Révélation du "plus grand scandale politico-financier jamais connu au Burundi"
Politique

@rib News, 24/12/2010 – Source AFP

 Une ONG burundaise de lutte contre la corruption a révélé vendredi l'existence d'un contrat de plus de 500 millions de dollars entre le gouvernement du Burundi et une entreprise américaine, signé en mars 2010 dans une totale « illégalité », selon cette organisation.

« Nous venons de découvrir que le gouvernement a signé le 23 mars 2010 avec la société américaine AAE Systems Inc basée en Californie, un contrat pour la fourniture de matériels de communication », a annoncé vendredi le président de l'Observatoire de la lutte contre la corruption et les malversations économiques (Olucome), Gabriel Rufyiri.

Ce contrat s'élève à plus de 500 millions de dollars, une somme colossale qui dépasse les recettes de l'Etat en 2010, et a été signé dans une totale « illégalité », selon M. Rufyiri.

Sa signature n'a jamais été révélée au public, a-t-il relevé. « Le marché a été passé de gré à gré, en violation de la loi sur les marchés publics. Le dossier n'a jamais été étudié au Conseil des ministres, comme le prévoit la Constitution dans de tels cas ».

Enfin, le contrat a été signé par le ministre de la Planification d'alors, Tabu Abdallah Manirakiza, alors que selon la loi burundaise, « seul le ministre des Finances peut engager le Burundi financièrement », a rappelé M. Rufyiri.

« Pour l'Olucome, Il s'agit du plus grand scandale politico-financier » jamais connu au Burundi, a insisté l'activiste, en parlant « d'une histoire qui dépasse l'imagination ».

Ce contrat porte sur la fourniture de plusieurs systèmes de communication pour la présidence, les provinces, l'armée, l'aéroport de Bujumbura, avec la fourniture de centaines de véhicules.

Interrogé, aucun responsable gouvernemental n'a accepté de s'exprimer sur le sujet. Une personne impliquée a cependant reconnu l'existence de ce contrat, invoquant « une affaire qui relève du secret d'Etat » et niant toute « corruption ».

« C'est un contrat illégal qui dénote une gestion mafieuse au sommet de l'Etat », a accusé M. Rufyiri: « non seulement l'autorité qui a signé n'était pas habilitée à le faire, mais les lois sur les marchés publics n'ont pas été respectées, ce montant n'a pas été prévu dans le budget 2010 et le reste du gouvernement n'a pas été informé ».

« D'après nos informations, le Burundi aurait accordé en échange des concessions minières à cette société » américaine, a-t-il affirmé, assurant qu'une partie de l'argent avait déjà été payé.

« Nous pensons qu'il y aurait une histoire de commissions en dessous et nous exigeons que ce contrat soit annulé (...) », a conclu M. Rufyiri.

Le contrat a été négocié par la ministre des Finances, Clotilde Nizigama, le chef de cabinet militaire du président, le général Evariste Ndayishimiye et le chef d'état-major de l'armée, le général Godefroid Niyombare, selon l'Olucome.

Son signataire M. Manirakiza est aujourd'hui conseiller principal du président Pierre Nkurunziza chargé des questions économiques.

L'Olucome a déjà révélé plusieurs scandales financiers et affaires de corruption, dont la vente illicite d'un avion présidentiel en 2006.

Son vice-président, Ernest Manirumva, avait été tué à coups de couteau en avril 2009. L'actuel président de l'association a souvent été menacé de mort et a déjà été emprisonné à plusieurs reprises.