Burundi : Le Premier ministre dénonce une gestion opaque de la REGIDESO
Economie

PANA, 14 Octobre 2020

L’Etat burundais demande des comptes à son entreprise de production d’eau et d’électricité

Bujumbura, Burundi - Le nouveau Premier ministre burundais, Alain Guillaume Bunyoni, a tapé du poing sur la table, mercredi, lors d’une descente à la régie de production d’eau et d’électricité (REGIDESO, 96,5% de la capacité totale de production du pays), lui reprochant une gestion opaque depuis des années.

« Vous vendez l’eau et l’électricité produites avec les moyens de l’Etat, mais force est de constater qu’aucune dividende ne lui a été reversée au cours des dix dernières années », a-t-il interpellé sèchement la direction et le personnel de l’entreprise.

Le Premier ministre a avisé que des sanctions allaient tomber si l’entreprise ne venait pas à prendre des mesures de redressement, passant par une gestion transparente et un sens élevé du patriotisme.

Différents rapports sur la gestion de l’entreprise convergent, notamment sur des dettes impayées qui l’asphyxient, dont celles de l’Etat, la corruption qui la mine de l’intérieur et le système de recouvrement défaillant.

Les pertes de distribution sont estimées à 20% pour l’électricité et 40% pour l’eau, tandis que le recouvrement annuel tourne autour de 66%.

L’entreprise se distingue encore par un personnel jugé pléthorique, gonflant ainsi la masse salariale et dépensant plus qu’elle ne produit.

A titre indicatif, le personnel de la REGIDESO oscille autour de 1.200 employés pour 110.000 abonnés, soit un ratio de 80 abonnés par employé.

Les standards de la Communauté est-africaine de libre échange, dont fait partie le Burundi, recommandent un ratio d’un employé pour 50 abonnés.

L’entreprise en question dispose actuellement d’une puissance électrique installée de 90 Mégawatts dont 34 d’origine hydraulique.

Les données officielles indiquent que cette énergie représente à peine 4% des besoins du pays et moins de 3% des ménages raccordés à l’électricité.

De l’avis des spécialistes, le Burundi bénéficie pourtant d’un régime hydrologique jugé très intéressant.

Le gisement hydroélectrique du Burundi a été évalué à 1.700 MW dont environ 300 MW techniquement et économiquement exploitables. L’atlas burundais de l’hydroélectricité compte 184 sites potentiels recensés.

En raison de cette carence énergétique, beaucoup de grands projets sont en souffrance, notamment la cimenterie du Burundi (8 MW nécessaires), l’extraction du nickel de Musongati qui demanderait jusqu’à 120 MW.

L’environnement pâtit aussi de cette situation dans un pays où 94% de Burundais n’accédant pas à l’énergie électrique se rabattent sur le bois de chauffage pour les besoins ménagers.

La « Vision Burundi 2025 » souligne l’importance de développer le secteur énergétique en tant que moteur et catalyseur de la réduction rapide et durable de la pauvreté.

Dans cette vision, il est indiqué que le Burundi ne pourra développer ses services, ses activités industrielles et minières, promouvoir le transport, les télécommunications, les technologies de l’information et de la communication (TIC), le tourisme ou encore la distribution en eau potable sans que l’énergie ne soit vulgarisée en quantité et qualité suffisantes dans les milieux urbains et ruraux.

La vision est tournée vers les bailleurs de fonds multilatéraux et bilatéraux pour relever le défi lié à la crise énergétique structurelle dans le pays.