Les Burundais craignent le retour au monopartisme
Politique

Deutsche Welle08.06.2020

La constitution de 2018 consacre le retour au parti unique. Une éventualité qui peut toutefois être évitée si le président élu se montre prêt au dialogue.

La loi fondamentale qui régit le Burundi depuis mai 2018  fait craindre le  retour  à un monopartisme.  En exil depuis 2015, Frédéric Bamvuginyumvira qui fut premier vice-président de la République, relève les changements en ce qui est de la constitution d’un gouvernement.

"L’article 128 précise que les ministres  vont provenir de n’importe où sans tenir compte des résultats des partis politiques lors des élections. Avec  la constitution qui était issue des accords d’Arusha, les partis politiques  qui participaient aux élections se heurtaient au prorata des résultats obtenus et des places obtenues à l’Assemblée nationale et ils pouvaient prétendre être au gouvernement. Maintenant cet article n’existe plus."

Le CNDD-FDD ultra-majoritaire au Parlement

Cette  même constitution promulguée en Juin 2018, stipule que la moitié des  2/3 de la chambre basse du parlement est indispensable pour  faire adopter une loi. Le  CNDD-FDD (le parti au pouvoir, ndlr) dispose de plus des 2/3 des sièges de l’Assemblée nationale. Selon Frédéric  Bamvuginyumvira, le parti au pouvoir a donc les coudées franches pour faire passer toutes les lois qu’il souhaite.

"L’article 180 précise que pour  que les travaux débutent à l’Assemblée nationale, il faut un quorum requis de 2/3. Et la majorité requise pour passer au vote c’est la majorité absolue c’est-à-dire 50% + 1. Donc ce qui signifie que c’est le seul parti politique qui va être le maitre du jeu. À l’Assemblée nationale et au Sénat, il n’y aura jamais de vote qui peut s’opposer à ce qu’une loi passe."

Pouvoir absolu

En outre, la même  constitution offre, selon certains analystes et hommes politiques, un pouvoir absolu au chef de l’Etat. Une loi qui n’est pas, par exemple, promulguée par le président, devient caduque 30 jours après son adoption.

Malgré cela, le politologue Gérard Birantamije estime qu’il faut garder espoir. La pratique, dit-il, pourrait être autre même si la constitution actuelle peut favoriser ce retour au monopartisme.

"Ce n’est pas tant que le parlement est meublé par un seul parti  ou que c’est le seul parti qui se trouve aux  commandes  à l’exécutif  qui fait que le modèle  soit vraiment un monopartisme. On voit ça dans d’autres pays, ça dépend  du système politique en question. Si réellement les institutions vont finalement œuvrer pour l’intérêt général, je trouve  que si ça marche ailleurs, ça pourrait aussi marcher ici. Le problème  justement qui  se pose  c’est cette confusion  entre le parti-Etat qui est déjà là et qui va être renforcé à l’issue de ces élections de 2020."

Le président élu en mai, Évariste Ndayishimiye, entrera en fonction en août et l’Assemblée nationale fera sa rentrée au mois de Juillet 2020.