Au Burundi, un proviseur français accusé de harcèlement reste en poste
Education

Mediapart3 juillet 2022

Accusé de harcèlement, de sexisme et de recours à la prostitution, le proviseur de l’école française de Bujumbura est toujours en poste, malgré de nombreuses alertes à l’ambassade de France et au ministère des affaires étrangères.

Sur le papier, l’école française de Bujumbura a de quoi faire rêver : un grand terrain arboré en plein centre de la capitale burundaise, plusieurs bibliothèques, une mini-ferme, un potager… Le règlement intérieur de l’école, qui compte un peu plus de 400 élèves de la maternelle au lycée, rassure sur l’ambiance qui y règne : à l’école française, on apprend et pratique « la tolérance, le respect d’autrui, l’égalité entre les sexes, le refus de toute discrimination », et « toute forme de violence psychologique, physique ou morale » est proscrite.

Une partie de l’équipe enseignante accuse pourtant la direction de l’école, et en particulier son proviseur – un personnel détaché de l’Éducation nationale française – de passer outre ces principes. Dans huit témoignages écrits que Mediapart a pu consulter, des enseignant·es et ex-enseignant·es de l’école dénoncent un « climat de peur », de dénigrement, d’intimidation, ainsi que des propos jugés sexistes et islamophobes. Un neuvième témoignage porte sur de possibles faits de recours à la prostitution et d’encouragement à la prostitution (interdits par la loi tant française que burundaise).

Un signalement a été adressé le 8 juin à la procureure de Paris par la sénatrice des Français de l’étranger Mélanie Vogel sur les agissements présumés de ce proviseur, Didier T.

Malgré cela, aucune enquête interne n’a été lancée par l’école, ni par l’ambassade de France (dont un représentant siège au comité exécutif de l’école), ni par le ministère de l’éducation nationale français (dont le proviseur est un personnel détaché), ni par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger - l’AEFE (dont l’école est partenaire).

Alertée à plusieurs reprises, l’ambassade de France au Burundi semble avoir tardé à prendre la mesure de la gravité potentielle des faits rapportés, réduisant à plusieurs reprises, dans des documents internes, ces accusations à des problèmes de « management », et mettant deux mois à recevoir les plaignant·es

Le ministère des affaires étrangères assure que l’ambassade a « apporté écoute et accompagnement aux parties concernées ». Des fonctionnaires français ayant eu connaissance du dossier regrettent pourtant le « mépris » avec lequel ces témoignages auraient été traités. Également contactés, le ministère de l’éducation et l’AEFE n’ont pas souhaité réagir.

Le proviseur, lui, nie la plupart des faits reprochés et s’estime victime d’une « manipulation » venant d’employé·es mécontent·es des réformes qu’il aurait impulsées à la tête de l’établissement.

« Climat de peur »

Arrivé au Burundi début septembre 2020, le directeur de l’école française aurait rapidement instauré un climat singulier au sein de ses équipes, rapportent les témoignages – à l’origine destinés aux autorités françaises – dont nous avons pu prendre connaissance.

Un épisode en particulier a marqué les esprits. En 2020, alors qu’il passe ses premiers jours au Burundi en quarantaine Covid dans un hôtel de la capitale, Didier T. rencontre deux enseignantes de l’école française, confinées dans le même hôtel que lui.

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