Burundi : l’opération anti-corruption laisse sceptique
Opinion

@rib News, 19/10/2010

Réprimer la corruption ou en faire un monopole du CNDD-FDD ?

Par Sirahenda Jean Gabin

Qui pouvait le croire ? Qui pouvait croire que le régime CNDD-FDD allait réellement appliquer le mot d’ordre tolérance zéro et s’attaquer sérieusement à la corruption, qui semblait être une seconde nature chez les tenants du pouvoir actuel ? Des boucs émissaires ont été arrêtés, mais l’on découvre aujourd’hui les véritables motifs de leur poursuite.

On reproche en effet aux dirigeants de la SOSUMO et de l’OTRACO leur double jeu. En effet, ces responsables auraient cotisé à la fois au CNDD-FDD et au FNL. Histoire d’arroser tous les rosiers car on ne sait lequel fleurira le premier. Ou alors de contourner le principe inique du pouvoir qui ne permet à personne d’occuper un poste de responsabilité, s’il n’a pas la carte du parti présidentiel.

Ces  messieurs avaient, en tout cas, pris soin de se mettre dans les bonnes grâces du Chef : le responsable de la SOSUMO aurait déposé 200 millions sur la table de celui-ci en disant : « Voici ma petite contribution pour les élections ». L’Autre empocha, mais désigna des gens pour suivre comment  il avait fait pour s’enrichir à ce point. Même scénario pour le responsable de l’OTRACO.

Mais, si démasquer le double jeu de  ces gens était relativement facile, la tâche devint plus aisée avec la scission fomentée au sein du FNL. En effet, depuis la démission de Rwasa ourdie par le pouvoir afin de saucissonner ce parti, Miburo est devenu le nouveau chouchou de Nkurunziza. Et pour se faire accepter et bien voir en haut, Miburo n’a pas hésité à trahir les secrets de la maison FNL.

Cependant, bien naïf qui croira que le CNDD-FDD se porte bien : 75% des députés ex CNDD-FDD ont été  mis hors jeu et sont … dépités ; les candidats-présidents, qui avaient battus Nkurunziza au cours du vote préliminaire du conseil des sages, ont fait semblant de ranger l’épée dans le fourreau, mais n’ont pas digéré le forcing de Peter qui a fermé brutalement leurs perspectives légitimes. D’autres voient clairement que le navire CNDD-FDD prend de l’eau : certaines souris songeraient même à le quitter avant qu’il ne sombre pour de bon.

En tout cas, les plus clairvoyants interprètent comme un signe de mauvais augure le fait que la Banque mondiale et le FMI aient éconduit les émissaires de Nkurunziza. On leur aurait montré les photos des cadavres flottant sur la Rusizi en leur disant : « Attention : allez d’abord faire la preuve que vous savez gérer le pays, ensuite vous reviendrez demander de l’argent ! »

D’autres  ne cachent pas leur agacement devant la façon dont les tenants du pouvoir  mettent délibérément en faillite les sociétés publiques afin de mettre en place, sur leur dépouille, leur propre société privée. La preuve ? La SOSUMO. Qui ignore que les plantations de canne à sucre de la Rukoko appartiennent à Nahum et à Nkurunziza ?

D’autres enfin ne comprennent pas les raisons qu’a Nkurunziza de couvrir P. Buyoya en niant que l’armée burundaise avait été envoyée au Congo. Les blessés, et ceux qui ont perdus les leurs dans cette expédition, se sentent insultés par ce mensonge lâche.

Auraient-ils oublié que le pouvoir auto proclamé de Nkurunziza observe les règles de l’honneur comme on observe les étoiles : de très loin ?