Le CNDD-FDD s’en prend aux droits civils et politiques des citoyens burundais
Droits de l'Homme

@rib News, 01/10/2008

Le parti CNDD-FDD (au pouvoir) cherche actuellement à se soustraire des obligations des instruments internationaux déjà ratifiés depuis longtemps par le Burundi, apprend-on de source proches de l’Assemblée nationale.

Ce mercredi 1er octobre, l'Assemblée nationale du Burundi va examiner, en seconde lecture, la loi portant ratification du « Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques », alors que cette loi avait déjà été votée en première lecture lors de la session ordinaire de juin 2008 par les deux chambres du Parlement burundais, l'Assemblée nationale et le Sénat.

Pour rappel, c’est par le décret-loi n° 1/009 du 14 mars 1990 que le Burundi a ratifié le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques.

Mais au lieu de promulguer la loi portant ratification du Protocole facultatif, le président de la République, Pierre NKURUNZIZA, a demandé au Parlement de procéder à une deuxième lecture pour, espère-t-il cette fois-ci, rejeter cette loi.

Pour expliquer le volte face présidentiel, il faut rappeler que selon ce Protocole, en son article 2, « tout particulier qui prétend être victime d’une violation de l’un quelconque ces droits énoncés dans le Pacte et qui a épuisé tous les recours internes disponibles peut présenter une communication écrite au Comité pour qu’il l’examine ».

Ainsi donc, tout citoyen d'un Etat partie prenante au Protocole, s’estimant lésé dans ses droits, peut directement saisir le Comité des Droits de l'homme des Nations Unies. Selon plusieurs sources, les 22 députés dernièrement radiés du Parlement burundais comptaient faire usage de ce recours.

Se rendant compte, mais tardivement, que le vote de cette loi offrait aux citoyens burundais la possibilité de saisir directement le Comité des Droits de l'homme des Nations Unies, le pouvoir actuel issu du parti CNDD-FDD, est entrain de manoeuvrer pour faire marche arrière. En effet, pour un pouvoir habitué à piétiner les droits des citoyens, même ceux jouissant de l’immunité parlementaire, la promulgation de cette loi apparaît comme dangereuse.

Les services de la présidence de la République ont alors pris l'affaire en main et le chef de l’Etat a vite adressé une lettre au président de l'Assemblée nationale pour demander une seconde lecture de la loi. L'objectif inavoué du CNDD-FDD étant bien entendu de rejeter ce Protocole, lors de ce nouvel examen, comme l’indique le rapport de la commission saisie au fond pour examiner cette loi de ratification.

Mais, selon certains constitutionnalistes, la partie n'est pas gagnée d'avance pour les tenants du régime car leur projet risque d'être bloqué par les procédures d'adoption des lois. En effet, ces experts s’appuient sur l’Article 197 de la Constitution qui précise les modalités de promulgation des lois par le Président de la République en ces termes :

« Le Président de la République promulgue les lois adoptées par le Parlement dans un délai de trente jours à compter du jour de leur transmission, s’il ne formule aucune demande de seconde lecture ou ne saisit la Cour Constitutionnelle en inconstitutionnalité.

La demande d’un nouvel examen peut concerner tout ou partie de la loi.

Après une deuxième lecture, le même texte ne peut être promulgué que s’il a été voté à une majorité des trois quarts des députés et trois quarts des sénateurs.

Avant de promulguer les lois organiques, le Président de la République doit faire vérifier leur conformité à la Constitution par la Cour Constitutionnelle. »

Une bataille juridique serrée est donc prévisible au sein du Parlement, au vu, d’une part, du délai de plus de 30 jours écoulé entre le premier vote et la demande du deuxième examen de la Loi – mais un antidatage est vite fait – et, d’autre part, du nombre des 3/4 de parlementaires, des deux chambres réunies séparément, nécessaire pour le vote en deuxième lecture.

Selon les dernières informations en provenance du Palais de Kigobe, siège de l’Assemblée nationale, les députés et sénateurs du Frodebu, aile Léonce Ngendakumana, du CNDD et de l'UPRONA pourraient mettre en péril le projet du CNDD-FDD.

Mais depuis l’avènement du pouvoir CNDD-FDD, ce parti a déjà démontré, à maintes reprises, qu’il se fout pas mal des procédures légales. Le droit est sans cesse piétiné et la dignité humaine est massivement bafouée par un pouvoir déjà à bout de souffle et qui se comporte de plus en plus comme un régime en fin de règne.