Acat-France organise une nuit de prières pour les droits de l’Homme au Burundi
Droits de l'Homme

La Croix, 25/06/2021

Au Burundi, des signaux contradictoires en faveur des défenseurs des droits de l’homme

Analyse

À l’occasion de la 16e édition de la Nuit des veilleurs, l’Acat-France organise, le samedi 26 juin, une nuit de prières où il sera question, en particulier, du sort des défenseurs des droits de l’homme au Burundi. Un an après l’investiture du président Évariste Ndayishimiye, leur situation s’est légèrement améliorée.

C’est une surprise, une bonne surprise. Condamné à trente-deux ans de prison, le défenseur des droits de l’homme Germain Rukuki vient de voir sa peine réduite à un an et demi par la cour d’appel de Bujumbura, mercredi 23 juin. Emprisonné depuis plus de quatre ans, ce membre de l’Acat-Burundi devrait donc être libéré bientôt.

Arrêté en juillet 2017, déclaré coupable et emprisonné en 2018 pour « rébellion », « participation à un mouvement insurrectionnel », « atteinte à l’autorité de l’État », le sort de Germain Rukuki semblait scellé : comme celui de très nombreux défenseurs des droits humains, de journalistes, de membres de l’opposition depuis le coup de force constitutionnel, en 2015, de l’ancien président Pierre Nkurunziza, décédé l’an passé, sans doute du Covid-19.

Une libération comme gage à l’Union européenne

Comment comprendre cette soudaine clémence dans un régime connu pour son extrême dureté avec ceux qui le critiquent ? « L’annonce de sa libération intervient alors que le Burundi négocie avec l’Union européenne la fin des sanctions qui pèsent sur lui. En libérant Germain Rukuki, Bujumbura donne un gage à l’UE pour qu’elle accepte de relancer sa coopération », analyse Clément Boursin, le responsable de la zone Afrique à l’Acat.

 « On peut noter un léger mieux dans le climat social depuis un an, depuis la mort de Pierre Nkurunziza et l’investiture de son successeur, le président Évariste Ndayishimiye, poursuit-il. La libération de Nestor Nibitanga, l’ancien responsable de l’Aprodh (Association pour la protection des droits humains et des personnes détenues), le 27 avril, va aussi dans ce sens. Mais il ne faut pas être dupe, la situation est encore très dangereuse pour les défenseurs des droits de l’homme au Burundi. »

Les ONG restent prudentes

Et de rappeler que la Cour suprême du Burundi a rendu publique, en février dernier, la condamnation de douze défenseurs des droits humains et journalistes burundais en exil – dont le président de l’Acat-Burundi – à des peines de prison à perpétuité pour « insurrection » et « organisation d’un coup d’État ».

Si la remise de peine de Germain Rukuki est saluée par toutes les grandes ONG de défense des droits humains, ces organisations restent aussi prudentes : « Les autorités envoient toujours des signaux contradictoires. Elles ont levé certaines restrictions imposées à la société civile et aux médias depuis le début de la crise politique en 2015. Mais elles ont aussi renforcé les restrictions pesant sur les défenseurs des droits humains et les journalistes qui sont perçus comme critiques à l’égard du gouvernement », analyse ainsi Human Rights Watch.

En un an, au moins 554 tués

Et si l’on en croit la Ligue burundaise de défense des droits de l’homme (Iteka), l’une des rares ONG à travailler encore au Burundi, mais de manière clandestine, les violences politiques n’ont pas diminué depuis un an.

Dans une lettre adressée à Evariste Ndayishimiye, le 18 juin, Iteka constate qu’« au moins 554 personnes ont été tuées » cette année : « Près de la moitié des victimes ont été retrouvées dans des rivières, lacs, caniveaux et ruisseaux, un phénomène toujours grandissant. » Et « au moins 53 personnes ont été enlevées et sont portées disparues ». Des exactions commises par les forces de l’ordre et les miliciens rattachés au pouvoir.

Laurent Larcher

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