Les 100 jours du président Evariste Ndayishimiye à la tête du Burundi
Politique

PANA, 20 septembre 2020

Bujumbura, Burundi - Cent jours se sont écoulés depuis l’investiture précipitée, le 18 juin dernier, du nouveau président élu du Burundi, Evariste Ndayishimiye, suite au décès brutal, dix jours jours plus tôt, de son prédécesseur, Pierre Nkurunziza.

Après quinze années passées au pouvoir, le défunt président en avait encore pour deux mois, quand il a disparu subitement, à 55 ans.

Dans l'urgence, il fallait lui trouver un successeur pour combler le vide à la tête d’un pays sonné, mais qui restera digne et calme dans cette douloureuse circonstance.

Constitutionnellement, le pouvoir intérimaire revenait de droit au président en exercice de l’Assemblée nationale, Pascal Nyabenda. L'intérim devait durer trois mois, le temps d’organiser une nouvelle élection à la tête du pays. La loi fondamentale n’avait pas prévu le cas de force majeure où le président sortant décéderait entre l’élection de son successeur et l’investiture de ce dernier.

Déboussolé, le gouvernement sortant se réunit en conseil extraordinaire, le 11juin,  pour discuter de cet imbroglio juridique et de la marche à suivre.

Dirigée par le 1er vice-président de la République, Gaston Sindimwo, la réunion décida à la fin de s’en remettre à la Cour constitutionnelle du pays.

La haute juridiction doit d’abord constater la vacance définitive du pouvoir, ensuite indiquer les voies et moyens de combler le vide.

Le verdict ne tarda pas à tomber et la Cour autorise la prestation de serment du président nouvellement élu avec 68,7 pc des suffrages exprimés.

Le candidat du Conseil national pour la défense de la démocratie/Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD, parti au pouvoir) est solennellement investi, le 18 juin, troisième président élu de l’ère démocratique du Burundi.

Aucun chef d'Etat n'a assisté à cette investiture, ces absences étant officiellement imputées à la pandémie mondiale de coronavirus.

Aussitôt investi, le nouveau chef de l'Etat burundais nomme un cabinet restreint de 15 ministres, contre 21 dans le cabinet sortant, ce qui lui vaudra un premier point dans l'opinion.

La première urgence pour le nouvel exécutif est la gestion du deuil national et l'organisation des obsèques du défunt.

Passé le deuil de sept jours, un dernier hommage populaire est rendu à l’ex-chef de l’Etat, le 29 juin, au stade de Gitega, la nouvelle capitale politique du Burundi, où repose à jamais son corps.

Sous le nouveau régime, on assiste à un premier changement de cap radical concernant surtout la gestion de la pandémie jusque-là négligée au Burundi.

Le précédent régime assurait invariablement que les Burundais étaient protégés "par la grâce divine" et qu'ils n’avaient pas à craindre cet ennemi invisible.

Le nouveau président élu prend plutôt le contre-pied de son prédécesseur et se hâte de décréter le coronavirus "ennemi public n°1" du pays.

Une campagne nationale de dépistage "massive, volontaire et gratuite" des populations est aussitôt lancée.

Des mesures d’accompagnement suivent, notamment la subvention des prix du savon et du mètre cube d’eau à hauteur de 50 pc pour purifier le pays du virus.

Dans les autres domaines de la vie nationale, on retiendra encore des 100 premiers jours du nouveau régime, les efforts visant le rapatriement des derniers réfugiés de la crise politique dans le pays.

La crise faisait suite aux précédentes élections controversées et émaillées de violences, dont une tentative de putsch militaire manqué, en 2015.

Des réfugiés burundais ont commencé à rentrer au pays en provenance principalement du Rwanda.

La voisin du Nord a été longtemps accusé par Bujumbura de prendre en otage les demandeurs d'asile burundais et de les entrainer militairement pour déstabiliser leur pays d’origine.

Les poids lourds de l'opposition en exil, quant à eux, hésitent encore à renter au bercail, faute de signes d’ouverture politique de la part des nouvelles autorités burundaises, accusent-ils.

Sur le plan diplomatique, la situation est encore à l’état de contacts timides avec la communauté internationale.

L'isolement du Burundi sur la scène diplomatique internationale perdure depuis la crise électorale et des droits humains de 2015.

L’Union européenne (UE), principal partenaire technique et financier historique du Burundi, a déjà envoyé des signaux d’ouverture en direction de ce pays isolé dans la région des Grands lacs africains.

La reprise de la coopération internationale est d'autant plus urgente que le Burundi dépend à plus de 50 pc, des aides extérieures conjoncturelles, de l'avis des analystes.

Les Etats-Unis d’Amérique, l’autre partenaire important du Burundi, sont sur la même lancée d’ouverture à la reprise de la coopération bilatérale.

Au niveau de la sécurité, le pays fait face ces derniers temps à un regain de violences de la part d’individus armés qui tuent et pillent la population par endroits, sans toutefois revendiquer leurs actions, ni décliner leur identité.

De manière générale, le climat socio-politique reste délétère, malgré les espoirs suscités par le nouveau régime burundais, selon les mêmes analystes.