Burundi : Que sont devenus les héros de l’indépendance ? |
Le Prince Louis, sa famille et ses amis : La patrie ingrate ; un long chemin vers l’oubli Par Nils GASARARA - Correspondance particulière - @rib News, 13/10/07 Les dirigeants successifs ont fait subir injustement un triste sort à la famille du prince Louis Rwagasore, héros de l’indépendance, ainsi qu’à ses compagnons de lutte. Les célébrations officielles du 13 octobre, chaque année, date anniversaire de son assassinat, à Bujumbura et dans la diaspora à travers les chancelleries burundaises, ne doivent pas nous faire oublier que, si des larmes sont versées, elles ne sont que de crocodile… La Commission vérité & réconciliation, si d’aventure elle voit le jour, pourrait ne rien y changer. Surtout si elle prône l’amnésie, et si la justice punitive et réparatrice en est exclue. Et pourtant, selon André Malraux, « le tombeau des héros est le cœur des vivants »… Le roi Mwambutsa IV, le père du prince Louis, est décédé de dépit en exil forcé à Genève, en 1976. Sa dépouille repose au cimetière de Meyrin. Selon les autorités, son rapatriement n’est pas une priorité. L’oncle de Rwagasore, le prince Ignace Kamatari, est mort dans des circonstances jamais élucidées. Dans un camouflage, son corps fut abandonné à Sororezo, la colline qui surplombe la capitale Bujumbura. Inspirés, certains de ses enfants prirent le large. Le roi Ntare V, jeune frère de Louis, a été froidement abattu sur ordre, par des militaires, à Gitega, en 1972, pour éradiquer (à jamais ?) la monarchie. Après avoir été ramené par ruse et traîtrise de l’Ouganda d’Idi Amin Dada. Il est toujours enterré dans la brousse, comme un vulgaire chien. Les deux reines mères ont connu, avec la république, une vie et une fin misérables. De même que Marie-Rose Ntamikevyo, l’épouse de Rwagasore. Les deux enfants de ceux-ci sont décédés petits, dans des circonstances médicales plus que troubles. Enfin, les biens de la famille ont mystérieusement disparu, et personne ne veut savoir vers où !… Que sont devenus les héros de l’indépendance ? Sous la plume indignée de Pie Ndagiye, journaliste et député (lui-même assassiné par des militaires gouvernementaux en 1998, ndlr), L’Aube de la Démocratie (n° 55 du 12 juillet 1996), donne la réponse : «Presque tous ont connu une fin misérable ou dramatique. Tombés dans l’oubli pour les uns, emprisonnés, assassinés ou fusillés sans procès pour les autres, la classe politique qui a mené le Burundi à l’indépendance a connu une fin misérable, voire dramatique. Les plus chanceux s’en sont tirés en devenant des hommes d’affaires plus ou moins prospères. Mais on ne peut pas dire que la patrie a su récompenser ses fils qui se sont donnés corps et âme pour que le pays soit gouverné par les Barundis. Jugez-en vous-mêmes !
Voilà le triste tableau. Après avoir connu les persécutions et la prison avant l’indépendance, ils ont connu les persécutions, la prison après l’indépendance, quand ils n’étaient pas purement et simplement assassinés ou fusillés. Ils ont été remplacés par une classe de gens qui avaient combattu l’indépendance, ou par des personnalités qui n’étaient pas aux affaires à ce moment-là. Ce sont ces personnes qui ont instauré la dictature, le règne à coup de génocides, de mensonges, de pillages du pays. Ce sont les mêmes qui ont refusé le résultat des urnes en octobre 1993. Ce pourrait être un acte d’une vaste tragédie intitulée : « L’indépendance volée ». (page 12) Triste actualité ! « La Patrie reconnaissante… », avez-vous dit ?! |