Burundi : enquête sur un centre de torture secret
Droits de l'Homme

La Libre Belgique, 4 décembre 2018

Un documentaire de la BBC dénonce ce qui apparaît comme un des centres de torture du régime burundais dans la capitale, Bujumbura, après une enquête convaincante. Glaçant.

Diffusée dans l’émission BBC Africa Eye, l’enquête démarre sur des images qui ont fait le tour des réseaux sociaux burundais en décembre 2016: un ruisselet d’eau et de ce qui ressemble fort à du sang, sortant d’une maison de Kinanira, mêlée à de la mousse de savon. La vidéo a un tel impact que le gouvernement du président Pierre Nkurunziza dément le 29 décembre 2016 que cette maison soit utilisée comme lieu de torture et de détention.

Témoignages directs

La BBC a retrouvé le propriétaire de la maison, un Burundais qui a dû fuir le pays en 2015, lors du déclenchement de la répression sanglante contre ceux qui contestaient la volonté du Président de se présenter à un troisième mandat. Celui-ci était formellement interdit par l’accord de paix d’Arusha, qui a mis fin à la guerre civile (300.000 morts).

Nos confrères britanniques ont aussi retrouvé des images du pillage de la demeure par les forces de l’ordre burundaises, qui s’y sont installées. Ils ont recueilli le témoignage d’un ancien détenu dans cette maison – aujourd’hui en exil – qu’il décrit comme un lieu de torture où des prisonniers sont tués. Et celui d’un ex-agent de sécurité qui raconte comment il a vu trois des détenus de cette maison être décapités au couteau et des mares de sang être lavées à grande eau. Une eau qui a suivi le même chemin que celle montrée par la vidéo de décembre 2016.

Eliminés un par un

L’enquête de la BBC évoque 21 centres de torture dans le pays, dont six à Bujumbura. Elle constate que la répression déchaînée par le régime contre ses opposants fait moins de morts aujourd’hui qu’en 2015, mais plus de disparus. Et diffuse le témoignage d’un ex-membre du régime, qui a fui en 2018, indiquant qu’il y a « des listes de gens à tuer » parce qu’ils sont considérés comme des opposants ou parce qu’ils sont trop tièdes vis-à-vis du régime. Proclamant que la paix règne, les autorités burundaises continuent à tuer et torturer systématiquement, éliminant « un par un » (« kamwe kamwe », le titre du documentaire) ceux qu’elles considèrent comme leurs adversaires. MFC

Voir le Documentaire sur la BBC