Le Burundi appelle à la rescousse l’UA dans ses démêlés avec le Rwanda
Sécurité

PANA, 05 avril 2018

Bujumbura, Burundi - Le gouvernement burundais a pressé, mercredi, dans un long communiqué, l’Union africaine (UA), de rappeler au Rwanda « les règles élémentaires régissant cette auguste famille africaine, en commençant par le principe de bon voisinage» qui est, pour le moment, mis à mal par des accusations récurrentes de déstabilisation mutuelle entre les deux plus proches voisins de la sous-région des Grands Lacs africains.

La tension repart de plus belle au lendemain de l’expulsion de plus de 2.500 demandeurs d’asile burundais qui refusaient, sous prétexte de leurs croyances religieuses, l’enregistrement biométrique et les soins médicaux de base, dont la vaccination des plus petits, ce que Kigali a trouvé inacceptable sur son territoire.

Les mêmes réfugiés de la discorde s’étaient repliés au Rwanda après avoir refusé l’enregistrement biométrique en République démocratique du Congo, leur premier pays d’accueil, laissant derrière eux une trentaine de compagnons d’infortune, tombés sous les balles et plus de 180 blessés, dans des échauffourées avec la Police congolaise.

 «Selon les premières déclarations de ces rapatriés forcés, ils auraient été plutôt refoulés du Rwanda parce qu’ils refusaient d’être recrutés pour faire partie des groupes armés en vue d’attaquer le Burundi, les plus jeunes, soit près d’un millier de jeunes filles et garçons confondus, ayant été retenus pour être enrôlés de force dans des groupes criminels», charge le communiqué officiel.

L’autre grief contre le Rwanda est qu’il héberge «une partie des putschistes et des terroristes qui ont endeuillé le Burundi lors des violences de 2015 », consécutives à la candidature de l’actuel chef de l’Etat burundais, Pierre Nkurunziza, à un troisième quinquennat, jugé contraire à la Constitution, par ses adversaires politiques, rappelle-t-on.

Le communiqué soutient «qu’une fois de plus, toutes ces manœuvre ne visent qu’à perturber le processus du référendum constitutionnel en cours», tout en rassurant que des mesures appropriées ont été prises pour sécuriser les opérations de vote et en mettant en garde les «perturbateurs, condamnés à essuyer le même échec que lors des tentatives précédentes».

Au Burundi, le référendum constitutionnel, qui divise et braque la classe politique nationale, a été déjà programmé pour le 17 mai prochain.

Au-delà des frontières nationales, «l’enrôlement forcé des réfugiés burundais, dont des enfants mineurs, dans des groupes armés », constitue une autre «violation grave» des Traités et Conventions internationales que le Rwanda a lui-même ratifiés, notamment le recrutement, l’entrainement militaire et l’armement des réfugiés», charge Bujumbura.

Le communiqué officiel demande, en conséquence, «au Président de la Commission de l’Union africaine, de rappeler au Rwanda, dont le chef de l’Etat actuel, Paul Kagame, assure la présidence de l’UA pour cette année, de respecter les règles élémentaires régissant cette auguste famille africaine, en commençant par le principe de bon voisinage».

Le texte du communiqué s’appuie sur la Convention de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) de 1969, régissant les aspects propres aux problèmes des réfugies en Afrique, en son Art II, Alinéa 6 stipulant que: "Les Etats signataires s’engagent à interdire aux réfugies établis sur leurs territoires respectifs d’attaquer un quelconque Etat membre de l’OUA par toute activité qui soit de nature à faire naître une tension entre les Etats membres et notamment par les armes, la presse écrite,...".

D’un autre côté, le communiqué se réfère à la «Convention de Niamey de l’UA sur la Coopération Transfrontalière, en ses Art 2, 3 et 4 sur la Sécurité » qui n’est pas non plus respectée par le Rwanda, «mettant ainsi en péril un texte fondamental régissant cette Organisation».

Le gouvernement burundais dit avoir récemment encore porté à la connaissance du Président de la Commission de l’Union africaine, à la veille du sommet de Kigali, au Rwanda, sur la Zone de Libre Echange Continentale, du 17 au 21 mars 2018, « pour dénoncer l’absence d’évolution dans le règlement du litige opposant le Burundi à son voisin insensible au respect de ses engagements vis-à-vis de la Communauté internationale qu’est le Rwanda».

Le gouvernement demande aux autorités rwandaises, qu’en plus de ceux de cette catégorie qui viennent d’être autorisés de rentrer, de « libérer et laisser rentrer tous les autres réfugiés burundais pris en otage avec la complicité de certains agents du HCR-Rwanda pour des fins de spéculations inacceptables».

Le Haut commissariat des Nations Unies aux réfugiés fait état de près de 430.000 Burundais encore en exil depuis la crise électorale de 2015, dont plus de 80.000 recensés au Rwanda et autour de 275.000 en Tanzanie, le reste étant établi en Ouganda et en République démocratique du Congo, dans de moindres proportions.