A Bruxelles, l’ADC-Ikibiri demande ŕ l'UE de faire pression sur Nkurunziza
Politique

@rib News, 18/04/2011

Bruxelles, le 18/04/2011

A Madame la Commissaire aux Affaires Etrangères de la Commission Européenne

À Bruxelles

Madame la Commissaire,

Nous avons l’insigne honneur de nous adresser à votre très haute autorité en votre qualité de Commissaire aux Affaires Etrangères de la Commission Européenne et partenaire garant du processus de paix au Burundi pour lancer un nouveau cri d’alarme quant au processus de Paix et de Réconciliation gravement menacé au Burundi. Nous faisons appel à votre intervention dans la crise politique burundaise actuelle consécutive au holdup électoral du 24 mai 2010 au Burundi et les multiples conséquences y afférentes.

A la suite de cette mascarade électorale de 2010, notre coalition politique ADC-IKIBIRI (Alliance des Démocrates pour le Changement- IKIBIRI) a multiplié les interventions au niveau de la Communauté Internationale, notamment auprès de l’Union Africaine, de l’Union Européenne, des Pays de l’Initiative régionale de Paix pour le Burundi et du Facilitateur principal dans le processus de paix au Burundi, pour qu’il y ait une  combinaison  des efforts afin de ramener sur le droit chemin le processus de paix et de réconciliation au Burundi. Malgré les efforts des uns et des autres, le pouvoir en place a réfuté toutes les propositions pertinentes de dialogue avancées par notre coalition et qui nous semblaient être soutenues par tous les partenaires politiques burundais qui contribuent au programme de consolidation de la paix dans notre pays. Au contraire, le pouvoir en place a manifestement mis en avant une démarche politique de forcing pour mettre en place un pouvoir totalitaire et d’exclusion.

En effet, depuis la découverte des fraudes massives et irrégularités notoires orchestrées par le parti au pouvoir le CNDD-FDD en complicité avec la CENI et qui ont entaché l’organisation du reste des élections (présidentielles, sénatoriales et législatives), le Burundi vit une crise politico-institutionnelle et les moments les plus difficiles de son histoire démocratique. Les conséquences de cette mascarade électorale de 2010 s’avèrent sérieusement néfastes et nombreuses, entre autres, la non–reconnaissance des institutions issues des élections biaisées par les partis de l’opposition et une partie de la communauté internationale, la destruction du processus électoral au Burundi, le retour de facto au monopartisme et refus de l’opposition, l’installation d’un régime politique antidémocratique, illégitime et répressif, exclusif, le renforcement de l’insécurité, de graves divisions sociales et politiques dans la population, la perte de confiance de la population dans son pays et ses dirigeants, ainsi que la perte de confiance des bailleurs de fonds.

Notre Coalition ADC-IKIBIRI, une organisation politique légale mise en place après cette mascarade électorale, va plus loin que le seul objectif du règlement du contentieux électoral. En effet, elle  a une vision à moyen et long terme pour le pays qui se traduit par un combat politique axé principalement sur le déracinement des principales tares actuelles observées chez le pouvoir en place. L’ADC-IKIBIRI a opté pour une voie politique, démocratique et  pacifique et n’est pas prête à faire la guerre.

Madame la Commissaire aux Affaires Etrangères,

Nous vivons actuellement une situation implosive au Burundi ponctuée par l’insécurité grandissante et la corruption généralisée. Le rouleau compresseur sur l’opposition continue à fonctionner et devient un mode de gouvernance du pouvoir actuel. Des arrestations arbitraires des membres de l’opposition s’observent quotidiennement, les leaders de l’opposition ont été poussés à l’exil, des assassinats, des emprisonnements et des menaces de mort des membres de la société civile sont monnaie courante.

