Au Burundi, le retour des réfugiés du camp de Mahama
Sécurité

Deutsche Welle, 24.09.2020

Le Burundi accueille les rapatriés du camp de Mahama au Rwanda. Rencontre avec l'un d'entre eux, qui vient de rentrer après des années d'exil.

Par souci d'anonymat, nous appellerons ce jeune rapatrié Hervis Rukundo. Depuis trois semaines, il vit dans un des quartiers populaires de Bujumbura où il loue une chambre de deux mètres sur trois pour 50.000 francs burundais (14.560 francs CFA ; 22,20 euros).

De mauvaises conditions de vie dans les camps

Avec un matelas de 90 centimètres étalé sur le sol, la pièce lui sert de logement et de cuisine. Réfugié au camp de Mahama au Rwanda depuis 2017, Hervis a décidé librement, dit-il, de retourner dans son pays pour trois raisons. 

"La première, c'est que je suis Burundais, il fallait que je regagne mon pays natal. La deuxième, c'est pour répondre à l'appel des autorités burundaises qui ont demandé aux Burundais en exil de rentrer pour contribuer au développement de la nation, puisqu'elles disaient que la situation est apaisée. Enfin, la troisième raison, ce sont les mauvaises conditions de vie dans les camps. Vraiment, il vaut mieux revenir au Burundi que de mourir là-bas."

Depuis son retour, le jeune licencié en droit se dit satisfait par l'état du pays en matière de sécurité. Sur le plan personnel néanmoins, il est déçu car il ne trouve pas d'emploi.

"On nous disait que la situation sécuritaire était apaisée. J'ai vu que c'est conforme à la réalité. Mais mes attentes c'était aussi de contribuer au développement du pays. Nous avons rapatrié nos savoirs et toutes nos forces pour contribuer à ce développement. Mais jusqu'à présent, on n'arrive pas à trouver comment contribuer, on n'a rien à faire, c'est un défi et ce n'est pas conforme à mes attentes", raconte-t-il.

Trop peu de moyens pour se relancer

Hervis a également été victime du fait que les jeunes du quartier ont mal accueilli son retour. Mais la situation se normalise progressivement, estime-t-il.

Le Haut-Commissariat aux réfugiés fournit à chaque Burundais revenu chez lui une aide visant à faciliter sa réintégration. Sa gestion est cependant un vrai casse-tête, selon Hervis. 

"Le HCR nous a pris en charge avec des frais d'assistance. Il nous a donné 140.000 francs burundais. Mais ici les maisons sont chères. Cette chambre, je la loue 50.000 francs par mois. Je devrais payer 150.000 francs d'avance pour trois mois alors que l'on m'a donné 140.000 francs, c'est tellement insuffisant. Alors, après un mois, je dois payer le loyer mais comment faire, alors que l'assistance qu'on m'a donné ne peut même pas couvrir les charges de la maison ? C'est un grand problème. Quant à notre ration alimentaire, on nous a donné une ration de trois mois et elle va se terminer dans un mois."

Françoise Nibitanga, 55 ans, est la mère d'Hervis Rukundo. Quand nous lui avons tendu le micro, celle-ci n'a pas pu retenir ses émotions.

"Ooooh, j'ai remercié Dieu, vraiment, puisque je savais qu'il n'est pas bien en exil", raconte-t-elle les larmes aux yeux."C'est la joie, que Dieu soit loué pour son retour, même si je suis incapable de l'aider. Je vous demande de l'aider dans la recherche d'un emploi pour qu'il puisse travailler et bien mener sa vie et louer au moins une chambre."

Depuis un mois, plus d'un millier de réfugiés sont rentrés du camp de Mahama au Rwanda, un camp qui abrite encore plus de 60.000 Burundais. Selon les prévisions du gouvernement burundais, le processus de rapatriement doit se terminer d'ici la fin de l'année civile.