (FMI), que celui du principe de l’unité de caisse en vue de rationaliser les comptes de l’Etat, s’étonne la Cour.

Le compte "appui aux bonnes initiatives", de son côté, est directement géré par le cabinet du président de la République avec des fonds publics provenant de la revente des stocks de carburants offerts dans le cadre d’un contrat signé par la Nigerian national petroleum (NNPC) et le gouvernement burundais, fait toujours savoir la Cour, en déplorant que les dépenses effectuées sur ce compte sont difficilement contrôlables, "dans la mesure où ces fonds sont gérés en espèces et que, de surcroît, aucune comptabilité fiable n’est tenue à jour".

Le contrat consiste en une fourniture de 15.000 barils de carburant brut par jour et ce, pour une durée d’une année renouvelable, rappelle-t-on.

L’autre compte épinglé par la Cour des comptes porte sur un "fonds non encore affecté" qui est néanmoins alimenté par des produits de la vente des épaves et véhicules en mauvais état appartenant à l’Etat, d’après la même source.

"L’examen des dépenses sur ce compte révèle que celui-ci apparaît comme une rallonge budgétaire du ministère des Finances et que, pire, sa gestion se fait en violation des lois et règlements régissant la gestion des fonds publics", dénonce la Cour.

La Cour des comptes recommande instamment, en définitive, la clôture pure et simple de tous ces comptes "obscurs", au profit du compte général du Trésor public.