La corruption généralisée, les malversations économiques et le détournement des fonds publics, le manque de transparence et l’opacité dans la gestion de l’Etat s’avèrent être aujourd’hui les principaux responsables de la mauvaise gouvernance économique au Burundi. La situation est d’autant plus inquiétante aux yeux des Burundais, amis du Burundi et des bailleurs de fonds que ces mauvaises pratiques de gestion opaque ont tendance à s’institutionnaliser. Les cas de corruption continuent à frayer la chronique, citons notamment la vente illicite du jet présidentiel –le Falcon 50- de façon mafieuse, sans respect d’aucune procédure légale, les cahiers ougandais, le dossier des plaques d’immatriculation , INTERPETROL , les haricots de la police burundaise , le sucre de la SOSUMO , la route RUMONGE , le café burundais , le Pétrole nigérian , les 37 milliards de fbu cédés gratuitement au Congo et au Rwanda , le matériel défectueux au ministère de la défense, et dernièrement le scandale mafieux des 650 milliards de fbu pour l’achat du matériel de communication à la société américaine AEE dénoncé par l’ONG anticorruption OLUCOME.

Jour pour jour, le gouvernement du Burundi ne cesse de freiner l'épanouissement de son peuple par des actions impopulaires : la hausse des prix des denrées de première nécessité, le problème de transport sur taxis moto qui a été interdit en ville, le redéploiement et l’octroi de l’emploi, une autre forme de chasse des opposants politiques, etc.

Face à ces agissements, assainir le climat politique en privilégiant le dialogue avec tous les acteurs sociopolitiques reste la seule issue pour prévenir les crises et rassurer les leaders de l’opposition qui ont fui leur pays pour qu’ils regagnent la terre natale. La stabilité de la sous-région en dépendra.

Nous demandons avec insistance, à la Commission Européenne ce qui suit :

1)     Amener le pouvoir en place au Burundi à arrêter les mesures oppressives prises à l’endroit des Leaders de l’opposition, de leurs partis politiques et leurs militants, de la société civile et des médias ; à libérer tous les prisonniers politiques et cesser les actions impopulaires de tout bord .

2)     Signifier au Gouvernement de Nkurunziza que l'Union Européenne trouve intolérable l'impunité des crimes de sang depuis qu'elle a constaté que l'un des présumés assassins du Vice-Président de l'Olucome en avril 2009 soit le même qui ordonne l'arrestation et l'incarcération du Président de l'Olucome deux années plus tard lors de la manifestation légale et pacifique, pour ne citer que celui-là.

3)     Convaincre le pouvoir en place et principalement le Chef d’Etat burundais Pierre Nkurunziza à s’inscrire dans une logique de processus de paix, de dialogue et de collaboration avec l’opposition, de bonne gouvernance démocratique, et non dans une logique de destruction, d’exclusion, de domination et d’oppression contre l’opposition .

4)     Appuyer la mise en place d’un cadre de dialogue qui peut réellement faciliter le contact entre l’ADC-IKIBIRI et le pouvoir en place; et sur ce, persuader le Président Pierre Nkurunziza à initier rapidement un dialogue franc avec l’ADC-IKIBIRI en y incluant tous les autres partenaires sociopolitiques internes et étrangers pour résoudre le contentieux des élections 2010 et d’autres problèmes qui hantent le pays.

5)     Etre témoin et limiter les aides matérielles et financières qu’à des fins humanitaires et faire une pression sur le Président Nkurunziza dans l’aboutissement de ce dialogue dans l’ultime but de créer l’espace de libre action politique, le retour des leaders de l’opposition exilés, le renouement de la confiance et la mise en place des institutions véritablement démocratiques.

Privilégiant son principe sacro-saint de la voie pacifique de dialogue inclusif, l’ADC-IKIBIRI prévient la Commission Européenne que s’il y a des dérapages dus à l’exaspération profonde de la population, le pouvoir Nkurunziza et son gouvernement seront tenus responsables.

Veuillez bien agréer, Madame la Commissaire, l’expression de notre haute considération.

Pour l’ADC-IKIBIRI

Coordonnateur ADC-IKIBIRI Etranger, Aimé Magera