L'ONU publie vendredi le rapport sur une décennie de crimes en RDC (1993-2003)
Afrique

@rib News, 30/09/2010 – Source AFP

● Un rapport de l'ONU sur une décennie de crimes met en cause plusieurs pays africains

Le rapport de l'ONU sur les crimes perpétrés lors des deux guerres, entre 1993 et 2003, accuse à des degrés divers plusieurs pays africains, dont le Rwanda, l'Ouganda, le Burundi et l'Angola. Ce rapport doit être publié vendredi.

Le rapport que doit publier l'ONU vendredi sur une décennie de crimes en RD Congo (1993-2003) met en cause, à des degrés divers, différents pays africains intervenus au cours de l'une ou des deux guerres dans ce pays.

"Le présent rapport a identifié des pays qui peuvent être tenus responsables de violations graves des droits de l'Homme commises par leurs armées nationales pendant la période sous considération en RDC, notamment l'Ouganda, le Rwanda, le Burundi et l'Angola", indique le projet de rapport dont l'AFP a obtenu une copie (article 1084).

-- Le Rwanda fait a priori l'objet des accusations les plus graves. Ses forces ont fait corps avec celles de l'Alliance des forces démocratiques pour la libération (AFDL) de Laurent-Désiré Kabila, en pourchassant les réfugiés hutu.

"Les attaques systématiques et généralisées (...) ayant ciblé de très nombreux réfugiés hutu rwandais et des membres de la population civile hutu et causé leur mort, révèlent plusieurs éléments accablants qui, s’ils sont prouvés devant un tribunal compétent, pourraient être qualifiés de crimes de génocide" (article 517).

-- L'Ouganda est accusée de plusieurs crimes de guerre et crimes contre l'Humanité, dont "l'arrêt des turbines du barrage d'Inga, qui alimentait en électricité une grande partie de la ville de Kinshasa (et qui) a causé la mort de nombreuses victimes vulnérables" (481).

-- Les Forces armées du Burundi (FAB) sont accusées d'avoir participé, aux côtés des forces rwandaises et d'un groupe dissident congolais, aux massacres de plusieurs centaines de civils, surtout des réfugiés, fin 1996, dont certains brûlés vifs (articles 197, 198)

-- Le Rwanda a rejeté ces "fausses accusations", l'Ouganda a "rejeté dans sa totalité" le rapport et le Burundi a demandé "avec insistance" à être rayé de la liste des pays impliqués, dans des protestations officielles.

-- Les forces angolaises "procédaient systématiquement à une opération de ratissage et exécutaient tous ceux qu’elles soupçonnaient de collusion avec leurs ennemis" au cours de certaines au moins de leurs avancées.

-- Le rapport accuse l'armée tchadienne d'avoir, le 9 janvier 1999, incendié 55 maisons dans la localité de Boyasegbakole (18 civils brûlés vifs).

-- Enfin le bombardement de Kinshasa par les forces zimbabwéennes en août 1998 "pourrait être qualifié de crimes de guerre" vu le nombre de morts civils au regard de l'enjeu militaire (482).

-- Au total, rappelle le rapport, au moins huit armées nationales et 21 groupes armés irréguliers ont pris part à la deuxième guerre en RDCongo (1998-2001).


● RDC : le rapport de l'ONU, un "inventaire" tragique des crimes de masse

Un rapport de l'ONU; qui sera publié vendredi, sur les violations des droits de l'homme en RDC constitue un "inventaire" tragique des crimes de masse qui y ont été commis en toute impunité pendant dix ans.

Le projet de texte, dont l'AFP s'est procuré une copie, répertorie pas moins de 617 "incidents violents" - essentiellement des massacres de civils - survenus sur le territoire de l'ex-Zaïre entre mars 1993 et juin 2003.

La version finale du rapport, dont la publication a été reportée au 1er octobre suite aux protestations du Rwanda, ne devrait pas modifier les éléments factuels recensés par les enquêteurs du Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme (HCDH).

Chacun des incidents recensés "s'appuie sur au moins deux sources indépendantes identifiées", alors que plus de 1.500 documents ont été rassemblés et analysés.

Au cours de leur travail, de juillet 2008 à juin 2009, les enquêteurs onusiens ont rencontré environ 1.280 témoins et 200 représentants d'ONG locales, qui ont révélé "des crimes jamais documentés auparavant".

Ce document de 555 pages n'est pas un dossier judiciaire, soulignent ses rédacteurs, mais un "inventaire" rigoureux des crimes de masse "les plus graves" perpétrés pendant cette période.

Il se veut d'abord une "contribution historique à la documentation de ces graves violations et à l'établissement des faits". Il entend également donner des pistes aux autorités congolaises "pour rendre justice aux nombreuses victimes et combattre l'impunité" dans le pays.

Le rapport décrit quatre périodes: les dernières années de pouvoir du maréchal-président Mobutu (mars 1993/juin 1996); la guerre menée de juillet 1996 à juillet 1998 par Laurent-Désiré Kabila et ses alliés rwandais, ougandais et burundais; la deuxième guerre d'août 1998 jusqu'à l'assassinat du président Kabila en janvier 2001, qui correspond à "l'intervention d'au moins huit armées étrangères et 21 groupes armés irréguliers"; et enfin la mise en oeuvre progressive du cessez-le-feu jusqu'à juin 2003.

De façon générale, ces dix ans "constituent probablement un des chapitres les plus tragiques de l'histoire récente de la RDC".

Massacres à l'arme blanche, familles brûlées vives, viols collectifs... la lecture de cette litanie d'horreurs soulève le coeur et suscite un profond malaise.

Selon le rapport initial, "la grande majorité" de ces 617 incidents relèvent de "crimes de guerre", tandis que les "vagues de représailles, campagnes de persécution et de poursuite de réfugiés (...) pourraient être qualifiées de crimes contre l'humanité".

"Ces attaques systématiques et généralisées (...) révèlent plusieurs éléments accablants qui, s'ils sont prouvés devant une juridiction compétente, pourraient être qualifiés de crimes de génocide", estime enfin le document.

Et les enquêteurs d'étayer leurs accusations, constatant "la nature systématique, méthodologique et préméditée des attaques répertoriées contre les Hutu","l'usage extensif d'armes blanches - principalement des marteaux - et les massacres systématiques de survivants après la prise des camps".

Parmi les "dizaines de milliers de victimes", ils dénombrent "une majorité d'enfants, de femmes, de personnes âgées et de malades, souvent sous-alimentés, qui ne posaient aucun risque pour les forces attaquantes".

Ces lignes ont suscité la fureur du régime rwandais de Paul Kagame, qui fonde toute sa légitimité sur le fait d'avoir mis fin au génocide de 1994 contre les Tutsi qui a fait quelque 800.000 morts selon l'ONU.

Kigali n'est pourtant pas seul concerné: l'Angola, le Zimbabwe, le Burundi, l'Ouganda, le Tchad et les autorités congolaises sont également mises en cause dans le rapport.