Le passé de Pierre-Claver Ndayicariye ne le qualifie pas pour présider la CVR

Voice of America, 23 novembre 2018

Le choix de Pierre-Claver Ndayicariye à la tête de la Commission vérité et réconciliation (CVR) a été fait à l’unanimité. Me Emmanuel Nkengurutse, avocat, ancien sénateur et membre de l’Uprona, estime que le passé peu glorieux de M. Ndayicariye à la Ceni ne le qualifie pas à diriger la CVR.

Selon Maitre Emmanuel Nkengurutse, la personne la mieux indiquée pour diriger la CVR, doit être quelqu’un d’impartial, d’indépendant, de compétent, d’honnête et surtout quelqu’un qui n’a pas trempé dans les crimes et les évènements malheureux qui ont frappé le Burundi.

C’est dans cette catégorie de personnes qu’on devrait aussi choisir les membres de la CVR. Ce qui "n’est pas le cas de Pierre-Claver Ndayicariye ou de la plupart des membres qui sont les hommes de main du président Pierre Nkurunziza", déclare ce membre de l’Union pour le progrès national dans une interview accordée à VOA vendredi 23 novembre 2018.

Les déclarations de cet homme de droit font suite à la nouvelle composition de la commission vérité et réconciliation (CVR), adoptée jeudi 22 novembre, par l'Assemblée nationale, suscite les critiques de l'opposition, notamment la nomination à sa tête de l'ancien président de la commission électorale, Pierre-Claver Ndayicariye.

L’avocat accuse le nouvel homme fort de la Commission Vérité et Réconciliation, d’avoir "trempé dans ces évènements [relatifs à la crise burundaise], notamment les échecs électoraux qui ont engendré des crises politiques majeures, des violations systématiques des droits de l’homme et des crimes contre l’humanité", poursuit-il.

Il ajoute aussi que le bilan catastrophique de M. Ndayicariye à la tête de la ceni ne milite pas en sa faveur.

Il ne peut pas faire partie d’une commission qui puisse sortir la vérité de notre histoire. Il fait partie des Hutus extrémistes qui tiennent à raviver l’histoire malheureuse, les conflits interethniques, et par conséquent les guerres qui en résultent.

Maitre Emmanuel Nkengurutse s’insurge aussi contre le fait que le pouvoir de Bujumbura accuse la Belgique d’avoir divisée le Burundi en y imposant des catégories ethniques.

L’avocat reconnait certes, que la colonisation n’est pas totalement étrangère dans le conflit burundais mais il soutient que la Belgique ne continue pas à tirer les ficelles de la division, 50 ans plus tard, après l’indépendance du Burundi en 1962.

"La violation de la Constitution ou de l’Accord d’Arucha est le fait de la Belgique ou le fait des Burundais?", Interroge-t-il. "On ne peut pas commettre des crimes et les mettre sur le dos des autres, des Blancs, de la Belgique l’ancien colonisateur. Il y a une partie de l’histoire du Burundi qui appartient aux burundais eux-mêmes. Le Burundi est un pays indépendant. Les responsables burundais doivent assumer leur histoire", avance-t-il.

Puis, de conclure : "Nous voulons savoir la vérité sur notre histoire. Nous voulons notamment savoir ceux qui sont responsables des crimes ; ensuite on saura quelle justice faire et les réparations à faire aux victimes. Nous n’allons pas coller aux Blancs tout ce qui s’est fait entre 1962 jusqu’aujourd’hui. Nous devons assumer notre histoire".

Nanythe Talani