Au Burundi, la réconciliation nationale, une priorité pour Évariste Ndayishimiye
Politique

Deutsche Welle, 19.06.2020

 Le nouveau président Burundais Évariste Ndayishimiye, a prêté serment le jeudi 18 juin dernier pour un mandat de sept ans. Le principal enjeu qui l'attend est celui de la réconciliation nationale.

Le général Évariste Ndayishimiye hérite d’un pays exsangue économiquement, isolé sur le plan diplomatique et qui souffre d’un lourd déficit démocratique. 

François Nyamoya, le secrétaire général du Mouvement pour la solidarité et la démocratie (MSD), estime que le dialogue, la réconciliation nationale et la restauration de l’Etat de droit sont intimement liés.

Selon lui, "la seule façon de créer, si je peux ainsi dire, une certaine légitimité, c’est de nouer le dialogue avec l’ensemble de la classe politique et d’ouvrir l’espace médiatique, ainsi que redonner sa place à la société civile. Et ensuite, engager un véritable dialogue national pour restaurer l’Etat de droit. On ne pourra pas réhabiliter l’économie 'il n'y a pas d'assainissement d'un environnement politique, si on ne remet pas sur pied le système judiciaire."

Sécurité

Pour sa part, Vital Nshimirimana, le président du Forum pour le renforcement de la société civile (FORSC), la réconciliation nationale passe nécessairement par la sécurité individuelle et collective des Burundais.

"Nous attendons qu’il puisse rassurer tout le peuple. Il faut qu’il puisse assurer la sécurité de chaque Burundais, sans exclusion, sans discrimination. Ceux qui n’appartiennent pas au CNDD-FDD (le parti au pouvoir) ont toujours été perçus comme des mauvais. Tant dis que ceux qui appartiennent au CNDD-FDD sont considérés comme des bons. Il suffit  de discipliner la milice Imbonerakure parce que c’est cette jeunesse du parti au pouvoir ne doit en aucune manière jouer un rôle en matière de sécurité", explique-t-il.

Marges de manoeuvre

Évariste Ndayishimiye aura-t-il des marges de manœuvres conséquentes pour ouvrir le jeu politique et opérer des réformes en profondeur ? 

S'il cherche à réformer, "il risque de se heurter à des réticences de la part des généraux qui tiennent le pays", prévoit Carina Tertsakian, chercheuse à l'Initiative pour les droits humains au Burundi.

Mais celle-ci estime aussi que pour se faire accepter, le nouveau président sera obligé de donner des gages dans un pays déchiré par cinq années de crise politique. 

"Un chef d’état digne de ce nom est libre. La sécurité est maitrisée  au Burundi. Le président Evariste Ndayishimiye détient tous les pouvoirs. Il n’aura donc aucun prétexte", soutient Maitre David Dusabe, avocat à Bujumbura.

Appel du pied

 "Ceux qui ont fui le Burundi et sont allés se plaindre auprès des colonisateurs, qu'est-ce que vous avez obtenu?", s'est interrogé, Évariste Ndayishimiye avant d'ajouter "les portes du dialogue sont ouvertes. Ceux qui ont toujours avancé le prétexte du dialogue pour perturber le pays, vous pouvez rentrer, nous sommes prêts à discuter."

Le nouveau président a ensuite indiqué que "le dialogue est ancré dans la culture burundaise. Personne n'a le droit de venir nous demander de dialoguer entre nous". Une alluison à peine voilée à la communauté internationale, qu'il accuse d'ingérence.