Fin d'une saga de réfugiés burundais sous l'emprise d'une secte religieuse
Sécurité

PANA, 02 avril 2018

Bujumbura, Burundi - Des centaines de demandeurs d’asile burundais sont rentrés au bercail, dimanche matin, en provenance du Rwanda voisin où ils venaient d’être expulsés pour "refus obstiné" d’enregistrement biométrique et de soins médicaux, en vertu de leurs croyances dans une secte religieuse, ont constaté des correspondants de presse au niveau d'un poste frontalier d’accueil, dans le Nord du Burundi.

Le Rwanda s’était encore montré ferme dans la gestion des 3.000 réfugiés congolais établis sur son sol dont au moins cinq d’entre eux avaient été tués, en février dernier et plus de 20 blessés à la suite d’une manifestation sur la voie publique contre la réduction de la ration alimentaire, décidée par le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR).

Au Burundi, la crise politique, suite aux élections controversées et émaillées de violences de 2015, a poussé en exil près de 430.000 réfugiés dont 58,7% d’entre eux en Tanzanie, 20,8% au Rwanda, 10,9% en République Démocratique du Congo (RDC) et 9,5% en Ouganda, selon les données du HCR.

Jeudi dernier, quatre réfugiés burundais ont trouvé la mort et une soixantaine d’autres blessés dans un accident de la route, de retour d’exil en Tanzanie voisine.

Les réfugiés qui viennent d’être expulsés du Rwanda font partie de ceux qui obéissent à des règles spirituelles rigides et sélectives en matière d’alimentation, d’éducation et de santé, sous l’emprise de la secte d’Eusébie Ngendakumana.

Il s’agit d’une jeune fille burundaise à laquelle se serait révélée la Sainte Vierge Marie, prophétise-t-elle, malgré le désaveu de l’Eglise catholique du Burundi.

La veille de ces expulsions, le gouvernement rwandais avait avisé les autorités burundaises de sa décision de renvoyer ceux des 2.523 réfugiés burundais qui ne voulaient pas se soumettre aux lois locales et aux conventions internationales en matière de réfugiés.

Aux dernières nouvelles, ce sont finalement 1.600 réfugiés récalcitrants qui ont été expulsés, dimanche, du Rwanda voisin.

"Nous rentrons sans peur dans notre pays où même le chef de l’Etat affiche publiquement la foi en Dieu", s’est voulu rassurant, le porte-parole des réfugiés, Me Charles Ntagwarara, à la fin d’une odyssée qui durait depuis bientôt trois ans dans la sous-région des Grands Lacs africains.

Ce magistrat de carrière connu avait déjà eu maille à partir, à plusieurs reprises, avec les autorités burundaises, notamment en 2012, année à laquelle les adeptes d’Eusébie Ngandajkumana ont commencé à multiplier des croisades de prières et des pèlerinages non autorisés, dans le Nord du Burundi.

Cette année-là, au moins neuf personnes étaient tombées sous les balles de la Police au cours d’un pèlerinage mensuel à Businde, l’un des sanctuaires de la secte d’Eusébie, dans le Nord du Burundi.

Profitant de la violente crise électorale de 2015 au Burundi, les adeptes d’Eusébie s’étaient installés durablement dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC), avant que le 7 mars dernier, ils ne fassent mouvement vers le Rwanda, sous bonne escorte des casques bleus de la Mission onusienne de maintien de la paix au Congo (MONUSCO).

Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) leur avait coupé les vivres pour avoir refusé l’enregistrement biométrique en terre congolaise.

En septembre dernier, de violentes échauffourées avec les forces de l’ordre congolaises avaient coûté la vie à une trentaine de ces réfugiés burundais et plus de 181 autres blessés.

On rappelle que le Burundi a abrité dernièrement une réunion tripartite avec le HCR et la Tanzanie qui s’est soldée par un accord portant rapatriement d’au moins 72.000 réfugiés burundais établis sur le sol tanzanien, cette année.

La priorité sera donnée aux 19.148 des 274.455 réfugiés burundais de la Tanzanie qui sont déjà sur la liste de candidats au retour volontaire.