Rwanda : do you speak français ?
Afrique

Deutsche Welle, 10.08.2021

Fin mai, Emmanuel Macron inaugurait un nouveau centre culturel francophone à Kigali, sept ans après que l'Institut français a fermé ses portes.

Lors de sa visite officielle au Rwanda, fin mai, le président français, Emmanuel Macron, avait inauguré un nouveau centre culturel francophone.

En effet, il y a sept ans que l'Institut français a fermé ses portes dans le pays. Cette visite du président français a été interprétée par certains comme un signe de la possible renaissance de la langue française dans ce pays. Or, c'est loin d'être encore le cas.

L’enseignement du français au Rwanda reste minoritaire et dépend largement de l’état des relations entre Kigali et Paris. 

L'enseignement du français : encore peu d'intérêt

Nous sommes au groupe scolaire de Cyahafi, en plein cœur de la capitale rwandaise, Kigali. C’est l’heure du cours de français en deuxième année secondaire. Claire, l’enseignante de français, fait répéter un dialogue à une classe mais elle explique qu’il est difficile d’enseigner cette langue car les élèves ne manifestent que peu d’intérêt.

"Il n’y a pas assez de volonté, il n’y en a pas vraiment. Alors, je crois que c’est là que se trouve le problème parce que la langue française est une langue qui demande beaucoup de volonté, beaucoup d’exercice, et ces enfants n’ont aucune volonté", explique l'enseignante.

Pourtant, si les élèves manquent de volonté, comme le déplore leur enseignante, une autre raison tient au manque de place du français dans les programmes, comme nous l’explique Souvenir, un des élèves de cette classe.

"Il n’y a que deux heures de français par semaine. Un cours qui ne dure que 40 minutes ne nous sert à rien. La plupart du temps, on ne comprend rien à ce qu’on nous enseigne", dit la jeune fille.

Si Souvenir n’a pas pu s’exprimer en français tout au long de notre entrevue, c’est parce que l’apprentissage de cette langue n’est plus entretenu, selon Henry Rugema, un consultant dans le domaine de l’éducation au Rwanda.

"Le ministère de l’Education n’a pas de programme en français pour le niveau du primaire. Même les anciens livres de français n’existent plus. Le ministère les a collectés tout en nous interdisant de les utiliser, en nous promettant une nouvelle édition", estime Henry Rugema.

Relations tumultueuses

Depuis 2008, le français a cessé d’être la langue d’instruction à la suite d’une nouvelle dégradation des relations entre la France et le Rwanda. En 2006, les mandats d’arrêt émis par le juge français Bruguière à l’encontre des proches du président Kagame, dans l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion de l’ancien président Habyarimana, avaient en effet beaucoup irrité Kigali.

De nombreux spécialistes de l’éducation des langues estiment ainsi que l’éradication du français dans les écoles est un acte politique qui semble n’avoir aucun lien avec l’intérêt des élèves.